A préciser que l'idéologie à l'oeuvre dans le roman de Dickey se trouve en porte à faux avec celle du film de Boorman, ce qui a d'ailleurs causé des frictions de préproduction entre les deux hommes... Dickey (universitaire et poète US réputé) se situe dans la grande tradition américaine du panthéisme et de la Frontière. Il exalte la régénération de l'homme par la violence à la façon de London et d'
Hemingway, en réaction à une civilisation affadissante. Boorman au contraire montre la violence faite à l'innocence de l'homme civilisé appelé à tuer pour survivre et les traumas qui s'ensuivent.
Les deux oeuvres, également brillantes, l'une plutôt réactionnaire et l'autre, plutôt progressiste, sont donc complémentaires et il est passionnant de les confronter ne serait ce que pour exercer son esprit critique en remettant en question sa propre sensibilité idéologique.
Quoiqu'il en soit , dans les deux cas, il n' y a pas de bon sauvage Rousseauiste qui tienne!
Pour le reste, on ne dira jamais assez combien une adaptation filmique brillante peut saborder l'existence même d'un livre. Combien savent que l'immense
Délivrance de
John Boorman est tiré d'un livre? Combien dans le même cas (et moi en tous cas) avant la parution des textes des Guerriers de la nuit et des Chiens de paille, pour citer deux éditions récentes? Il y a là une injustice fondamentale:
Délivrance est un pur bonheur de littérature américaine.