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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
« Et le véritable but de ma vie est peut-être seulement celui-ci : que mon corps, mes sensations et mes pensées deviennent de l'écriture, c'est-à-dire quelque chose d'intelligible et de général, mon existence complètement dissoute dans la tête et la vie des autres. »

Dans L'événement, Annie Ernaux donne une des clés de ce qui guide son oeuvre. Une affirmation qui confortera ses détracteurs dans ce qu'ils lui reprochent, mais un fil conducteur assumé qui permit à tant de lecteurs et de s'identifier à l'auteure nobelisée.

Une affirmation qui la conduit à revenir des années plus tard, la tête froide et tournée vers l'analyse factuelle et non l'émotion, sur les étapes de sa vie qui l'ont construite. Comme cet avortement dans les années 60, dont les marques refont surface à l'occasion d'un test de séropositivité dans les années 80.

« Ma vie se situe donc entre la méthode Ogino et le préservatif à un franc dans les distributeurs. C'est une bonne façon de la mesurer, plus sûre que d'autres, même. »

Nulle envie de détailler ce livre (et de risquer de frôler le sentiment d'illégitimité masculine du sujet) et ce parcours insupportable d'une combattante d'une autre époque, pourtant si proche de la nôtre. Juste livrer quelques réflexions, à la volée.

Sur les portraits de ces gens qui traversent le livre - le docteur N., Soeur sourire, L.B., Mme P-. R. – soutiens ou indifférents, mais si bien cernés en si peu de mots.

Sur la posture distanciée délibérément choisie par l'auteure, pour éviter à tout prix le piège du pathos et de l'empathie du lecteur. Cette volonté de se conformer coûte que coûte au strict récit reconstitué, de « résister au lyrisme de la colère ou de la douleur. »

Sur le lien avec le reste de l'oeuvre, les origines sociales auxquelles on n'échappe décidément pas jusque dans les événements intimes de la vie et l'écriture qui « venge la race ».

« Ni le bac ni la licence de lettres n'avaient réussi à détourner la fatalité de la transmission d'une pauvreté dont la fille enceinte était, au même titre que l'alcoolique, l'emblème. J'étais rattrapée par le cul et ce qui poussait en moi c'était, d'une certaine manière, l'échec social. »

Sur la légitimité arrogée enfin, d'écrire sur tout et d'écrire sur soi pour parler au monde, quoi qu'en pense autrui.

« D'avoir vécu une chose, quelle qu'elle soit, donne le droit imprescriptible de l'écrire. Il n'y a pas de vérité inférieure. Et si je ne vais pas au bout de la relation de cette expérience, je contribue à obscurcir la réalité des femmes et je me range du côté de la domination masculine du monde. »
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Ce roman d'Annie Ernaux est marquant. Il plonge le lecteur dans un autre monde. A cette époque, le droit à l'avortement n'existe pas encore. Chaque femme fait alors comme elle peut, même si la solution choisie peut être dangereuse pour sa propre vie. En ayant recours aux faiseuses d'anges, les femmes connaissent parfois les risques mais il n'existe pas d'autre solution, elles font le seul choix possible. J'ai apprécié que l'autrice nous livre cette histoire personnelle avec toute son intelligence et tout son coeur. Cela met en avant l'histoire de la condition des femmes. A lire.
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Le 6 Octobre dernier, le prix Nobel de littérature a été décerné à Annie Ernaux, et j'ai eu envie de découvrir les écrits de cette femme dont j'ai tant entendu parlé pendant mes études. le 24 Novembre dernier, un texte visant à inscrire le droit à l'avortement dans la constitution française à été validé par l'assemblée nationale, et j'ai eu envie de lire sur ce sujet si important. J'ai donc fait d'une pierre deux coups en lisant L'événement, et j'ai adoré découvrir l'autrice à travers le récit très personnel de cette période de sa vie.

L'événement est un roman autobiographique écrit par Annie Ernaux en 1999, elle y raconte l'avortement qu'elle a subit 35 ans plus tôt, à l'âge de 23 ans. Dès les premières lignes, j'ai été prise dans cette histoire terriblement dure et pourtant si bien racontée. En à peine 130 pages, elle retrace son parcours tant dans les faits : la découverte de sa grossesse, la recherche d'un médecin, son avortement, et l'après. Que dans son ressenti : le dégoût, la solitude, la douleur, le jugement. Elle raconte ces trois mois durant sa vie d'étudiante qui ont marqué le reste de son existence, en nous faisant ressentir le plus fidèlement possible tout ce par quoi elle est passée, pour que même ceux qui ne l'ont pas vécu et ne le vivront jamais puissent la comprendre. Ce qui est sûr, c'est que je ne m'arrêterai pas à cette première impression de l'autrice.

