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sur 2075 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
En cette fin du mois de juin à Marseille, il fallait se lever tôt pour profiter d'un peu de fraîcheur. Je quitte mon hôtel, situé juste en face du palais du Pharo où se tenait ma conférence et après un espresso et un pain au chocolat avalés au bar-tabac du coin, je descends vers la Plage des Catalans. A sept heures, la grille s'ouvre, je laisse ma serviette de bain et mes chaussures sur le sable et je m'avance dans l'eau calme et chaude de la Méditerranée. Difficile d'imaginer un début de journée plus tonifiant : je nage plusieurs fois la longueur de la plage, contemplant d'un côté la ville surmontée par la pointe de la Basilique Notre-Dame de la Garde et de l'autre la mer et les îles du Frioul.
La Plage des Catalans me rappelait « le Comte de Monte-Cristo » d'Alexandre de Dumas. C'est là, qu'en 1815, au coeur d'un quartier qui autrefois accueillait des immigrants venus d'Espagne, qu'Edmond Dantès, officier de marine marchande, rencontrait Mercédès, la belle catalane pour qui son coeur bat. Mais le cousin de celle-ci, Fernand Mondego, est jaloux et complote avec Danglars, comptable indélicat sur le même navire que Dantès, et le substitut de Villefort, pour lancer une fausse accusation et faire arrêter Dantès qui passera quatorze ans enfermé au Château d'If.
J'ai dévoré « le Comte de Monte-Cristo » un été alors que je devais avoir treize ans. Je l'ai repris avec le même plaisir, il y a un peu plus de douze ans : je lisais une quarantaine de pages chaque jour dans le métro et le soir, avant qu'ils n'aillent au lit, je racontais les chapitres du jour à mes enfants. Ils étaient fascinés par cette histoire qui mêle aventure, amour et vengeance.
Et donc, bien sûr, en séjour à Marseille, je ne pouvais pas manquer la visite du château d'If, cette ancienne forteresse et ensuite prison posée sur une des îles du Frioul au large De Marseille. If est difficile d'accès car l'île n'as pas de port naturel et les bateaux qui la desservent en accostant le long du rocher sont annulés en cas de vents forts. Je m'armai donc de patience pour trouver le créneau horaire favorable et faire mon pèlerinage vers cette prison qui accueillit de nombreux prisonniers réels, comme des Huguenots pendant les guerres de religion et des leaders de la Commune de Paris, mais dont le détenu le plus célèbre est un personnage de fiction. On visite même la cellule d'Edmond Dantès et un tunnel a été creusé pour communiquer, comme dans le livre, avec celle de l'abbé Faria. Dans le roman d'Alexandre Dumas, c'est cet autre prisonnier qui lui révèle l'existence d'un trésor caché sur l'île de Monte-Cristo. Lorsque le vieil abbé meurt, Dantès prend sa place dans le linceul jeté à la mer et s'échappe ainsi de l'île-prison.
Après son évasion, Dantès débarque à Paris sous les traits du richissime Comte de Monte-Cristo. Les trois marseillais qui avaient comploté pour jeter Edmond Dantès en prison tiennent maintenant le haut du pavé parisien : Danglars est devenu un richissime banquier, Villefort est procureur du Roi. Fernand Mondego, lui, est devenu le Comte de Morcerf, pair de France. Il a épousé Mercédès à qui il a fait croire que Dantès était mort. Monte-Cristo planifie sa vengeance avec patience et fait tomber de haut ceux qui autrefois l'avaient jeté aux oubliettes : Villefort sombre dans la folie, Danglars fait banqueroute et Morcerf se suicide. Mercédès, qui une des premières avait reconnu Dantès derrière l'extravagant comte venu de nulle part, quitte titre et fortune à Paris et retourne à Marseille vivre dans la vieille maison du père d'Edmond que ce dernier lui a légué. le Comte de Monte-Cristo, lui, s'en va au large, songeur, avait-il le droit, en accomplissant sa vengeance, de se faire justice lui-même et d'ainsi prendre la place de Dieu ?

