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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Annie Ernaux fait partie de ces auteures qu'on m'a conseillées mille fois, et dont le nom revient très souvent à mes oreilles - notamment dans les milieux féministes. Ayant enfin décidé de me lancer, j'ai jeté mon dévolu sur L'événement, et ce n'était pas un hasard puisque j'en ai toujours entendu beaucoup de bien et que le thème me parlait : l'avortement.

Plus précisément, l'avortement avant qu'il ne devienne légal. L'auteure, plus de trente ans après les faits, couche enfin sur papier ce qui lui est arrivé et qui la hante depuis. On a donc affaire à un récit autobiographique, court et percutant, que personnellement j'ai lu en une journée sans pouvoir lever les yeux !

Étudiante, elle se retrouve complètement démunie face à cette grossesse non désirée : le géniteur habite loin et semble peu se préoccuper de l'affaire, impossible d'en parler à ses parents, et elle risque la prison pour pouvoir avorter.

C'est alors un parcours de la combattante qui se présente, terriblement long, fait de bouche à oreille et d'adresses illégales qu'on se refile sous le manteau. On vit cette lenteur avec elle, page après page, on suffoque presque - même en sachant par avance qu'elle parvient à ses fins !

Ce témoignage est précieux, comme tous ceux des personnes de cette époque. Il permet de réaliser à quel point l'avortement est un droit fragile, pour lequel il a fallu (et il faut encore) se battre. Pour échapper aux sondes, à l'eau de Javel et aux aiguilles à tricoter. Pour avoir le choix de sa (non-)fécondité et ne plus en mourir.

Un récit à mettre entre tous les mains, pour continuer la bataille.
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Ce livre d'un réalisme poignant commence à l'hôpital Lariboisière où l'auteure qui s'exprime toujours à la première personne du singulier, se rend pour connaître le résultat d'un dépistage du Sida. le sourire de la docteure qui l'accueille, la rassure aussitôt mais ce qu'elle vient de vivre lui remet en mémoire « l'attente du verdict du docteur N., en 1963, dans la même horreur et la même incrédulité. Ma vie se situe donc entre la méthode Ogino et le préservatif à un franc dans les distributeurs. »
Commence alors le récit de son avortement déjà évoqué dans Les Armoires vides : les règles qui n'arrivent pas, le docteur N. qui lui annonce qu'elle est enceinte et sa décision de ne pas garder l'enfant ce dont elle informe le géniteur. Elle rappelle la loi en vigueur à l'époque, cette clandestinité obligatoire et son désir immense d'écrire ce qu'elle a vécu : « ce qui poussait en moi c'était, d'une certaine manière, l'échec social. »
Elle cherche, se renseigne, parle de la chanson de Soeur Sourire et de sa fin tragique, de ces médecins qui ont trop peur de se mouiller. Elle continue ses études mais « avec mon corps embourbé dans la nausée », elle n'arrive plus à travailler. À chaque étape, elle note ses commentaires entre parenthèses, disant ses difficultés à écrire, à raconter cela.
Malgré tout, avec son habituelle précision, elle décrit tout son cheminement, le voyage de Rouen à Paris, le mercredi 15 janvier, en train, chez Mme P.-R., la faiseuse d'anges, comme on nommait ces femmes obligées d'accomplir leur tâche dans des conditions précaires : « Il y eut une douleur atroce. Elle disait : « arrêtez de crier, mon petit » et « il faut bien que je fasse mon travail »… L'avorteuse la raccompagne jusqu'à la gare la plus proche, sollicitude ou précaution ? Annie Ernaux n'occulte rien et fait partager ses doutes, ses souffrances, ses douleurs insupportables et l'expulsion du foetus : « la vie et la mort en même temps. Une scène de sacrifice » Un amie l'aide heureusement mais il faut partir à l'hôpital : « J'avais un sexe exhibé, écartelé, un ventre raclé, ouvert à l'extérieur. Un corps semblable à celui de ma mère. »
Finalement fière d'être allée jusqu'au bout, elle se repose à Y. sans rien dire à ses parents puis reprend à Rouen son mémoire sur La femme dans le surréalisme : « J'étais ivre d'une intelligence sans mots. » Un peu plus tard, elle entre dans une église « pour dire à un prêtre que j'avais avorté. Je me suis rendu compte de mon erreur. Je me sentais dans la lumière et pour lui j'étais dans le crime. En sortant, j'ai su que le temps de la religion était fini pour moi. »
Enfin, elle conclut L'Événement en écrivant : « les choses me sont arrivées pour que j'en rende compte. Et le véritable but de ma vie est peut-être seulement celui-ci : que mon corps, mes sensations et mes pensées deviennent de l'écriture, c'est-à-dire quelque chose d'intelligible et de général, mon existence complètement dissoute dans la tête et la vie des autres. »
Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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Dans ce roman autobiographique, l'auteure revient sur un élément de son passé d'étudiante qu'elle avait jusqu'ici laissé sous silence.
Annie Ernaux a fait une grossesse indésirée, la seule option qui lui semblait acceptable et elle en explique les tenants et les aboutissants, était d'avorter. Cependant, en 1963, la pilule contraceptive n'était pas encore légalisée et encore moins l'Interruption Volontaire de Grossesse. Abandonnée par les médecins, désespérée, nous la suivons dans son parcours difficile et dangereux.