A travers ce roman j'ai apprécié découvrir l'autrice elle-même, sa vision de la condition de la femme ou de sa propre sexualité, qu'elle oppose ouvertement à celle que pouvait avoir la société de l'époque en se revendiquant plus libre, en reniant les tabous. J'ai également aimé voir sa façon de s'émanciper de sa famille, de la classe sociale à laquelle elle a toujours appartenu en affirmant des idées plus modernes, moins conservatrices, et surtout en se détachant de l'influence qu'aurait pu avoir sa mère sur sa décision d'avorter. Mais ce qui m'a le plus marqué, c'est sa façon de s'exprimer sur cette période de sa vie. Sur cette grossesse non désirée que l'autrice ne nomme jamais que comme "ça", cet avortement clandestin qu'elle était décidée à subir dès qu'elle a appris qu'elle était enceinte, quoi qu'il en coûte et peu importe ce que pouvaient en dire ses proches, les médecins, ou la société. La façon dont elle se détache de cet "événement" sans y être indifférente pour autant m'a beaucoup marquée également, en nommant son avortement ainsi, Annie Ernaux en fait à la fois quelque chose d'anecdotique en le gardant à distance. Mais le mot "événement" en fait aussi quelque chose d'important, de marquant dans sa vie après lequel elle ne sera plus la même, et on le ressent parfaitement à travers ses mots. Ce livre est avant tout empreint du courage dont elle a dû faire preuve, et il a beau être très court, il n'en n'est pas moins puissant.

L'événement est un roman court certes, mais Annie Ernaux a rendu cet écrit impactant en écrivant ce moment de sa vie de manière documentée, claire et simple. Ainsi, elle rend le sujet accessible, elle donne l'opportunité à ceux qui n'ont pas vécu ou ne vivront jamais d'avortement de ressentir ce qu'elle a pu vivre, en tant que lecteur on vit cet événement avec elle du début à la fin. La simplicité et l'accessibilité de sa plume sont selon moi ce qui fait toute la force de ce roman, qui j'en suis sûre, ne vous laissera pas indifférent.

Si vous ne connaissez pas Annie Ernaux ou que vous n'avez pas encore lu L'événement, je ne peux que vous en conseiller la lecture, c'est un magnifique récit sur un sujet important, qui mérite d'être découvert par le plus grand nombre. En ce qui me concerne, il me tarde de découvrir cette autrice à travers d'autres de ses oeuvres !
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Lors d'une hospitalisation, ma compagne de chambre (mineure) est venue pour un avortement. Je me souviens de la légèreté avec laquelle elle a subi cet IVG, c'est du moins ce que j'ai ressenti. Je venais d'apprendre que je ne pourrais certainement pas avoir d'enfant. Lors d'une autre hospitalisation, une jeune femme dans la trentaine n'a pas voulu retirer son vernis avant l'IVG : « Je viens de me faire une manucure ».

En lisant ce livre, j'ai revu ces souvenirs très nettement et j'ai pris en pleine figure les souffrances vécues par Annie Ernaux et toutes les femmes avant elle et jusqu'à la loi de 1975. Angoisse, « honte », solitude, douleurs, stérilité et mort pour certaines. le mépris du corps médical pour ces « problèmes » de femmes, pour ces s…….. qui l'ont bien cherché.

Ce livre, ou d'autres du même genre, devraient être conseillés et lus par toutes les filles et garçons au moment où leur vie sexuelle commence. Au collège, nous avions vu un film sur l'accouchement très dur mais jamais on ne nous a parlé de l'avortement, pourtant la loi était passée.

