Parfois je suis le chevalier parfois je suis le cheval

« Aux armes citoyens »
j’ai pas d’arme
je me suis pourtant habillée
imité un code dress
d’uniforme palmé
j’ai pas de casque
j’ai pourtant essayé chapeau casquette
mais quoi me protègerait
d’une grolle t.47
qui m’écrase la gueule
en croix et m’enfonce dans la terre
ou dans le macadam.


voilà, c’est ici mon cimetière
400 tombes pour moi seule
du goudron
du marécage
plutôt que...
même le sable ne s’en sort pas.

quelque part l’écho tape
au plafond bas


j’y suis revenue de mes bas-fonds
je suis revenue de mes rêves
et je suis revenue de la terre lourde
où les dieux sont la pute
– la reine d’un royaume souterrain, quoi !
celle qui te siphonne
qui te suce le sang à la plante des pieds
quelque part je saute
sur l’autre berge.

tourner le dos en revers de manche...
pour quelle sécurité ?
pour quel air de jeu ?


air de jeu
avec le mot sécurité sur mon dos
en gros leurre
pour que je ressemble à un pain beurré quoi !
mais quand c’est pas le sang
qui trempe mes grolles
c’est la salive grise qui en dégouline
et patauge dans une flaque écumeuse,
une flaque oui
aussi malade que le reste du paysage
avec ma gueule triste en noir et blanc.

la terre ici résonne creux...


ma gueule est déjà grise
ma gueule je l’ai éclatée contre l’asphalte

air de jeu
là, sur l’aire de jeu
je ne suis pas seule à avoir la gueule grise
pas mal m’apparentent
et à nous tous nous sommes l’Armée
pas des soldats, non
l’armée sans guerre en uniforme à la face triste
avec un trop de fureur
le plein de violence

– j’aime la violence.
de plus en plus puissante,
j’en veux plus encore
l’engendrer, la materner...
je veux tout le viol massacre torture
décapitation étouffement
bouffer l’homme

au fond
je suis pas seule mais...
je m’en veux de ressembler
au reste du paysage
si j’étais un guerrier
un vrai guerrier qui brave
qui bave
qui bouffe
qui se masturbe
qui tue plein de gens
qui s’en fout pas mal
du paysage
paysage malade

et rouillé


2 voies
chacune bien droite
1 voie à préférer
à suivre
2 voies avec en titre
le même mot
sécurité
sécurité
sécurité
sécurité
sécurité
sécurité
sécurité sécurité sécurité
et donc, quand t’as fait ton heureux choix
de l’une ou de l’autre
on te colle ce putain de mot
sur le dos
ou le bide
– sécurité
et après quoi
après, tu te démerdes pour la suite
pour t’armer
t’uniformer t’uniformiser
te palmer
qui veut rien dire !
te casquer
te soldatifier te soldaïser de quelque chose
cause ou pas de cause

on s’en fout si tu sais courir et tuer
et puis, tu cherches
tu cherches
tes armes
putain d’armes (cri)
et tu cherches
quelque chose de symbolique.

mais quelque part
l’écho tape au plafond bas
plafond bas.


ma gueule effacée
ma gueule éclatée contre le macadam
ma gueule sale et grise
ma gueule sale et grise
air de jeu
air de jeu
je ne suis pas seule là
sur l’aire de jeu
non plus
à avoir la gueule teintée grise
ici, là, c’est l’aire de jeu
le terrain de jeu
pour une armée une vraie
une vraie
qui bave baille bafoue bouffe masturbe
se masturbe et masturbe les autres ?
une armée intrépide et apprêtée
à jouer au croque-tout

contrôle
je contrôle ?
oui soldat
je sais pas
cause ou pas cause
je veux mon arme
je veux ma mitraillette
je veux être croque-tout.

je suis Annus,

c’est mon nom.

je suis un clown archive.

je suis arrogante.

je suis le container d’un désir,

il peut être une surface
il peut être une tristesse contemporaine
il peut être une crise
il peut être un corps scénographique
il peut être une discipline ornementale
il peut être un totem
il peut être un tunnel stroboscopique
il peut être un sexe abstrait
il peut être l’ennemi.

il est le sol de la scène baisé par les pieds des danseurs