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La vengeance est un plat qui se mange froid.
Dans le cas de Monte Cristo, il s'agit d'un repas Gargantuesque, aussi étoffé que peuvent être les Misérables de son contemporain Victor Hugo. Bien entendu, courant sur 1500 pages, il y a quelques longueurs, des pauses, où l'on médite le coup à venir. Et puis, sans crier gare, voilà l'action qui s'accélère et vous tient en haleine sur une cinquantaine de pages.
Le style appartient à ces feuilletonistes qui ont fait vibrer le coeur de millions de gens à une époque où ni le cinéma ni la télévision ne pouvaient distraire le peuple. Quelques phrases, comme des coups de poignard (mieux : des envois d'épée), cinglent au fil des chapitres qui s'enchaînent tel un chapelet infini.
Le parallèle avec les Misérables, paru 18 ans plus tard, est saisissant. du reste, cette guerre entre le bien et le mal tient lieu pendant tout le XIXème siècle, torturé entre République, Empire et Monarchie. Les Mystères de Paris d'Eugène Sue égaillent les pages des quotidiens à la même époque et Rocambole sera dans toutes les discussions juste avant le fleuve Hugolien. du reste, rien n'a changé au XXème avec les supers héros. Autre parallèle parlant : les surhommes avancent masqués. Edmond Dantès sera Monte Cristo tout comme Jean Valjean deviendra Monsieur Madeleine et que Peter Parker s'habillera en homme araignée ou Clark Kent enfilera son slip rouge par dessus son costume bleu tandis que Bruce Wayne vêtira cette cape de chauve souris.
Mais Dumas n'est pas Hugo et Dantès pas Valjean. Si le héros Hugolien est métamorphosé par la rencontre avec monseigneur Myriel qui le touche comme le doigt de Dieu dans sa grande mansuétude en faisant de lui un homme de bien, chez Dumas c'est la colère divine qui s'épanche.
Après la célèbre scène de la prison au château d'If qui a marqué la mémoire de millions de lecteurs, Monte Cristo récompense dans un premier temps ceux qui lui sont restés fidèles. Mais tout ceci n'a prit que le quart du roman.
Tout le reste sera cette effroyable machination qui tend à confondre et venger les mauvais hommes. Peu importe les moyens ; illimités en matière de fortune, flirtant avec la pire racaille pour l'exécution, machiavélique au dernier degré avec, parfois, son cortège de dégâts collatéraux. Monte Cristo n'est plus simplement justicier, il est devenu Dieu. Bien sûr, il reste un homme. Avec ses doutes, ses incertitudes. Il sera, souvent, à deux doigts de renoncer.
Cette vengeance est également perpétuelle : le pouvoir et l'argent roi sont déjà au coeur du sujet, rendant le propos étonnamment contemporain.
Malgré (ou grâce à) son épaisseur, j'aime bien m'immerger dans une histoire qui va m'accompagner tout un mois (je suis un lecteur lent). Cette impression de partager le quotidien de personnages familiers pendant une période qui les rend attachants plutôt qu'un roman de 200 pages qui rend le sentiment de n'avoir participé qu'à une soirée ou un déjeuner.

