« Je vais vous parler de l'horreur. L'horreur banale, anodine, qui nous cueille sur le sentier de l'ordinaire et nous rend à lui sans laisser de trace » Ainsi débute ce témoignage d'une jeune mère qui revient sur ce viol subit il y a douze ans alors qu'elle avait 19 ans.
Difficile de raconter l'indicible, surtout lorsqu'on a préféré mettre tout cela entre parenthèses pour continuer à vivre, parce qu'il le faut bien.
« On disait que j'allais bien. Je le disais à mon tour pour ne pas décevoir. Et aussi, je crois, parce que c'était vrai »
Mais la réalité rattrape
Elsa Fottorino lorsque, douze ans après les faits et l'affaire classée sans suite, le coupable est enfin identifié. La jeune mère, qui attend son second enfant, voit l'histoire de ce viol la submerger à nouveau.
C'est avec pudeur et délicatesse qu'elle revient sur ce drame et sur l'enquête, les interrogatoires et le procès auquel elle ne veut pas assister.
C'est alors qu'elle décide de prendre la plume pour dire vraiment ce qui lui est arrivé et ne plus se contenter de parler tout bas.
Ce témoignage est davantage un cheminement intérieur qui s'attache à raconter le mal-être, la peur, le vide causé par le traumatisme, la culpabilité et ce déni de sa souffrance qu'elle enfouie. Il lui faut cinquante pages pour se raconter dans l'intime avant de pouvoir parler du viol, de sa violence et de la sidération qui a suivi, cinquante pages avant d'aborder l'horreur et toute la procédure qui suivra.
Il y a une certaine lenteur dans le récit, l'auteure prend le temps avant d'affronter à nouveau ce passé et on la comprend, on l'admire pour sa sincérité, sa mise à nue. Faut-il en passer par là pour, enfin, en avoir terminé avec ce poids ?
Elsa Fottorino nous raconte aussi la vie, avec ses souvenirs d'enfant, et le bonheur d'être mère.
L'écriture est sobre, avec une mélancolie qui affleure souvent, et on ne peut qu'être touché par ce récit émouvant et vrai.
Je remercie Lecteur.com et les éditions Mercure de France pour la découverte de ce roman émouvant.