M. Scrooge est un homme acariâtre, un misanthrope asocial et radin qui n'aime pas les gens et le leur rend bien. A la veille de Noël, il est encore une fois dégoûté par le débordement de joie général qui l'entoure et préfère se retirer chez lui. Mais une fois dans sa grande maison vide, le fantôme de son ancien associé mort 7 ans auparavant, chargé d'objets écrasants qui le retiennent au sol, vient le prévenir que des esprits vont venir lui rendre visite pour lui faire prendre conscience d'une réalité. D'abord sceptique, Scrooge doit se rendre à l'évidence lorsque le premier esprit du passé se présente...
C'est sûr, c'est fait pour mettre de la joie, faire scintiller un peu plus les guirlandes de Noël à la maison, rappeler que Noël est une fête de partage et d'amour et qu'il n'y a rien de mieux que la famille, la solidarité, le partage et l'entraide. Enfin bref, presque toutes les vertus chrétiennes véhiculées par l'esprit de Noël (et la morale de l'époque d'écriture) et qui peuvent souvent être hypocrites (être bon pour son prochain pour ne pas aller en Enfer, traduction : faire peur, ça vous rappelle rien ?) alors qu'on n'en a pas forcément besoin puisque ça s'appelle juste être humain et avoir de l'empathie (plus besoin aujourd'hui d'emballer ça exclusivement du papier cadeau religieux, qui plus est du papier cadeau biblique).
Mais voilà, bien sûr c'est bien écrit (quoique lourdement descriptif), bien sûr c'est une jolie histoire... Mais ce que je n'ai pas apprécié, ce qui pourrait presque choquer, c'est le changement absolument RADICAL de Scrooge à la fin, quand il a bien compris qu'on parlait mal de lui et qu'on était bien content qu'il soit mort. C'est en ça que c'est un conte, parce que c'est tout simplement pas possible. Toute la motivation de Scrooge vient uniquement de la peur de mourir seul, pas du tout du fait qu'il se rende compte que c'est sympa de se retrouver en famille pour manger un bon gueuleton au coin du feu avec un arbre si richement décoré qu'il étouffe sous les ornements plus brillants les uns que les autres, ni que c'est pas normal de traiter ses employés et les gens comme de la merde, ni que la magie de Noël s'est tout simplement emparée de lui et que c'est donc un miracle. S'il change, c'est bien parce qu'il a vu une accumulation de faits, parce qu'il a entendu une quantité de choses, et surtout pu apprécier en avance sa jolie petite tombe esseulée. Pour faire court : il a flippé.
Là où Dickens voulait faire briller un peu plus le jour de Jésus et les valeurs censées nous unir, on peut très facilement voir entre les lignes une certaine menace (catholique certes mais pas que), celle d'être passé inaperçu sur cette Terre, de n'avoir pas été aimé (qui aime savoir que personne ne l'aime ?) et de mourir seul (déjà qu'on veut pas mourir, alors seul...). En cela, le changement de Scrooge, même s'il apparaît comme miraculeux et bienvenu dans le roman, ne semble en réalité pas sincère, trafiqué.
C'est très très bête, mais j'ai entendu parler de ce conte il doit bien y avoir 20 ans, quand je regardais un épisode de Dr Quinn dans lequel la Medicine Woman lit l'ouvrage à ses nouveaux petiots, comme son père le faisait pour elle et ses soeurs à chaque veille de Noël. Et tous les enfants d'écouter avec plaisir la lecture de ce conte, comme si c'était la chose la plus lumineuse et réconfortante au monde.
Vingt ans après, j'éclaircis enfin la chose, et je n'ai pas souri de béatitude ni d'espoir à la fin de ma lecture. Je ne suis pas sûre que Dickens voulait juste réchauffer l'atmosphère chez moi pour les fêtes. Derrière les bougies, une morale. Chrétienne ou non, elle vaut pour tous.
Nous avons donc affaire à un mélange, un rappel de l'image de Noël, et un rappel qu'il faut être l'antipode des défauts les plus malsains qui polluent le genre humain. Sans la menace de l'Enfer, ça nous remémore juste qu'il faut pas être un con*.
* : J'aurais pu choisir tellement d'autres adjectifs, mais celui-là a le mérite d'en impliquer pas mal d'autres. Lui attribuer les synonymes de votre choix.
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