La peur ronge l âme et vide ses victimes de l intérieur. Ce faisant, elle se nourrit de temps de vie
Elle ferma les yeux en espérant que les coussins du canapé allaient l'avaler pour toujours, comme les pétales d'une plante carnivore engloutissent une mouche, mais rien de tel n'arriva.
Et comme elle n'avait pas le choix, elle commença d'une voix brisée à raconter son histoire.
A parler du colis.
Et de la manière dont, avec lui, l'horreur apparue cette nuit-là à l hôtel avait frappé à la porte de sa petite maison à clôture de bois, au fond de l'impasse, et s'était introduite chez elle.
Les articles des journaux à sensations en racontant bien plus sur les préférences sexuelles de NataschaW., vingt-deux ans, que sur l'être humain qu'elle avait été et qui avait perdu la vie dans d'atroces souffrances.
En lisant les commentaires des lecteurs des forums en ligne, on en venait à croire que la majorité d'entre eux tenaient la victime pour partiellement responsable de son malheur : qui donc était du genre à se donner pour de l'argent à de parfaits inconnus ?
"Seins minuscules, cul majuscule, avait-elle de nouveau pensé la matin même en s'observant dans le miroir de la salle de bains." (p. 17)
La plupart des gens considèrent le sommeil comme le petit frère de la mort. Pourtant ,il est son plus grand adversaire. C'est la fatigue et non le sommeil qui constitue le fer de lance des ténèbres éternelles.elle est la flèche que la faucheuse nous tire dessus d'une main sûre, soir après soir, et que le sommeil tente de toutes ses forces de nous extraire, nuit après nuit
- Je vous remercie beaucoup, dit Emma après avoir pris tous les colis des mains du facteur et les avoir empilés dans le couloir, derrière elle. […]
- J'allais oublier. Vous pourriez prendre ça pour votre voisin ?
Il ramassa un carton à peu près de la taille d'une boîte à chaussures ; Emma avait supporté qu'il n'était pas pour elle, à juste titre.
- Pour mon voisin ? […]
Elle pourrait peut-être supporter la présence de l'objet étranger dans sa maison. Il changerait le cours de sa journée et bouleverserait son état affectif, mais le problème n'était pas le colis en lui-même.
C'était le nom.
Son pouls s'affola de plus en plus, ses mains devinrent moites ; à deux doigts de fondre en larmes, elle fixa des yeux l'adresse du destinataire.
Emma se demandait parfois si le Coiffeur, cette nuit-là dans la chambre d'hôtel, lui avait aussi infligé une mise à jour de système, écrasant tous les paramètres de son disque dur émotionnel. Manifestement, elle était un modèle truffé de défauts de fabrication, abîmé et non échangeable.
Le problème des maladies mentales, c'est l'impossibilité de l'autodiagnostic. Vouloir comprendre son cerveau à l'aide de son propre cerveau revient à peu près aux efforts d'un chirurgien manchot pour se recoudre la main. Ça ne peut pas fonctionner.
- Une note.
- Que disait-elle ?
- La plus belle chose qu'un homme m'ait dite depuis très, très longtemps.
- "je t'aime" ?
Emma secoua la tête.
- "Je te crois."
❝ Il lui faudrait des années pour comprendre qu'il s'agissait d'une seringue.
Avec un longue aiguille qui scintillait au clair de lune.❞