Est-ce que je voulais préparer le conservatoire après tous les efforts que j’avais faits pour quitter le lycée ?
Je voulais d’abord partir dans le midi et baiser avec elle.
Comment ma mère m’a expliqué ce qu’était un phallus, je ne saurais le dire avec précision, mais je ressens encore le trouble de cet instant dans lequel se mêlaient la fierté de savoir, le dépit de ne l’avoir pas compris avant, le regret d’avoir mis peu ou prou ma mère dans l’embarras, mais surtout l’impatience de grandir, et de posséder un « phallus » digne de cette représentation hyperbolique.
« Mon père m’avait appris des chants révolutionnaires, ça oui, couper la tête des bourgeois, des aristos, j’aurais su comment m’y prendre, et construire des barricades, et lancer des cocktails Molotov sur les flics, j’étais prêt, mais savoir comment glisser mon sexe à l’intérieur de celle qui ne demandait que ça, il n’avait même pas pensé que ça pouvait m’être plus utile que la manif du 1er mai »
La mission du terroriste, comme des acteurs, c'est de rendre la fiction réelle, irréparable.
Tout garder pour moi. De peur de décevoir, de peur d’être jugé, ou pire : interprété. L’angoisse que je ressentais devant les pratiques psychanalytiques de ma mère, c’est qu’elle découvre mon angoisse. Car ce mal intime que je ne voulais pas avouer, c’était aussi ce que j’avais de plus glorieux, que je ne voulais pas perdre.
Je suis sorti de la maison au petit matin, j’ai marché à grands pas sous les platanes du cours Mirabeau, sans pouvoir m’empêcher de sourire.
Une chose m’apparaissait sûre et certaine : je n’étais plus le même. Je venais de passer la nuit dans le lit d’une femme, à l’embrasser, la serrer, la baiser, car si cette nuit n’avait pas été celle de l’accomplissement de l’acte sexuel, elle n’en avait pas moins été une nuit d’amour, entière, complète, jusqu’au petit matin frisquet, le reste n’était qu’une question de vocabulaire : est-ce que nous avions fait l’amour ? C’est ce qu’il me semblait puisque j’étais amoureux.