Ce roman est un témoignage qui nous plonge dans une autre époque, lorsque les femmes n'avaient pas le choix de disposer de leur propre corps et des risques qu'elles encouraient à avorter par leurs propres moyens : des risques mortels et à l'encontre à la loi.
Un récit saisissant.
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Ce témoignage décrit l'avortement vécu par l'auteur en 1964 – cinq ans avant la légalisation de la pilule et onze ans avant celle de l'IVG.

C'est le combat d'une femme pour avorter, en ces temps où l'avortement est illégal et où il est difficile d'obtenir de l'aide... si on en parle aux filles, on heurte leurs valeurs, si on en parle aux garçons, on passe pour une fille "comme ça", libre, avec qui on peut se permettre d'aller plus loin...

Annie Ernaux décrit de manière très réelle ce qu'elle a vécu et comment ça se passe. Elle décrit l'horreur d'un tel acte lorsque l'on est pas accompagné d'une équipe médicale et des risques que l'on peut encourir.

Avec un tel témoignage, on se rend compte de l'horreur, de la douleur qu'on traversé énormément de femmes et de l'importance de la loi Veil.

Ce témoignage nous permet de rentrer dans l'esprit et les pensées d'une jeune femme de 23 ans, de comprendre son choix, de suivre son combat pour se faire avorter, d'être terrifié face à la réaction de nombreuses personnes et face à leurs comportements.

Ce qui m'a choqué le plus, c'est le comportement d'un médecin, qui se rend compte ; après avoir été ignoble avec la jeune fille de 23 ans, qu'il voyait comme une ouvrière de basse condition, à qui ce genre de chose arrive tout le temps ; qu'en réalité, elle est comme lui, qu'elle est étudiante, dans une université...sa classe sociale est donc plus élevée. Et du coup, il aurait dû la traiter avec plus de respect...

Ce livre doit être lu par le plus nombreux d'entre nous.
Lien : http://lafeeculturelle.over-..
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Je déteste cette histoire !

Je déteste le regard méprisant du médecin (et des autres…)

Je déteste cet « ami » qui se croit tout permis, parce que si une fille est tombée enceinte, c'est qu'elle est trop libre…

Je déteste le sort de cette étudiante, sa solitude dans une impasse, sa vie entre les mains d'une faiseuse d'anges.

Je déteste tout ça, et je remercie celles et ceux qui ont fait en sorte que moi, ma soeur, ma fille, ne vivrons pas « L'événement ».

