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3,36

sur 80 notes
3 voix pour raconter de manière vivante et imagée la colonisation :
La première, celle d'un enfant africain qui a bien compris la leçon anticapitaliste de "camarade papa". Il fait sourire le lecteur et l'émeut avec son vocabulaire français mal maîtrisé et sa naïveté ( il rappelle le petit Michel de Mabanckou ) tout en mettant en évidence les contradictions des adultes.
La 2ème est celle d'un jeune homme qui au 19ème siècle s'aventure en Côte d'Ivoire pour , à l'instar d'autres hommes blancs, installer des comptoirs de commerce français alors que les Anglais, après Sedan, ont pris l'avantage en Afrique.. L'auteur fait revivre ainsi les différents peuples de la région avec leurs rites, leurs cultes des ancêtres, leurs capacités physiques et psychiques, leurs habitudes de vie.
Il montre les relations codées entre Blancs et Noirs et la domination des uns sur les autres.
La 3ème est intercalée entre certains chapitres : ce sont des légendes africaines rapportées par les serviteurs des blancs.
Très bonne lecture, enrichissante, amusante, étonnante.
Un auteur à suivre.
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Un petit passage à Amsterdam dans les années 80, avec un gamin à l'esprit vif et complètement endoctriné par ses parents communistes, version Albanie d'Enver Hodja et Corée du nord. Son père l'envoie en Côte d'Ivoire, où résident des amis et de la famille. le gosse découvre le village, l'école.

Fin 19ème siècle, Dabilly s'en va chercher l'aventure dans l'Afrique coloniale à ses débuts; c'est l'époque des comptoirs sur la côte (Grand-Bassam, Assinie), des explorations vers le nord, et plus généralement de la lutte avec l'Angleterre visant à l'empêcher d'étendre ses colonies. Entre les deux, diverses tribus de la future Côte d'Ivoire, cherchant à tirer leur épingle du jeu.

Les deux récits alternent, avec de courtes 'légendes' d'une ou deux pages, dont les éléments s'intègrent parfaitement ensuite dans le cours de celui de Dabilly.
Voilà pour l'aspect général du roman.

Ce qui frappe ensuite, c'est l'écriture, qui à mon avis devrait convaincre le lecteur le moins attiré par une histoire des premiers temps de la colonisation en côte d'Ivoire et l'ambiance dans un petit village dans les années 1980.

"Dans la chaîne des discours de Camarade Papa, après les Philips, il y a les tulipes.Ce sont des fleurs turques qui ont attrapé la coqueluche chez les bourgeois hollandais il y a longtemps. Bien avant la vapeur anglaise, les bourgeois protesteurs hollandais utilisent la fleur turque pour fabriquer une bourse. la fleur n'est pas très belle, même les moutons refusent de la brouter. Mais à cause de la pluie value, ils s'achètent et se vendent la mauvaise herbe, ils inventent le capitalisme des bourses. Il ne vient pas d'Angleterre, tout le monde s'est trompé, Marx et son ange aussi."
Voilà un petit bonhomme qui a ingéré les discours du Papa, et le ressort à sa façon inimitable, l'histoire des tulipes est vraie. Savoureuse façon de raconter, non?

Avec Dabilly, on est dans un langage plus soutenu, ou la causticité affleure au 12ème degré. Ah ce temps des colonies, où la barre empêchait d'aborder en bateau sur le rivage, où l'on ne devait pas sortir sans casque avant 6 heures du soir, où l'on mourait vite fait de la fièvre jaune...

"On a tous deux balances: celle des achats et celle des ventes. celle des achats allège, celle des ventes alourdit. Ils sont malins, mais ça, ils n'ont pas compris.
A la colonie, les gens profitent.
- N'allez pas crois qu'il sont naïfs. Ils ne ratent pas une occasion de nous gruger, ces singes-là. On ne compte plus les ballots de caoutchouc, de coton ou de graines de palme alourdis par des cailloux.
La colonie rend les gens justes."

On l'aura compris, j'ai bien jubilé au cours de ma lecture, Gauz sachant égratigner au passage les diverses catégories de personnages. On y croise -d'assez loin- des personnages ayant existé, tels Treich ou Binger (oui, ceux de Treichville et Bingerville...)
Lien : https://enlisantenvoyageant...
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Naissance de la Côte d'Ivoire coloniale et paradoxes contemporains, avec humour tendre et acide.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2018/08/29/note-de-lecture-camarade-papa-gauz/
Lien : https://charybde2.wordpress...
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J'ai trop été déconcerté par ces histoires intercalées dans le temps, dans les lieux. J'y reviendrai peut être un jour.
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Un roman, non deux romans. Une histoire double, deux récits en échos pour ce roman polyphonique, métissé, deux histoires avec des petits « h », pour raconter celle avec la majuscule.