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J'ai adoré ce livre, je l'ai dévoré et pourtant 2 choses me déplaisent:
- la personnalité d'Edmond Dantés qui ne vit que dans le ressentiment, la vengeance, le besoin de détruire. Certes, il est un peu généreux avec très peu de personnes (l'armateur Morel par ex) mais il ne pense qu'à faire le mal en se vengeant. Il est tellement éloigné de mon héros, Jean Valjean qui lui n'est que douceur, pardon, altruisme.
- deuxième chose que je n'ai pas aimé. Si Edmond Dantés n'avait pas touché le jackpot, le gros lot en rencontrant l'abbé Faria dans sa prison du chateau d'If, jamais Edmond ne serait devenu le comte de Monte-Cristo, l'homme le plus riche du monde avec des moyens colossaux qui lui permettront de mener à bien sa vengeance.
Sans l'abbé Faria et son trésor, Edmond serait resté Edmond.
Mais c'est un livre qu'il faut absolument lire (et voir la version filmée avec Jacques Weber)
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Voilà c'est fait, j'ai fini Monte-Cristo. J'ai vécu 1400 pages, j'ai traversé Marseille, Rome, Paris, j'ai navigué, couru, dissimulé mon identité, goûté au plus cruel des poisons, vécu dans un cachot humide. J'ai été furieuse, surprise, émue aux larmes, inquiète puis soulagée, révoltée et attendrie. J'ai vu la ruine d'Edmond Dantès, le fond du gouffre puis la renaissance marine, l'émergence du comte de Monte-Cristo, la construction inflexible et brillante de l'édifice de sa vengeance qui n'épargne rien ni personne. L'argent, le pouvoir, la politique, la justice, l'amour, Dumas s'empare de tout cela avec un talent invraisemblable, moyens au service de sa narration démesurée et toujours implacable. Et quand on se dit que c'est aller trop loin, qu'on n'y croit plus à ce personnage désincarné que devient Monte-Cristo derrière tous ses travestissements, Dumas nous rend Edmond, il nous offre son humanité intacte, et son coeur généreux.

Quelques épisodes me resteront durablement en mémoire : la folie du prisonnier Dantès et l'abbé Faria qui éclaire les ténèbres du cachot, Villefort de Noirtier et son mutisme révolté (mon préféré), le duel avec Albert de Morcerf et ce qu'il dénoue dans l'intrigue. Et puis revenir enfin sur les traces du passé, parcourir les rues De Marseille, revoir le château d'If et laisser la mélancolie nous gagner lorsque Dantès disparaît à l'horizon.

Conteur hors pair, Dumas m'a transportée dans cette histoire de vengeance qui en contient mille autres, avec toute la fougue et le goût du rebondissement qui m'avait déjà enchantée dans "Les trois mousquetaires", dépeignant aussi avec talent son époque, du retour de Napoléon de l'île d'Elbe à la Monarchie de Juillet.

Sans surprise, j'ai adoré ce roman dès les premières pages, sublimées par la lecture magistrale en audiobook d'Eric Herson-Macarel chez Sixtrid Éditions.

Un voyage littéraire au long cours, une lecture jubilatoire pour un grand classique du XIXè siècle!

Si ce n'est déjà fait, lisez Monte-Cristo !

"Toute la sagesse humaine sera dans ces deux mots : attendre et espérer "
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Est-il besoin d'ajouter une nouvelle critique pour cet oeuvre mondialement connue ?
Oeuvre monstrueuse de part sa renommée , sa qualité .. et sa longueur. Plus de 1200 pages en édition de poche : qui de nos jours oserait ?
Alors biensûr il faut y consacrer du temps mais quel plaisir de (re)découvrir ce roman majeur ! Aventure, intrigue, style : tout est réuni.
Inutile de résumer l'histoire que tout le monde connait dans ses grandes lignes. Pourtant quelle richesse dans le roman comparé à toutes les adaptations !
Alors même si vous pensez connaitre , lisez l'original !!!
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J'adore cette histoire donc je voulais lire cette version pour enfant. J'aime beaucoup encore une fois l'adaptation du texte et les dessins.
On y retrouve donc Edmond Dantes accusé et emprisonné à tort , sa rencontre avec l'abbé Faria, son évasion, et sa soudaine richesse. Tout ce qui va lui permettre de se venger des trois hommes qui l'ont accusé à tort.
Je trouve cette version très bien pour les enfants, l'original est truculent mais plus pour les adultes (technique d'empoisonement, critique de la nourriture italienne de l'epoque). L'histoire est bien respectée, la maxime de fin résumé est le seul petit bémol. Dans l'original c'est : " la sagesse humaine réside en deux mots "attendre et esperer". "
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Impardonnable. Je ne découvre Monte Cristo qu'à mon âge...avancé! Quel trésor!
Je suis enchanté, ravi de cette lecture. Riche d'enseignements.
D'ailleurs pourquoi n'est-il pas enseigné au collège ou au lycée?
C'est à proprement parler un chef d'oeuvre.