L'avortement est de plus en plus remis en question de par le monde. Même en France, les femmes sont confrontées à des médecins réticents.
Un livre puissant, émouvant dont il faut conseiller la lecture à tous.
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Un livre fort, un livre marquant, un livre nécessaire. Un passage d'Annie Ernaux à l'hôpital pour un test de dépistage du Sida fait remonter à sa mémoire un autre passage à l'hôpital, plus de trente ans avant. D'habitude je n'apprécie pas beaucoup l'écriture de cet auteur, son choix d'une écriture neutre, distanciée, factuelle, froide et minimaliste à l'extrême. Mais il est des moments où ce type d'écriture convient particulièrement, et c'est le cas ici. Elle alterne le récit des faits simplement retranscrits, de la découverte de sa grossesse à l'avortement, et les réflexions que lui suggère le recul du temps : elle est à la fois le personnage principal et l'auteur qui commente. La solitude d'une jeune femme candidate à l'avortement au début des années 60, clandestin forcément, est palpable, glaciale. Plus d'émotion dans le récit l'aurait rendu quelconque : ici nul besoin d'empathie envers la jeune fille, l'émotion (la nôtre) naît de la situation, des faits, qui parlent d'eux-même et bouleversent le lecteur. Sans compter les passages qui nous montre l'attitude du corps médical, tout en mépris de classe et en suffisance. Ce court récit, ce témoignage tardif, est remarquable, percutant, essentiel.
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Un récit honnête et glaçant comme seule Annie Ernaux est capable. On comprend vraiment ce que cela signifiait d'avorter, le stigme que ce geste rapportait ; le tabou est tellement vif que même les mots ont du mal à sortir. Aujourd'hui plus que jamais ce texte est nécessaire, si douloureux, et je suis reconnaissante à l'autrice de l'avoir écrit.
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C'est à l'occasion d'un dépistage VIH qu'Annie Ernaux se rappelle avec acuité, sûrement avec le plus de vérité, un moment traumatique antérieur : sa grossesse non désirée et la lutte pour avorter qui s'en est ensuivie, à une époque où les avortements étaient interdits par la loi.

« Depuis des années, je tourne autour de cet événement de ma vie. » Ce moment d'angoisse et d'attente qu'a été ce dépistage représente la dernière manifestation du désir de la narratrice d'écrire sur cet « événement », comme elle l'appelle, un déclic pour libérer un désir longtemps réprimé, car source de crainte : « Je résistais sans pouvoir m'empêcher d'y penser. M'y abandonner me semblait effrayant. Mais je me disais aussi que je pourrais mourir sans avoir rien fait de cet événement. S'il y avait une faute, c'était celle-là. ».

Annie Ernaux s'engage ainsi dans un témoignage objectif, quasi sociologique, de cet événement, à partir des entrées de son agenda de l'époque et des souvenirs qu'elles suscitent, pour creuser le traumatisme, ressentir à nouveau, par l'effort de les rechercher par les mots, les sensations et la vérité d'alors. de savoir ce qui en resté et sous quelle forme.

Avec son écriture concise, sans aucun gras, l'autrice creuse donc ses ressentis concernant cette situation excluante, qui la rappelle à sa condition de « pauvre » dont elle pensait se sortir grâce à ses études supérieures, elle qui était la première de sa famille à en faire. Cet événement qui dresse un mur entre elle et les autres, notamment les garçons qui font la différence entre les filles qui couchent et celles qui ne le font pas et qui adaptent leurs comportements en fonction, entre les étudiants qui n'ont que leurs études à penser et elle que l'angoisse éloigne de ses recherches littéraires, qui la fait se sentir une « délinquante » par rapport à ce monde universitaire qui constitue pour elle sa référence.

C'est la première fois que je lis un roman d'Annie Ernaux, autrice dont je craignais la lecture en raison de son écriture plate et blanche, de peur de me sentir tenue à distance et empêchée de ressentir une quelconque émotion. Il n'en a rien été, au contraire, et je peux dire que lire « L'évènement » a été une expérience de lecture, pas toujours facile, car l'émotion s'en est allée crescendo, jusqu'au moment de l'avortement, et de ses conséquences qui auraient pu être dramatiques.

J'ai ressenti une profonde compassion pour cette jeune fille si seule dans son désarroi, pas assez entourée, qui ne se rend pas compte qu'elle est en état de choc, celui-ci se traduisant par cette crainte de ne plus être une intellectuelle, de ne plus savoir réfléchir, alors que tout simplement elle vit une situation qui n'est pas anodine et qui la replace dans son corps, elle l'intellectuelle qui semble vouloir s'en détacher, parce que la société réprouve encore, dans les années 60, le désir sexuel des jeunes filles. Personne n'est là pour l'aider, elle qui se fait écraser par une loi déshumanisante, atroce pour les femmes, qui les poussent à risquer leur vie dans la clandestinité.