Gauz entremêle habillement deux époques, les liant de légendes africaines, donnant voix aux cultures des colonisés.

Car il y à la colonisation, au XIXème siècle vu par les yeux d'un ancien ouvrier de la Manufacture d'armes de Châtellerault, se retrouvant soudainement, au profit d'un voyageen Afrique, dans le camps des dominateurs. Son origine prolétaire lui fait porter un regard critique sur les affaires à Grand-Bassam (pas encore la Côte-d'Ivoire ), et sur les rapports entre colons et colonisés. La Colonisation comme on ne l'a jamais lu, prédatrice et « civilisatrice », bien sûr…mais ce ne sont plus des chiffres ou des diagrammes dans un livre d'histoire, mais la voix des hommes que l'on entend. Et chacun, colon comme colonisé, en prend pour son grade. Un récit très documenté et vivant. le passé de « prolo » de Dabilly, le colon, qui lui fait regarder le monde qui l'entoure avec distance rentre en écho avec, un siècle plus tard, le discours d'un petit garçon, biberonné à la rhétorique marxiste-léniniste et la régurgitant tant bien que mal dans sa vie quotidienne, donnant lieu à des formules époustouflantes. Car si l'histoire, bien sûr, est passionnante, l'écriture la transfigure pour en faire un objet littéraire absolument épatant !

Une plume extraordinaire, aux trouvailles flamboyantes. Une intelligence de la satire portée par l'humour et le sens de la formule de Gauz. La langue est pétrie, malaxée pour nous revenir enrichie de mille inventions, de mille trouvailles qui la font chanter ou gronder.

Gauz nous charme tout le long de ces 256 pages. Les différents portraits qu'il dresse sont sublimes, le récit initiatique des ses deux protagonistes, à un siècle d'intervalle, est solaire, drôle, triste, magnétique.

« Camarade Papa » est un livre intelligent, tendre, engagé sans être doctrinaire. L'un de mes gros coups de coeur de cette rentrée.
Lien : https://bonnesfeuillesetmauv..
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Gauz, romancier et journaliste ivoirien, a choisi de nous conter l'histoire de la colonisation de la Côte d'Ivoire dans son second roman, Camarade Papa.
A travers le voyage de deux personnages qu'un siècle sépare, Dabilly et Anouman, l'auteur nous fait découvrir des facettes méconnues du colonialisme.

Dabilly, français né à la fin du XIXe siècle dans un petit village du centre de la France, décide sur un coup de tête de partir pour l'Afrique suite au décès de ses deux parents. A travers ses yeux, nous découvrons un pays indomptable, des peuples divers et leurs traditions.
Le récit de Dabilly semble objectif, il décrit son environnement de façon assez neutre, ce qui donne des airs de documentaire ethnologique au roman. Cette impression est renforcée par les passages historiques présentés sous forme de divers témoignages qui ponctuent le récit.
Les rivalités entre nations colonialistes, les ethnies, la cohabitation, la conquête de terres sauvages, les maladies endémiques, l'auteur nous dresse un portrait très complet de ce pan de l'histoire.

Anouman, jeune garçon d'origine ivoirienne vivant à Amsterdam, est envoyé par son père sur la terre de ses ancêtres suite à la mort de sa mère. Né dans une famille communiste, j'ai savouré le jeu de l'auteur avec le langage, Anouman invente des verbes, mixe des expressions, à la sauce socialiste, le résultat est plein d'intelligence et savoureux.

Un roman original, qui réclame parfois un effort intellectuel mais permet de découvrir une nouvelle histoire de la colonisation, humaniste et multiculturelle.

#NetGalleyFrance #CamaradePapa
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Camarade Papa est un roman qui offre une perspective originale sur l'histoire de la colonisation française en Côte d'Ivoire à travers deux récits parallèles : celui d'un colon français au XIXe siècle, et celui d'un enfant d'immigrés africains en Europe au XXe siècle.

Dans les années 1880, à la mort ses parents, Dabilly décide de quitter la France pour tenter sa chance en Afrique. Un peu par hasard, il est embauché par l'entreprise de commerce international d'Arthur Verdier (1835-1898), « Résident de France » en Côte d'Ivoire. Il arrive à Grand-Bassam alors que Français et Anglais se disputent le contrôle de la région. Chargé de négocier des accords avec les tribus locales, il s'intègre peu à peu à sa société d'accueil et découvre une ethnologie complexe composée de porteurs mandés-dyoulas, de tirailleurs sénégalais, de groupes d'Aboureys, de rebelles akapless, de pagayeurs apoloniens de kroumens.

