Émile est un paysan à chocolat. Il plante des cacaos qui donnent des chocolats. Geneviève est une maîtresse à follets. Elle enseigne à l'école primaire publique EPP Assikasso 2.
Geneviève parle de Maman avec le cœur et les traits molo dans sa voix. Elle dit que je lui ressemble trop. Que nous avons les mêmes yeux. Que je suis blanc comme elle. Elle a raison et demie.
Quand il est dirigé par un "Son Excellence", le peuple est sous le joug féodal anachronique. Quand il est dirigé par un "Monsieur le Président", le peuple est sous la coupole bourgeoise réactionnaire.
Lit de camp avec moustiquaire. Avant le nègre et les animaux, le moustique est notre pire ennemi. Des pelotons d'exécution volants.
Les grands-soirs-Camarade-Papa, tout est instrument de lutte contre le grand capital aveugle et apatride. (...) Le menu est prévu par plans quinquennaux de quatre jours. Je suis ministre selon ce qu'il y a à faire. Ministre des Affaires aquatiques et du bain, ministre des études et de l'équipement scolaire, ministre des Affaires poétiques et du ravissement musical, ministre de la Guerre aux blattes et du papier à hygiène, ministre du Contrôle de la cuisson des pâtes et du riz, ministres des Ondes coures et moyennes sur la radio...
Elle avance vers moi tellement lentement que sur un vélo d'Amsterdam, elle serait déjà tombée.
Fourcade m'explique que les premiers sont négrophiles, la pire espèce d'hommes blancs des colonies. Péan raconte que ses voisins d'en fac sont négrophobes, la pire espèce d'hommes blancs des colonies. Les négrophobes utilisent "nègres" pour les hommes, "négresses" pour les femmes, "sauvages" pour les groupes. Ils prononcent "nègre" menton relevé, air supérieur, avec insistance sur l'accent grave qui soulève un coin de lèvre. "Négresse" siffle son "s" final en dessinant sur le visage un rictus de concupiscence. "Sauvage" arrondit les yeux et fronce le nez pour en convoyer l'image. Les négrophiles possèdent une panoplie de groupes nominaux chargés d'éphthètes. "Tirailleurs sénégalais", "porteurs mandésdyoulas", "robuste Kroumen", "jolie Apolonienne", "belle Fanti", "fine Malinké", "superbe mulâtresse", "horrible Akapless"... Ils connaissent les races et n'hésitent pas à faire des généralités.
Quand on meurt on est enterré parmi les vivants à la maison ou à côté et on devient ancêtre à son tour. Sauf pour Grand-mère. Elle est tellement vieille que sans être morte, elle est déjà ancêtre.
- Jamais Air France! Ils ne transportent que la bourgeoisie compradore. Le peuple souverain, ils le déportent. Jamais Air Afrique! Une compagnie de coloniaux d'enfer et d'aliénation qui ne rêve que d'imiter ses maîtres en reproduisant dans les airs la réaction bourgeoise française à la sauce africaine. Toujours UTA! Ah, UTA! Union des Transporteurs Aériens. Quand tu entends Union, la sainte classe ouvrière n'est jamais loin, debout pour faire face au patronat scélérat. (...) On est devant le comptoir UTA. Une femme sourit. Elle me demande de la suivre. Elle est brune et n'a pas vraiment une tête d'ouvrière dans sa tenue bleurois-de-France-féodale. Mais j'ai confiance en Camarade Papa.