La qualité du texte dépasse tout ce que j'ai pu lire à ce jour. On pardonnera quelques incohérences sans importance de date, de noms d'ailleurs corrigées dans l'édition Bouquins.

Les descriptions (personnages, lieux…) sont admirables de précision et de concision:
Ainsi la description de l'abbé Faria:
« C'était un personnage de petite taille, aux cheveux blanchis par la peine plutôt que par l'âge… la maigreur de son visage creusé par des rides profondes, la ligne hardie de ses traits caractéristiques, révélaient un homme plus habitué à exercer ses facultés morales que ses forces physiques ». Je vois le vieillard affaibli mais pétillant d'esprit et d'intelligence.

Ou encore l'éblouissement qui envahit Dantès à son premier séjour sur l'île de Monte Cristo:
« Le soleil était arrivé au tiers de sa course à peu près, et ses rayons de mai donnaient, chauds et vivifiants, sur ces rochers, qui eux-mêmes semblaient sensibles à la chaleur; des milliers de cigales, invisibles dans les bruyères, faisaient entendre leur murmure monotone et continu; les feuilles de myrtes et des oliviers s'agitaient frissonnantes, et rendaient un bruit presque métallique; à chaque pas que faisait Edmond sur le granit échauffé, il faisait fuir des lézards qui semblaient des émeraudes… ». J'entends et je vois la garrigue. Pour qui randonne en Provence ou en Corse, nul besoin d'épiloguer.

La qualité des dialogues est incomparable: dynamisme, réflexion profonde, répartie en sont les ingrédients.
Ainsi l'abbé Faria se proposant d'éduquer Edmond Dantès, de lui inculquer une solide culture générale:
«-Deux ans! Dit Dantès, vous croyez que je pourrais apprendre toutes ces choses en deux ans?
-Dans leur application, non; dans leurs principes, oui: apprendre n'est pas savoir; il y a les sachants et les savants: c'est la mémoire qui fait les uns, c'est la philosophie qui fait les autres.»

Ou encore la répartie du comte de Monte Cristo lors de l'entrevue avec Villefort, venu le remercier d'avoir sauvé sa femme et son fils: « et ce bonheur qui m'arrive vous dispensait, monsieur, de remplir un devoir dont l'exécution m'honore sans doute, car je sais que monsieur de Villefort ne prodigue pas la faveur qu'il me fait, mais qui, si précieuse qu'elle soit cependant, ne vaut pas la satisfaction intérieure ».

Enfin, bien évidemment que dire d'autre de la qualité de l'intrigue si ce n'est que le lecteur est emporté dans un tourbillon d'actions et de situations haletantes.
On suit avec avidité les tourments de Dantès, sa volonté de vengeance et son opiniâtreté dans son exécution.
Les rebondissements sont multiples, les destins croisés, les fortunes diverses, les amours contrariés.
Les feuilletons s'égrènent à grande vitesse, le suspense à son comble.
On notera des chapitres clés comme « Le trésor », « La promesse » (entre Valentine et Morrel) ou encore le point de bascule dans le mental de Dantès avec « La rencontre », sa rencontre décisive avec Mercédès.

Dumas a écrit: Monte Cristo n'est pas un roman, mais une histoire dont j'ai trouvé la source aux archives de la police. Il a su tirer de se matériau quelque chose de palpitant.

Les éléments de morale sont omniprésents et deux camps s'affrontent: les nobles de coeur et les opportunistes.
Les premiers d'entre eux, Morcef, Villefort et Danglars, fondent leur existence et leur position sur la lâcheté, la vantardise, l'égoïsme, l'opportunisme et la cupidité; le profit et la position sociale au détriment de toute morale.

