Citations sur Les soupirs de Londres, tome 2 : Le sang d'Hécate (16)
De toute évidence, mon interlocuteur n'avait pas pris garde à la bibine du bistro du pendu. Bien qu'immonde, cet obscur breuvage remplissait parfaitement le rôle qu'on lui demandait d'accomplir, à savoir, faire oublier aux hommes leurs malheurs et, accessoirement, les rendre plus stupides qu'ils ne l'étaient déjà.
Certes, certains vampires transforment leur amant en immortel pour pouvoir poursuivre leur relation au sein du royaume des ténèbres. Mais les choses ne sont plus jamais les mêmes. Car, comment un homme pourrait-il accepter d'être dominé jusqu'aux tréfonds de son âme par l'être qu'il aimait jadis. Comment pourrait-il accepter de ne plus jamais pouvoir ressentir la moindre once de liberté ? Et comment continuer à aimer aussi passionnément, aussi déraisonnablement la personne qui l'a arraché aux ailes des anges ? C'est impossible. Car le lien qui unit disciple et maître est trop fort, trop bestial et trop dominateur pour laisser la moindre place à un quelconque sentiment de passion.
- Les vampires peuvent-ils se nourrir de l'énergie d'autres immortels, juste en se tenant dans le même lieu qu'eux, demanda Corwin, les paupières closes près de mes doigts.
- Oui... s'ils sont puissants. Les vampires jeunes aspirent l'énergie, la conscience, l'essence vitale, par le biais du sang. Les vampires plus âgés développent des capacités différentes, plus pratiques, et sont capables de se nourrir à distance mais...
- Mais ?
- Mais cela aurait été extrêmement impoli de la part de Surach de s'abreuver de notre énergie sur le territoire d'un autre Prince que le sien.
(…) les hommes ambitieux sont souvent dépourvus de scrupules et de sentiments.
Ce soir, j'appréciais tout particulièrement jouer avec les nerfs de notre pauvre Jerry. Comme quoi, la colère et la haine sont un engrenage sans fin.
Il existe des cas de vampires sans âme. Ils ne sont pas rares mais peu d'entre eux survivent plus de quelques jours. Les Hommes ont pris l'habitude de leur donner le nom de « goules ». Ce ne sont rien d'autre que des démons qui déambulent dans des corps pourrissants. Des monstres qui tentent de se débattrent à l'intérieur d'un corps sans âme, sans contrôle, sans force. (…)
Ce genre de créature survient quand un démon s'empare d'un corps déjà mort et non agonisant.
- Vos paroles sont dures, Stella.
- Et pourtant, j'ai raison, vous le savez.
- Certes, mais avouez que tout ceci est exceptionnel.
- Notre vie est exceptionnelle, le simple fait que nous soyons sur cette terre à nous mouvoir et à parler comme un être vivant est exceptionnel...
- Quant à vous, c'est la philosophie qui ne vous sied guère.
Je me tournais vers mon amie pour lui répondre d'un sourire. Elle arrivait toujours à placer de l'humour dans les moments critiques.
J'adoptai une attitude extrêmement déférente, sachant que je n'étais pas de taille à lutter contre le Prince. Et les hommes, de tout temps, ont toujours préféré voir les femmes soumises. L'immortalité et les siècles ne changent rien, croyez-moi !
(dixit Stella).
Le murmure de la terre reprit. Des paroles oubliées et lointaines refirent surface. La terre, la mère est triple, la terre originelle est composée de trois entités. La jeune fille représente les semailles, la femme symbolise les récoltes et la vieille représente le déclin et la mort. Telle est la nature de la terre.
- Vous êtes invivable.
- Je suis mort, ma chère.