Un témoignage bouleversant, je déteste que ce soit si vrai et qu'on ne puisse l'oublier une fois le livre refermé.
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C'est le long parcours d'une jeune étudiante qui, enceinte, souhaite avorter. Si aujourd'hui, ce choix nous paraît possible, hier, en 1963, il n'en était pas ainsi. C'est ce chemin que nous raconte Annie Ernaux.
J'ai toujours apprécié l'écriture intime d'Annie Ernaux chaque fois que j'ai lu un de ses romans. Cette fois-ci comme les autres, j'ai été touchée par son histoire.
Lien : http://lejournaldechrys.blog..
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Par curiosité, j'ai lu "L'Événement" d'Annie Ernaux. Et j'en sors bouleversée. C'est un exemple parfait d'une force de l'écriture, d'une transmission par l'écriture d'une réalité et d'insupportables émotions! Et comment elle réussi à faire ça! En gardant cette distance, avec ce recul qu'elle sait très bien prendre, ses mots prennent toute leur valeur. Sans doute, "L'Événement" est le récit que j'ai le plus apprécié. Pendant quelques heures, j'étais elle à la recherche de cette "faiseuse d'ange", puis avec une sonde dans l'utérus, puis avec un gamin entre les jambes, puis avec un souvenir insoutenable. C'est, pour tout dire, une des rares fois qu'un livre me laisse comme ça, aussi "abasourdie" que la fille qui en 1964 venait de donner naissance à un mort dans la plus totale illégalité, déconsidérée, seule parce qu'une pauvre loi condamnait la femme à materner, qu'elle le veuille ou non. Malgré l'horreur, jamais elle ne pleure sur son sort, elle constate, c'est tout, et réfléchit, à ce qui lui est arrivé, aux réactions de ceux qu'elle a croisé durant cette période, à la société, et à l'oeuvre qu'elle est entrain d'écrire.
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Livre découvert par hasard sur les étagères d'une maison de la presse, je l'ai acheté en ne sachant pas trop à quoi m'attendre... Un récit cru et très douloureux, un concentré d'émotions... Ce livre m'a bouleversée !
L'auteur raconte, sans détour, l'histoire de son avortement à un moment où c'était encore un délit, la loi relative à l'IVG n'ayant été votée qu'une longue décennie plus tard...
A réserver néanmoins aux personnes qui ont le coeur bien accroché, certains passages sont très très difficiles...
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Au mois d'octobre 1963, Annie Ernaux, 23 ans, fait ses études à Rouen et tombe enceinte. Ne souhaitant pas garder l'enfant, elle raconte, dans L'événement publié en 2000 chez Gallimard, son parcours du combattant pour se faire avorter.

L'événement est un livre choc, à déconseiller aux personnes sensibles, car Annie Ernaux raconte sans détour la scène sanglante et douloureuse de son avortement. À cette époque les avortements sont illégaux, les pratiquants (médecins et infirmiers) et les femmes qui ont avorté sont punis de prison et d'amende. Annie Ernaux part donc à la recherche d'un médecin ou sage-femme qui accepterait de pratiquer cet acte illégal. Elle s'adresse à des amis et des connaissances dont la conduite à son égard change du tout au tout en apprenant sa volonté. Les hommes développent une fascination certaine pour cette jeune femme qui souhaitent avorter, une fille "passée de la catégorie des filles dont on ne sait si elles acceptent de coucher à celle des filles qui, de façon indubitable, ont déjà couché" . Certains, notamment les médecins, cherchent à l'en dissuader. Mais, Annie Ernaux ne souhaite pas garder son enfant et est contrainte à avorter clandestinement.

Plus qu'un livre choc sur l'avortement, L'événement est aussi une réflexion d'Annie Ernaux sur son acte d'écriture. L'écrivain a ressenti le besoin d'accoucher de cet événement par écrit, comme elle a accouché d'un foetus : "Il y a une semaine que j'ai commencé ce récit, sans aucune certitude de le poursuivre. Je voulais seulement vérifier mon désir d'écrire là-dessus. Un désir qui me traversait continuellement à chaque fois que j'étais en train d'écrire le livre auquel je travaille depuis deux ans. Je résistais sans pouvoir m'empêcher d'y penser. M'y abandonner me semblait effrayant. Mais je me disais aussi que je pourrais mourir sans avoir rien fait de cet événement. S'il y avait une faute, c'était celle-là."

Enfin, L'événement nous amène aussi à une réflexion sur la condition des femmes à cette époque, mais aussi à la notre. En établissant un parallèle entre son rendez-vous chez le médecin qui lui confirme qu'elle est enceinte (1963) et son rendez-vous chez le médecin qui lui remet les résultats de son dépistage du sida (au moment où elle écrit), elle met l'accent sur le fait que les femmes, notamment celles qui ont une "sexualité libérée", sont passées de la peur d'être enceinte à la peur d'être contaminée.

L'événement est un récit autobiographique que j'ai beaucoup aimé et qui me donne envie de continuer ma découverte d'Annie Ernaux, après avoir lu cet été Les Années.
Lien : http://leschroniquesassidues..
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