Les éléments du capitalisme contemporain sont jetés: ainsi les trois ordres de fortune énoncés par le comte de Monte Cristo résonnent aujourd'hui parfaitement:
-Premier ordre: revenus du sol (les terres, les mines…)
-Deuxième ordre: les entreprises, les industries
-Troisième ordre: les revenus financiers
Une seule différence aujourd'hui: les troisièmes sont devenus les premiers…

C'est un roman fantastique, incomparable.
Je serai indubitablement amené à le relire tant les idées et les réflexions sur la nature humaine sont intemporelles.

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Que dire qui n'a pas été dit sur un roman tel que celui-ci ? Rien, aussi ma chronique sera-t-elle relativement courte et uniquement personnelle.
Ce roman, qui m'a occupée la majeure partie du mois d'août, s'est révélé prenant de la première à la dernière page, en passant par diverses tonalités.

Dans les premiers chapitres, je me suis réjouie de ce portrait éminemment sympathique d'Edmond Dantès : celui d'un jeune marin honnête, jovial, déterminé, aimé de ses hommes, empli de l'amour pour son vieux père et pour Mercédès. Suite à cette rencontre, on ne peut que l'apprécier, être émue de ses malheurs injustes, de son incompréhension, de sa naïveté parfois, et se prendre d'intérêt pour son sort.
Lors du passage de son incarcération, nous ressentons aussi bien son hébétude, sa révolte, sa résignation, ses pensées de mort, et puis cette rencontre qui changera tout, cette lumière dans l'obscurité des geôles du terrible château d'If. Cette partie est celle dont j'avais le plus de souvenir de ma première lecture.
Puis arrive le temps de la vengeance quand, quelques années après, notre regard se tourne vers ceux dont la mauvaise action a été récompensée par les succès militaires, politiques et financiers. Certes, l'identité de Simbad le marin ou de l'abbé Busoni ne nous trompe pas, pas davantage que celle du mystérieux comte de Monte-Cristo, mais son arrivée près des anciens persécuteurs montés en grade n'en est pas moins plaisante. J'ai suivi avec intérêt le comte tisser sa toile, tendre une main a priori bienveillante vers telle ou telle personne, tirer les premiers fils. On se prend à chercher le but de chaque action, les conséquences de tel geste ou de telle parole, tandis que des révélations, des coïncidences qui n'en sont évidemment pas, se dévoilent au fil des chapitres et tiennent en haleine faisant rebondir le récit quand il pourrait s'essouffler. La machinerie millimétrée et sans pitié est étrangement réjouissante, avouons-le.
Et puis, vient ce temps aussi grandiloquent que sublime des révélations de son identité véritable. Ce temps, terrible pour ses ennemis, qui signe le retour d'Edmond et, avec lui, le retour des doutes et des souffrances, le retour de l'homme derrière le vengeur omnipotent. Des pages parfois purement enthousiasmantes, parfois bouleversantes.

Je retiendrais en plus :
- le cadre de la première partie qui se déroule pendant la Restauration et les Cent jours – période si superficiellement étudiée en études secondaires, mais que je commence à mieux connaître grâce aux romans –, période marquée par une forte instabilité gouvernementale qui perdra Edmond Dantès pris dans le jeu des loyautés à l'empereur ou au roi ;
- la plume de Dumas, à la fois fine (en dépit de quelques redondances) et traversée de traits d'humour et de bons mots, traçant des portraits vivants en peu de lignes ;
- la fascinante figure du comte, impénétrable la plupart du temps, émouvant lorsqu'une émotion transparaît, prisonnier de sa vengeance qui induit une solitude quasi absolue, dont la main bouge ses pions humains comme d'autres mains ont un jour disposé de lui. de la sympathie que l'on a pour Edmond Dantès et au-delà de l'aspect réjouissant de ses plans machiavéliques, on en vient à s'interroger sur la mégalomanie du comte qui se présente comme la main de Dieu pour punir les méchants. (Certes, je dois bien avouer que je trouve sa fortune absolument délirante un peu trop facile, mais c'est un défaut que je peux pardonner à Dumas, tout comme les personnages d'Ali ou Haydée… avec qui Dantès entretient des relations des plus périmées…)

