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Citations sur L'Initiation d'un homme, 1917 (13)

C’était juste derrière les tranchées de deuxième ligne, qui zigzaguaient entre le gros abcès de glaise humide, retournée, le long de la crête d’un petit coteau. L’autre jour il y était allé, il avait grimpé dans l’argile boueuse à l’endroit où le boyau s’était affaissé, et à fleur de terre il avait regardé pendant une ou deux longues, anxieuses minutes l’enchevêtrement de tranchées et le terrain défoncé, gangrené, dans la direction des avant-postes allemands. Et tout au long de ces entailles irrégulières, dans l’argile fangeuse, étaient placés des hommes aux jambes et aux pieds énormes à force d’être bottés de glaise, des hommes à la face gris verdâtre, couturée de rides par la tension continue, la peur et l’ennui, aussi défigurés que l’était le coteau balafré par les tranchées et les trous d’obus.
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Cette guerre qui a mis en pièces notre petit monde européen, ou l'ordre avait tant de mal à se substituer au chaos, me semble simplement une bataille gigantesque livrée pour le pillage du monde par les pirates qui se sont engraissés jusqu' à la démence du travail de leurs peuples, du travail de millions d’être en Afrique, dans l' Inde, en Amérique, qui sont tombés directement ou indirectement sous le joug de la race blanche et de sa folle cupidité...
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- Avez-vous jamais vu un troupeau de bétail conduit à l'abattoir par une belle matinée de mai ? demanda l'aspirant sur un ton de mépris enjoué, comme s'il eût deviné les pensées de Martin.
- Je me demande ce qu'ils en pensent.
- Non pas que je me résigne -n'allez pas croire ça ; la résignation est trop facile. C'est grâce à elle que le troupeau se laisse conduire par un gamin de six ans... ou par un Premier ministre !
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Comme un bon nombre de jeunes Américains d'aujourd'hui, je m'étais convaincu que la guerre était le plus grand des maux. Quoique en 1916 je ne fusse pas en âge de voter, j'avais été un ardent partisan de Woodrow Wilson : "II nous tient en dehors des hostilités. » Sa déclaration de guerre, en opposition avec le Pouvoir central, immédiatement après avoir prêté serment pour son second mandat, fut une déception amère. J'ai haï cet homme durant de longues années.
Voilà un cas où la réflexion confirme l'impatience juvénile : j'estime encore que la civilisation occidentale aurait été moins mise en péril si, malgré des provocations telles que le télégramme Zimmerman et les torpillages, Wilson, au lieu d'envoyer une armée, avait usé de la menace d'une intervention américaine pour imposer une paix négociée durant l'été 1917.

Extrait Préface de J. Dos Passos
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Martin s'était penché en arrière, sur sa chaise, ses mains tremblaient, il regardait fixement, les lèvres serrées, tous ces hommes qui passaient, cahotés sur les camions rauques et trépidants. Deux mots se formaient dans son esprit : « charrettes aux condamnés... »
Il y avait des camions où les hommes étaient ivres et chantaient à tue-tête, agitaient leurs bidons en l'air, criaient aux gens qu'ils croisaient sur la route : " Allez au front!"... « Qu'on les envoie dans les tranchées! ». "A bas la guerre!" Il y en avait d'autres où ils restaient tranquillement assis, la face cadavérique sous leur masque de poussière. Par la brèche de la treille, Martin les regardait fixement passer, remarquant des visages intelligents, des visages pleins de beauté, d'autres brutalement gais, d'autres lamentables, pareils à des faces d'ivrognes pleurnichant.
Enfin ce fut la fin du convoi et la poussière retomba peu à peu sur la route creusée de profondes ornières.
- Oh ! Les pauvres enfants, reprit la vieille. Ils savent bien qu'ils vont à la mort !
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Et tout au long de ces entailles irrégulières, dans l'argile fangeuse, étaient placés des hommes aux jambes et aux pieds énormes à force d'être bottés de glaise, des hommes à la face gris verdâtre, couturée de rides par la tension continue, la peur et l'ennui, aussi défigurés que l'était le coteau balafré par les tranchées et les trous d'obus.
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La sueur coulait du visage de Martin sur la face de l'homme ; il sentait les muscles des bras et les côtes du blessé pressés contre lui, en l'étreignant de toutes ses forces pour tâcher de le porter vers l'abri. Cet effort donnait à Martin un contentement étrange. C'était comme si son propre corps avait pris part à l'agonie de ce homme. Enfin, ils étaient lavés, tous les mensonges, toutes les haines, dans la sueur et dans le sang. Rien n'en restait que l'amitié calme d'êtres semblables en tout, éternellement semblables.
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Dans ce même moment, combien d'hommes, tout le long de cet immense Golgotha qui s'étend de Belfort à la mer, doivent être en train de tromper leur ennui et leur souffrance par ce grand geste en abattant les cartes pour faire le pli, pendant que dans leurs oreilles, comme des tam-tams, résonne la danse macabre des canons...
Martin reste allongé sur le dos, regardant le cintre en tôle ondulée de l'abri, où les ombres des cinq têtes se tordent en des formes fantastiques. Est-ce la Mort qu'ils jouent, pour être si joyeux lorsqu'ils font un pli ?
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Il regarda longtemps les petits rangs de nuages qui commençaient à remplir le ciel, comme des jabots et des fraises de dentelle sur une robe de femme. Est-ce qu'il ne se pourrait pas, se demandait-il, que le ciel fût une bienfaisante déesse qui se pencherait doucement au balcon de l'espace pour le soulever contre son sein, où il pourrait s'étendre parmi les jabots de dentelle des nuages bordés d'ambre légère, et de là-haut regarder curieusement la terre tourner comme une boule ? Ce ne serait pas sans beauté s'il en était assez éloigné pour ne plus sentir l'odeur fétide de la douleur.
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La vigueur, le ressort de la vie humaine sont rapidement anéantis par l'organisation, le numérotage. L'excès d'organisation, c'est la mort. Le but de la vie n'est pas l'organisation ; c'est la désorganisation.
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