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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Quand un russe quitte son pays natal, on lui donnait le droit à trois valises. Trois petites valises pour rassembler tous les fragments d'une vie. Mais que mettre à l'intérieur, des souvenirs ou des nécessités ? C'est ainsi l'occasion de faire le bilan de sa vie et d'en découvrir une autre, en partant de rien ou presque, resteront toujours le parfum du souvenir et de la vodka d'antan.

Serguei Dovlatov, de prime abord, effrayé de rassembler sa vie pour la mettre dans de si petits contenants, se limita pourtant à une seule valise. Unique objet pour démarrer en terre américaine, l'écrivain émigré russe va ainsi me conter l'histoire de « la valise », de son costume ou de sa paire de chaussettes. Chaque objet, presque futile aussi imposant voir important qu'une boucle de ceinture, sera l'objet d'une nouvelle autobiographique. Ces dernières sont souvent empreintes de nostalgie, une petite pointe d'ironie, quelques sourires amusants mais surtout beaucoup de tendresse.

Pour moi découvrir un nouvel écrivain russe, c'est caviar et vodka. Une immersion totale ou presque – j'évite quand même de me rapprocher du goulag, la vodka doit y être de piètre qualité. Et la vodka rafraîchit les idées, comme la littérature russe. le souffle glacial du blizzard tourne les pages de ma vie, une bouteille de vodka se vide autant qu'une solitude déverse des verres de transparence. Je ne suis ni poète ni russe, mes vers sont juste des verres d'une vodka blanche et glacée – sans un brin d'herbe de bison.

Je me mets ainsi à la place de l'auteur : que mettrai-je dans une valise qui pourrait ressembler à un fragment de ma vie ? Quelques bouquins, une paire de chaussettes colorées – j'aime pas les chaussettes tristes – et puis on a toujours besoin de chaussettes dans la vie, une boite à trésors au style icône orthodoxe, une bouteille de parfum fleur de coquelicot de l'être aimée, une bouteille de vodka ou d'autres quêtes spirituelles… et puis je crois que j'ai fait le bilan de cette vie-là… Ça fait du bien de lire un tel roman, ça permet de faire le tri dans sa vie, et se rendre compte qu'il n'y a rien dans cette putain de vie qui vaut le coup de m'être gardé. Que quelques souvenirs, comme une évidence, qui eux auront le mérite d'être éternels, même après une bouteille de vodka.

"Je bois uniquement le soir... Jamais avant midi."
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Quand on entreprend un petit voyage, quand on part en vacances, on prend des vetements de rechange dans sa valise. Quand on s'exile, on n'y emporte que des souvenirs. C'est ce que nous dit Dovlatov dans La valise.

Les souvenirs qu'il raconte laissent au lecteur un petit gout amer, mais ils lui fond poindre aussi beaucoup de sourires, parce qu'il y met pas mal d'humour et une fine ironie envers soi-meme.

En de courtes anecdotes, Dovlatov relate ses deboires dans l'URSS finissante, en fait ses aventures ou mesaventures. En une prose agile, operant par courts paragraphes, il arrive a rendre le portrait d'un pays, tres eloigne de la version officielle du regime. Un portrait ou pullulent les petits voleurs au jour le jour, les perdants, les survivants envers et contre tout, inonde par de la vodka frelatee.

Rien n'est vraiment tragique dans ce que raconte Dovlatov. Iossip Brodski, cet autre exile qui recut le Nobel, a dit de lui qu'il est admirable justement dans son rejet de la tradition tragique de la literature russe. Toutes les anecdotes de ce livre sont teintees d'ironie, de scepticisme, et font ressortir l'absurdite de la vie, le stoicisme dont il faut s'armer pour la traverser sans larmes, sinon sans douleur. Stoicisme et quelques bouteilles. Les russes sont passes maitres dans l'art de noyer la douleur dans la vodka.