Ainsi, dans l'action comme dans l'introspection, dans l'aventure – avec des lieux emblématiques, d'un cachot obscur à des récits d'Orient en passant par une île déserte et un repaire de bandits romains – comme dans les émotions (celles éprouvées par les personnages comme par nous), Dumas – avec la collaboration d'Auguste Maquet – tisse un roman toujours passionnant et profondément enthousiasmant, porté par des scènes absolument grandioses.
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Deux grandes parties structurent l'intrigue, fondées sur cette métamorphose, donnant au lecteur l'impression d'y avoir affaire à deux personnages principaux différents, quand il s'agit du même individu.

Dans la première, nous suivons donc Edmond Dantès, jeune et modeste pêcheur à l'avenir prometteur. On le cueille au début du récit de retour d'une campagne de pêche à bord du Pharaon, où il officiait comme second d'un capitaine décédé en cours de route. Edmond, responsable et compétent malgré sa jeunesse, a admirablement pris en main le commandement du bateau, ce dont se félicite l'armateur Morrel, qui lui laisse entendre, à peine débarqué à Marseille, que sa promotion au rang de capitaine est quasiment acquise. L'avenir se présente pour notre héros sous les meilleurs auspices : en plus de cette belle évolution professionnelle, il doit épouser sous peu Mercédès, belle brune à la beauté sauvage qu'il aime passionnément, et réciproquement. Mais ce bonheur n'est pas du goût de certains dont il contrecarre les propres projets, notamment ceux de Danglars, trésorier du Pharaon, ou de Fernand Mandego, épris de Mercédès qui le considère comme un frère. Les machinations de ces deux envieux viennent s'imbriquer aux intérêts personnels du procureur de Marseille -Villefort-, qui mène rondement l'affaire, et Edmond, accusé d'être un agent bonapartiste, est arrêté le jour même de ses noces, et se retrouve presque illico enfermé dans un cachot du château d'If où il passera quatorze ans.

Précisons que nous sommes en 1815. Napoléon est alors en exil à l'île d'Elbe, les autorités en place craignant qu'avec l'aide de ses partisans, il ne fomente son retour. A raison, comme le démontreront les Cent Jours. Néanmoins la fugace reconquête du pouvoir par l'Empereur ne change pas le sort d'Edmond, dont Villefort a fait en sorte qu'il soit définitivement oublié du reste du monde.

C'est une première partie très sombre, où nous sont dépeintes toutes les étapes de l'état d'esprit du prisonnier, de l'espoir et de l'orgueil que lui confère la conviction de son innocence, au doute puis à l'infinie détresse menant à la tentation de la mort.

Je vous laisse découvrir comment, depuis son cachot, Edmond se cultive, apprenant les sciences, l'histoire et plusieurs langues étrangères, ainsi que les détails de son épique évasion et de l'origine de l'immense fortune dont il devient subitement propriétaire.

Dantès, mort pour le monde, devient Monte-Cristo, comte autoproclamé d'un ilot désert de la Méditerranée.

Lorsqu'il fait son apparition dans la société des hommes, c'est sous les apparences d'un personnage aussi fascinant que mystérieux, aussi envoûtant qu'inquiétant. le luxe inouï dans lequel vit l'homme, qui prétend posséder des esclaves -un serviteur noir et muet et une jeune femme grecque d'une extraordinaire beauté-, l'étendue des pouvoirs -rien ne lui semble impossible- que lui confèrent à la fois sa fortune et l'autorité naturelle qui émane de son assurance courtoise et de sa grande intelligence, intriguent au plus haut point.

