Citations sur Ressac (89)
La beauté est à vivre avant tout. C’est si banal et en même temps si terrible, un soleil qui se couche. C’est un adieu aux yeux de tous, une théâtrale disparition.
Écrire ne serait-ce donc que ça, une manière désespérée de conserver ce qui meurt ?
Sa prose sent l’encens et les roses gorgées de soleil, elle fait le bruit de l’Espagne brûlée et des émois amoureux, elle a le goût d’une peau ambrée qui vient de jouir et l’odeur du papier bible, ce même mélange de sacrilège et de sublime. En cet instant, rien ne compte d’autre que ça : la littérature.
Évidemment les vivants, tant qu’ils sont vivants, ne semblent rien avoir de précieux. Une voix que l’on entend chaque jour n’a que peu de valeur sur le marché du souvenir. Mais on oublie bien vite qu’ils peuvent disparaître à tout instant. Qu’il faut prévoir, se tenir prêt à affronter la mort et ses ravissements. C’est un leurre, on n’y parvient jamais, ce n’est jamais assez.
Debout face au large, je pense aux plages comme à des morceaux de moi éternellement léchés et nettoyés par la houle. A cet instant j’ai la certitude que cette plage-ci, la plage de Port Maria, gardera pour toujours en son sable une part de celle que je suis aujourd’hui. Je me suis fondue dans ce décor, offerte à lui, j’aurais aimé me baigner nue dans cette mer pour faire peau neuve, pour qu’elle m’accouche. Au lieu de ça je lui ai laissé mes doutes, quelques larmes, et un dessin de mon amoureux. Elle a tout avalé.
Le soleil irradie, bas et rouge, il enflamme toute la partie basse du ciel. Le bleu presque électrique de la mer vibre à l'unisson avec le camaïeu orange du ciel. Tout ça finit dans un dégradé pastel presqu'obscène. Je tente quelques photos, mais toutes sont plates, tellement en dessous de la réalité. Et puis pour quoi faire ? La beauté est à vivre avant tout.
Écrire n'est pas vivre, et mes mots ne sont pas le réel. Au fond, c'est une quête perdue d'avance. Écrire appartient au silence, au vide, aux astres.
Tout est bon à prendre, quand on sent qu’on vacille.
Je n'ai besoin de rien, l'électrique souvenir active chaque soir un fluide brûlant qui frémit et s'écoule à la moindre sollicitation, flamme blanche et souple débordant de miel.
Nourrie de vent, d'écumes et de camélias, je jouis chaque soir dans de flamboyants sursauts, comme ravivée, ressuscitée par le corps.
Camélias fuchsias, ajoncs dorés, bruyères mauves, baies de cynorhodon rouge vif, tapis de violettes...les jardins de Bretagne, en hiver, ne manquent pas de couleurs.