Dovlatov se rit de tout et de lui-meme, de son experience de journaliste et d'ecrivain, notant par exemple que nul ne peut pretendre en Russie a une credibilite intellectuelle s'il n'est pas passe par une prison. Or lui, il a ete un certain temps gardien de prison. Mais par-ci par-la une certaine sentimentalite affleure, comme quand il s'emeut (pas trop, juste ce qu'il faut) decouvrant que sa femme garde precieusement une photo de lui, et en profite pour lui dedier de tres belles pages.

Dovlatov se decrit comme un grand paresseux, ou plutot un grand indolent. Ne nous y trompons pas. Il n'a pas arrete d'ecrire tant qu'il etait en URSS. Il a essaye d'exfiltrer ses ecrits et a fini, sans gaite de coeur, par s'exiler, pour pouvoir continuer a ecrire et pouvoir publier librement. Toujours en russe, meme a New-York. Il n'a jamais troque sa vodka contre du bourbon. L'exile est reste un auteur russe. Il a toujours garde la vieille valise emportee, la valise ou il a emballe ses souvenirs, son ame.

Il y a beaucoup de nostalgie dans La valise. Transcrite de manière cocasse, presque burlesque. Dovlatov est un bouffon triste. Sa nostalgie vaut la peine d'etre lue.
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Enfin ! J'ai mis la main sur cette valoche ! Et je n'ai pas été déçue. Dovlatov (1941-1990) est un conteur hors-pair, un enchanteur de première catégorie. C'était un écrivain russe dissident, ce n'était pas non plus Soljenitsyne, mais plutôt le genre turbulent, indocile et gros buveur. Il a été autorisé à quitter la mère patrie en 1978 ( c'était ça ou la prison). Aux Etats-Unis, Il a choisi de réinventer ses souvenirs sous forme d'aventures dingos, absurdes et hilarantes. j'adore ses dialogues ciselés, ses digressions formidables. Il manie le sarcasme et l'humour noir avec subtilité pour nous décrire tares et misères de la société soviétique sous Brejnev. Mais il ne juge personne. il y a beaucoup de tendresse et de pudeur derrière chaque récit.

Dovlatov ( un double de l'auteur) se prépare à quitter le pays. Comme tout émigrant il n'a droit qu'à trois valises. Il commence par protester puis s'aperçoit qu'une seule petite valise lui suffit amplement. Arrivé aux Etats-Unis, il flanque sa valoche dans le fond d'un placard et l'oublie. Quatre ans plus tard, son gamin, puni par sa femme, tombe dessus. La valise contient huit objets accumulés en trente six ans de vie. Chacun de ces objets est l'occasion de se remémorer huit moments de sa vie.