Car c'est l'objectif aussi de ce texte, témoigner d'une loi brutale, « invisible, abstraite, absente du souvenir et qui pourtant [la] jetait à la rue à la recherche d'un improbable médecin. ». Cette loi présente partout, et qui « rendait impossible de déterminer si l'avortement était interdit parce que c'était mal, ou si c'était mal parce que c'était interdit. On jugeait par rapport à la loi, on ne jugeait pas la loi ». Une loi qui restreignait les médecins, alors « obligés à se rappeler la loi qui pouvait les envoyer en prison et leur interdire d'exercer pour toujours. Ils n'osaient pas dire la vérité, qu'ils n'allaient pas risquer de tout perdre pour les beaux yeux d'une demoiselle assez stupide pour se faire mettre en cloque. A moins qu'ils n'aient sincèrement préféré mourir que d'enfreindre une loi qui laissait mourir des femmes. […] En face d'une carrière brisée, une aiguille à tricoter dans le vagin ne pesait pas bien lourd. »

J'ai ressenti à la lecture de « L'évènement » la même indignation que pendant celle du « Choix » de Désirée Frappier, roman graphique (qui faisait d'ailleurs de la place dans ses pages pour des extraits d'une interview avec Annie Ernaux) complémentaire en ce qu'il documente la lutte pour la légalisation de l'avortement. Ce corps médical qui ne donne les bonnes adresses qu'une fois l'avortement fait, qui met tout sur le dos d'une loi pratique pour ne pas se poser de questions, sa condescendance choquante, à l'image de celle de cet interne, honteux et en colère d'avoir découvert après les soins prodigués à Annie Ernaux que celle-ci était du même monde que lui, celui des hauts placés, qui apparemment ont plus de légitimité à se débarrasser d'un enfant que ceux de basse classe…

« L'évènement » a été, comme je le disais plus haut, une véritable expérience de lecture, de celles dont on ressort choquée quand on referme la couverture. Mais qui à ce titre, sont inoubliables.
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Dans la France des années 1960, l'avortement est interdit et passible de la peine de mort. Les avortements se font dans la clandestinité et coûtent la vie à de nombreuses femmes.

En 1963, Annie Ernaux est étudiante. Elle tombe enceinte. En 130 pages, l'autrice raconte le souvenir de son parcours du combattant pour avorter. Elle montre les regards des autres et de leurs préjugés.

C'est poignant. C'est brutal. C'est déchirant. C'est un livre à lire, à relire, à offrir, à partager et à transmettre. J'en reste complètement renversé tant ce livre est bouleversant, les détails d'une précision chirurgicale et l'ensemble dénué de misérabilisme. En un mot, j'ai été fasciné !
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L'événement Annie Ernaux

-Dans le challenge #marsauféminin 2023 de il y a une catégorie : Lire un livre d'Annie Ernaux. J'étais curieuse de découvrir la plume de cette grande autrice qui a reçu le prix Nobel de littérature en 2022.

- J'ai choisi de lire, plutôt d'écouter en audio book: L'événement, un roman autobiographique très court, où elle revient sur son avortement en 1963 alors qu'elle était étudiante à Rouen. Evidemment, à cette époque, se faire avorter était complètement illégal, mais il lui était inenvisageable de garder cet enfant et de poursuivre sa grossesse. Plus tard, elle a senti un devoir, un besoin, une urgence d'écrire sur cet événement de sa vie. Grâce à son journal intime de l'époque et à ses souvenirs, nous allons la suivre dans son épreuve mais aussi dans sa volonté de témoigner dans un livre écrit des années plus tard. Ce livre est sorti en 2000.

- Avec une plume extrêmement précise, directe et concise, elle nous relate de manière franche et honnête son expérience. le récit est bouleversant, touchant et parfois révoltant. Il nous apporte un témoignage de la condition féminine de l'époque.

- C'est mon premier livre d'Annie Ernaux mais ce ne sera pas le dernier. Je veux en découvrir d'autres ! J'ai été conquise par la justesse des mots et sa façon d'écrire. Un gros coup de coeur

Lien : https://www.instagram.com/p/..
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L'avortement,un sujet dont toutes les femmes sont plus ou moins d'accord !!!

Faut-il garder un(e) être vivant pour laquelle on l'aime ou pas???cela soulève beaucoup d'opinion.
La narratrice elle-même en fait l'expérience dans les années 63.

L'événement est plus considérée comme une autobiographie de l'auteur qui raconte son vécu personnel à travers ses doute mais il aide à comprendre surtout que dans notre chemin de vie,il faut savoir faire des choix.

Il es intéressant aussi de savoir si l'humain dans un avenir proche pourra avoir un(e) enfant et pour les couples,de ce qu'ils décide de faire

Le roman laisse à méditer là-dessus et Annie ernaux nous en laisse la clef.

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Dans quelle ville la narratrice est-elle étudiante en 1963 ?

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