Eddie aurait tenté presque n’importe quoi pour avoir une chance de rouler Luther. Mais Luther détenait Carol-Ann. Tout ce qu’Eddie manigancerait pour déjouer les plans de Luther risquait de les pousser à lui faire du mal à elle. Il ne pouvait pas lutter contre eux ni les duper : il ne lui restait qu’à agir comme on le lui demandait.
L’épouse de Mervyn Lovesey était très heureuse. Si elle avait eu peur quand le Clipper avait décollé, Diana n’éprouvait plus maintenant que du ravissement.
Il avait entendu parler du Clipper par la presse. Le service avait commencé cet été. On pouvait gagner New York par la voie des airs en moins de trente heures, au lieu de quatre ou cinq jours par bateau. Mais un aller simple coûtait quatre-vingt-dix livres. Quatre-vingt-dix livres ! pour ce prix-là, on pouvait presque acheter une voiture neuve.
Harry avait réussi à obtenir un billet. C’était de la folie, mais maintenant qu’il avait décidé de partir, il était prêt à payer n’importe quel prix pour quitter le pays. Et le luxe à bord de l’appareil avait de quoi le séduire : ce serait champagne pendant tout le trajet jusqu’à New York.
L’Amérique, songea-t-il.
Il pouvait imiter l’accent américain. Il savait en fait quelque chose qu’ignoraient la plupart des Anglais : il y avait différents accents américains, dont certains étaient plus chic que d’autres. Prenez le mot Boston. Les gens de Boston disaient Bahston. Les New-Yorkais disaient Baoston. Plus on avait l’air anglais, plus en Amérique on faisait haute société. Et il y avait des millions de riches Américaines qui attendaient simplement qu’on leur fasse la cour.
Il possédait un passeport, un peu d’argent et un costume propre dans la penderie de sa mère. Il pouvait acheter quelques chemises et une valise. Il était à cent vingt kilomètres de Southampton.
Rien ne l’empêchait de partir aujourd’hui.
Père alluma le poste de TSF et ce fut alors qu’ils apprirent la nouvelle : la Grande-Bretagne avait déclaré la guerre à l’Allemagne.