1)Les chaussettes finlandaises ****
Dovlatov étudiant fauché et amoureux est endetté. Au mont de piété, il rencontre Fred, un philosophe qui trafique des tas de trucs importés fort demandés en URSS. Il lui propose de s'associer avec lui. Deux Finlandaises vont débarquer avec la marchandise...
2) Les chaussures du maire *****
Dovlatov entre dans une brigade de tailleurs de pierre haute en couleur chargée d'exécuter un bas-relief représentant Lomonossov pour une station de métro. A l'achèvement de la statue, Ils sont invités à l'inauguration puis au banquet, plein de privilégiés du régime. Dovlatov se retrouve à la même table que le maire Alexandre Sizov.
3) Un costume croisé tout à fait convenable ****
Dovlatov ne s'habille pas bien. Alors qu'il est Journaliste, son directeur se lamente. Dovlatov devra préparer pour la fin de l'année trois articles de portée sociale qui aient une large résonance politique destinée à frapper l'opinion. A titre de récompense, la rédaction lui offrira un costume....
4) le ceinturon d'officier *****
1963. Dovlatov effectue son service militaire comme surveillant dans un camp. Il vient de finir sa formation. Il est chargé d'escorter un zek au baraquement 14. Celui-ci est devenu fou, il aboie, il lance des cocoricos, il a mordu la cuisinière. Bref Dovlatov doit l'emmener à l'asile en compagnie de Tchoubiline, un tchékiste, spécialiste de l'outillage. Il est en train de souder un ceinturon d'officier en laiton et acier très à la mode chez les tchékistes...
5) La veste de Fernand Léger ****
Dovlatov se souvient que sa famille modeste était très liée à celle de Nikolaï Tcherkassov, acteur du peuple, très populaire et bénéficiant de privilèges. Il nous raconte les vacances communes au bord du golfe de Finlande, les différences de traitement entre les deux fils...
6) La chemise en popeline ***
Dovlatov nous raconte sa rencontre avec Léna, envoyée chez lui pour l'inciter à voter. Dovlatov l'emmène au cinéma...
7) La chapka ***
Avec son cousin Boria ( voir Album de famille) autre très sérieux amateur de vodka, Dovlatov ,coiffé d'un bonnet de ski, se rend dans un hôtel où les attendent trois femmes venues tourner un documentaire. Elles le méprisent totalement. Après la réception, Rita demande à Dovlatov de l'accompagner à l'aéroport en taxi. A la station éclate une bagarre...
8) Les gants d'automobiliste *****
Dovlatov est alpagué par Shilippenbach un autre journaliste médiocre qui a décidé de tourner un film amateur. Il propose à Dovlatov qui mesure 1m94 de tenir le rôle principal, celui de Pierre le Grand, de retour dans sa ville. Dovlatov devra improviser comme dans un film d'Antonioni. L'une des scènes doit être tournée près d'un stand de bière où les clients font la queue...
Dans mon édition La Baconnière (2020) le texte est suivi d'un entretien de l'auteur paru dans la revue Slovo en 1988 qui parle de sa condition d'écrivain émigré aux États-Unis et ensuite d'une courte biographie.




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Lorsqu'il décide d'émigrer hors de Russie en 1979, Sergei Dovlatov n'emporte avec lui qu'une valise. Dans les chapitres autobiographiques au ton léger et humoristique qui composent La valise, l'auteur décide de nous raconter les anecdotes et histoires qui entourent, huit objets amenés avec lui en Amérique, allant de chaussettes finlandaises importées en contrebande à des gants d'automobiliste qui lui servirent d'accessoires pour incarner le tsar Pierre le grand dans un film expérimental amateur. le livre est initialement publié en langue russe aux États-Unis en 1986.


Il s'agit ici d'un petit livre dans lequel on plonge avec un certain plaisir. Dovlatov fait preuve de beaucoup d'autodérision, d'un style agréable et truculent et de nombreux traits d'humour et nous offre des fragments de vie de l'auteur comme autant de pièces d'un puzzle en désordre pour comprendre sa vie, son pays et son époque. On parcourt avec lui les différentes scènes qui se déroulent aussi bien pendant le service militaire de l'auteur, qu'à une réception officielle ou au sein de la rédaction du journal où il travailla et l'on sourit de l'absurdité des situations dans lesquelles l'auteur se retrouve plus ou moins malgré lui.


Dovlatov se fait incisif, souvent moqueur à l'égard de ses compatriotes de Russie soviétique. Dans le même temps, à la manière d'un auteur comme Marcel Aymé, la causticité dont il fait preuve ne se départi pas d'une certaine tendresse à l'égard des personnages secondaires dont l'auteur nous narre les faiblesses, les petites bassesses et les péripéties au sein d'un monde soviétique souvent absurde.


Toujours goguenard, jamais tragique, souvent complice avec le lecteur, au travers de ce court ouvrage, Dovaltov réussit à nous raconter par le petit bout de la lorgnette son histoire et celle de son pays. Un livre savoureux.
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Voila un témoignage drôle, attachant de ce que pouvait être la vie ( quand on la prenait du bon coté) de russes dans la période soviétique, après la deuxième guerre mondiale. Une certaine insouciance , une légèreté accentuée avantageusement par la Vodka....bue comme nous, on boit de l'eau minérale!
Belle écriture aussi!
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