Dans la seconde partie, Alexandre Dumas déploie avec minutie les mécanismes puis les conséquences de l'ample entreprise de vengeance ourdie par le Comte. Patiemment, méthodiquement, il a tissé un réseau d'indéfectibles fidélités -et qu'elles soient parfois celles de brigands, de contrebandiers ou d'assassins lui importe peu-, traqué les plus intimes secrets de ses ennemis, élaboré un plan aussi machiavélique que complexe, consistant à s'appuyer sur les points faibles et jusqu'à présent soigneusement dissimulés de ses cibles et à se servir des ressentiments et des haines que leurs actes n'ont manqué de susciter. Assister aux manoeuvres du Comte introduit dans la bonne société parisienne où les responsables de son malheur -Villefort, Danglars et Fernand- ont acquis richesse et pouvoir, le jeune Mandego ayant de plus finir par épouser Mercédès qui lui a donné un fils dorénavant adulte, procure une jubilation d'autant plus grande que le regard porté sur ce milieu et ceux qui y évoluent est féroce. Car Alexandre Dumas étrille au passage l'hypocrisie, la mesquinerie, et la cruauté d'une société opportuniste obsédée par le maintien de sa position sociale et de la respectabilité ou des pouvoirs qu'elle lui octroie, dont les différents rouages -armée, justice, finances- sont soumis à la petitesse et à l'égoïsme de ceux qui les font tourner.
Le Comte de Monte-Cristo, non seulement richissime mais aussi charismatique, raffiné et immensément mystérieux, y devient une sorte de légende, tout en affichant en toutes occasions, malgré sa vigueur et son audace, une humilité et une courtoisie qui ne font qu'exhausser l'admiration et la sympathie qu'il provoque généralement chez ses interlocuteurs. Et en même temps, l'ironie qu'il manie avec suffisamment de subtilité pour qu'on ne sache jamais si elle est volontaire, provoque parfois un certain malaise. Sa connaissance des travers et des aspects les plus hermétiques du passé de ses victimes -dont son extraordinaire acuité permet par ailleurs de prévoir les réactions-, associée à son champ d'action apparemment illimité -tout étant à vendre si on y met le prix-, en font un personnage omnipotent, omniscient, et pour tout dire vaguement effrayant.

L'auteur, par un choix qui se révèle habile et pertinent, place le lecteur vis-à-vis de la personnalité du Comte sur un pied d'égalité avec ceux qu'il rencontre, en occultant le détail de ses émotions et de ses pensées, ne nous livrant que la description de ses expressions –ce qui n'était pas le cas avec Edmond Dantès. Eclairé en revanche quant aux antécédents du héros, lui seul comprend le sens des allusions à un teint parfois un peu plus pâle, ou à un sourire imperceptiblement inquiétant.

L'implacable machinerie mise en branle fonctionne, et à merveille, la chute est implacable, et adaptée à chacun. Au-delà du scandale dont elle entache définitivement non seulement les trois cibles du Comte mais aussi leur famille, ces dernières perdent, en plus de leurs proches, ce qui leur est le plus cher : Fernand son honneur, Villefort sa position, Danglars son argent.

Mais comme toute vengeance, elle finit par occasionner des dommages collatéraux… Jusqu'alors porté par la conviction qu'il n'était que le bras d'une Providence appelant à un juste châtiment, se réclamant de Dieu pour justifier que les fautes des pères retombent sur leurs enfants, le Comte de Monte-Cristo est finalement amené à remettre en cause la légitimité et l'équité de son oeuvre vengeresse.

Succession d'épisodes riches de rebondissements, peuplés de personnages peut-être trop multiples pour se révéler tous aussi consistants -ce qui n'est à vrai dire pas très gênant-, le Comte de Monte-Cristo est un roman profus, que je qualifierais avant tout "d'aventures", même si l'on peut aussi y voir une peinture sociale de son époque, une réflexion philosophique sur l'utilité de la vengeance… et sans doute tout un tas d'autres aspects, que je laisse le soin aux spécialistes de lister.
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Indémodable classique, le style et le phrasé font qu'on le relit toujours. Même si l'histoire date un peu, car trop vu et revu à la télé, dans de moyenne adaptations. Il est vrai que le livre est, comme toujours, beaucoup mieux ! je conseille ce livre à tous. Surtout aux aventuriers dans l'âme.
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