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Citations sur Pensées sur l'interprétation de la nature (36)

XXV.

Je dis analogue ou bizarre, parce que tout a son résultat dans la nature ; l’expérience la plus extravagante, ainsi que la plus raisonnée. La philosophie expérimentale, qui ne se propose rien, est toujours contente de ce qui lui vient ; la philosophie rationnelle est toujours instruite, lors même que ce qu’elle s’est proposé ne lui vient pas.
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XXIV.

esquisse de la physique expérimentale.

La physique expérimentale s’occupe en général de l’existence, des qualités, et de l’emploi.

L’existence embrasse l’histoire, la description, la génération, la conservation et la destruction.

L’histoire est des lieux, de l’importation, de l’exportation, du prix, des préjugés, etc…

La description, de l’intérieur et de l’extérieur, par toutes les qualités sensibles.

La génération, prise depuis la première origine jusqu’à l’état de perfection.

La conservation, de tous les moyens de fixer dans cet état.

La destruction, prise depuis l’état de perfection jusqu’au dernier degré connu de décomposition ou de dépérissement ; de dissolution ou de résolution.

Les qualités sont générales ou particulières.

J’appelle générales celles qui sont communes à tous les êtres, et qui n’y varient que par la quantité.

J’appelle particulières, celles qui constituent l’être tel ; ces dernières sont ou de la substance en masse, ou de la substance divisée ou décomposée.

L’emploi s’étend à la comparaison, à l’application et à la combinaison.

La comparaison se fait ou par les ressemblances, ou par les différences.

L’application doit être la plus étendue et la plus variée qu’il est possible.

La combinaison est analogue ou bizarre.
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XXIII.

Nous avons distingué deux sortes de philosophie, l’expérimentale et la rationnelle. L’une a les yeux bandés, marche toujours en tâtonnant, saisit tout ce qui lui tombe sous les mains, et rencontre à la fin des choses précieuses. L’autre recueille ces matières précieuses, et tâche de s’en former un flambeau ; mais ce flambeau prétendu lui a, jusqu’à présent, moins servi que le tâtonnement à sa rivale, et cela devait être. L’expérience multiplie ses mouvements à l’infini ; elle est sans cesse en action ; elle met à chercher des phénomènes tout le temps que la raison emploie à chercher des analogies. La philosophie expérimentale ne sait ni ce qui lui viendra, ni ce qui ne lui viendra pas de son travail ; mais elle travaille sans relâche. Au contraire, la philosophie rationnelle pèse les possibilités, prononce et s’arrête tout court. Elle dit hardiment : on ne peut décomposer la lumière : la philosophie expérimentale l’écoute, et se tait devant elle pendant des siècles entiers ; puis tout à coup elle montre le prisme [11], et dit : la lumière se décompose.
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XXII.

L’entendement a ses préjugés ; le sens, son incertitude ; la mémoire, ses limites ; l’imagination, ses lueurs ; les instruments, leur imperfection. Les phénomènes sont infinis ; les causes, cachées ; les formes, peut-être transitoires. Nous n’avons contre tant d’obstacles que nous trouvons en nous, et que la nature nous oppose au dehors, qu’une expérience lente, qu’une réflexion bornée. Voilà les leviers avec lesquels la philosophie s’est proposé de remuer le monde.
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XXI.

Recueillir et lier les faits, ce sont deux occupations bien pénibles ; aussi les philosophes les ont-ils partagées entre eux. Les uns passent leur vie à rassembler des matériaux, manœuvres utiles et laborieux ; les autres, orgueilleux architectes, s’empressent à les mettre en œuvre. Mais le temps a renversé jusqu’aujourd’hui presque tous les édifices de la philosophie rationnelle. Le manœuvre poudreux apporte tôt ou tard, des souterrains où il creuse en aveugle, le morceau fatal à cette architecture élevée à force de tête ; elle s’écroule ; et il ne reste que des matériaux confondus pêle-mêle, jusqu’à ce qu’un autre génie téméraire en entreprenne une combinaison nouvelle. Heureux le philosophe systématique à qui la nature aura donné, comme autrefois à Épicure, à Lucrèce, à Aristote, à Platon, une imagination forte, une grande éloquence, l’art de présenter ses idées sous des images frappantes et sublimes ! l’édifice qu’il a construit pourra tomber un jour ; mais sa statue restera debout au milieu des ruines ; et la pierre qui se détachera de la montagne ne la brisera point, parce que les pieds n’en sont pas d’argile.
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XX.

Les faits, de quelque nature qu’ils soient, sont la véritable richesse du philosophe. Mais un des préjugés de la philosophie rationnelle, c’est que celui qui ne saura pas nombrer ses écus, ne sera guère plus riche que celui qui n’aura qu’un écu. La philosophie rationnelle s’occupe malheureusement beaucoup plus à rapprocher et à lier les faits qu’elle possède, qu’à en recueillir de nouveaux.
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XIX.

Il n’y a qu’un seul moyen de rendre la philosophie vraiment recommandable aux yeux du vulgaire ; c’est de la lui montrer accompagnée de l’utilité. Le vulgaire demande toujours : à quoi cela sert-il ? et il ne faut jamais se trouver dans le cas de lui répondre : à rien ; il ne sait pas que ce qui éclaire le philosophe et ce qui sert au vulgaire sont deux choses fort différentes, puisque l’entendement du philosophe est souvent éclairé parce qui nuit, et obscurci par ce qui sert.
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XVIII.

La véritable manière de philosopher, c’eût été et ce serait d’appliquer l’entendement à l’entendement ; l’entendement et l’expérience aux sens ; les sens à la nature ; la nature à l’investigation des instruments ; les instruments à la recherche et à la perfection des arts, qu’on jetterait au peuple pour lui apprendre à respecter la philosophie.
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XVII.

Sont-ce les hommes de génie qui ont manqué à l’univers ? nullement. Est-ce en eux défaut de méditation et d’étude ? encore moins. L’histoire des sciences fourmille de noms illustres ; la surface de la terre est couverte des monuments de nos travaux. Pourquoi donc possédons-nous si peu de connaissances certaines ? par quelle fatalité les sciences ont-elles fait si peu de progrès ? sommes-nous destinés à n’être jamais que des enfants ? j’ai déjà annoncé la réponse à ces questions. Les sciences abstraites ont occupé trop longtemps et avec trop peu de fruit les meilleurs esprits ; ou l’on n’a point étudié ce qu’il importait de savoir, ou l’on n’a mis ni choix, ni vues, ni méthode dans ses études ; les mots se sont multipliés sans fin, et la connaissance des choses est restée en arrière.
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XVI.

Le philosophe, qui n’aperçoit souvent la vérité que comme le politique maladroit aperçoit l’occasion, par le côté chauve, assure qu’il est impossible de la saisir, dans le moment où la main du manœuvre est portée par le hasard sur le côté qui a des cheveux. Il faut cependant avouer que parmi ces manouvriers d’expériences, il y en a de bien malheureux : l’un d’eux emploiera toute sa vie à observer des insectes, et ne verra rien de nouveau ; un autre jettera sur eux un coup d’œil en passant, et apercevra le polype [9], ou le puceron hermaphrodite [10].
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