Dabilly pose un regard critique non seulement sur les moeurs africaines, mais aussi sur celles des colons, divisés entre « négrophiles » et « négrophobes » :
« [O]n frôle régulièrement le pugilat. L'ambiance ne se détend que lorsqu'arrivent les Anglais. La détestation du Britannique adoucit les moeurs. »

Ses observations révèlent des détails historiques parfois surprenants et souvent amusants, comme cet engouement des Ivoiriennes pour les mouchoirs anglais :
« À Grand-Bassam, le summum de la coquetterie est un mouchoir à l'effigie de la reine Victoria glissé entre les jambes. le visage de la vieille régente oscille en un endroit où la propagande anglaise n'aurait pas imaginé s'afficher. »

Un siècle plus tard, Anouman, encore à l'école primaire, quitte lui aussi l'Europe pour la Côte d'Ivoire, le pays d'origine de ses parents. Influencé par le communisme militant de son père, il pose un regard étonné sur sa nouvelle terre d'accueil, tentant d'interpréter les attitudes et les discours des adultes à travers la grille d'analyse de la lutte des classes… telle qu'il la comprend. le langage qu'il utilise pour décrire son expérience regorge de néologismes, de mots détournés et d'associations d'idées saugrenues : « esclavengeurs », « suppositoires du grand capital » … Beaucoup d'ironie et d'absurde qui contribuent à créer une distance critique avec la réalité décrite et les grands discours idéologiques des adultes.

Résultat : Camarade Papa offre un moment de lecture qui sort de l'ordinaire, par son sujet mais aussi et surtout par le style de l'auteur. Journaliste en Côte d'Ivoire, Gauz s'est fait connaître comme écrivain en 2014 grâce au succès critique de son premier roman, debout-payé. Ce témoignage d'un jeune sans papiers africain qui devient vigile à Paris dans les années 1990 brosse un portrait à la fois drôle et critique de la société française face à l'immigration. Dans Camarade Papa, on retrouve le même sens de la satire, appliqué cette fois à l'histoire de la colonisation et de l'immigration. Un ton décalé et personnel qui, loin des clichés et du politiquement correct, souligne l'absurdité des discours hégémoniques quels qu'ils soient.

J'ai aimé…
- le récit de la colonisation française en Côte d'Ivoire du point de vue d'un témoin des tensions entre Français et Anglais, entre colons et autochtones, mais aussi entre commerçants et militaires français.
- le style, très imagé, plein d'humour et d'associations inattendues, qui fait appel à l'intelligence du lecteur.

J'ai moins aimé…
- L'éditeur présente le roman comme la confrontation de deux regards, « celui du blanc sur l'Afrique et celui du noir sur l'Europe ». En réalité, malgré l'unité de lieu (Grand Bassam), il est parfois difficile de faire le lien entre les deux points de vue. L'histoire de Dabilly tend à prendre le dessus sur celle d'Anouman.
- Si le style est remarquable, certains traits d'humour implicites peuvent être difficile à saisir pour le lecteur qui ne dispose pas de toutes les références culturelles nécessaires.

Merci à NetGalley et aux éditions le Nouvel Attila de m'avoir permis de lire ce livre avant sa publication officielle le 31 août 2018.
Lien : http://histfict.fr/camarade-..
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A mon grand regret, je n'ai pas réussi à entrer dans ce récit. J'ai persisté sur plusieurs dizaines de pages.
L'alternance des chapitres racontés par 2 personnages différents - un homme Dabilly en 1880 et un jeune garçon dans les années 1980 - ne m'a pas dérangée du tout.
Les passages concernant Dabilly m'ont beaucoup intéressée et j'ai presque hésité à ne lire que ceux-là, mais la peur de perdre tout le sens du livre a pris le dessus.
Les passages du petit garçon m'ont eux posé problème : langage enfantin, jeux de mots dus à l'incompréhension du garçon ("pluie value" par ex.) et paroles communistes des parents rapportées comme il les comprend.
Je suis persuadée que ce livre peut être fort intéressant de part son sujet (regard sur l'Afrique et sa colonisation) et l'écriture est belle et agréable, mais les chapitres de l'enfant ne m'ont pas permis de pleinement profiter de cette lecture.
Abandon donc.
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Grosse déception de mon côté, alors que j'avais tant aimé #deboutpayé et que je me faisais une joie de découvrir celui-là.
Son style est certainement plus abouti, sauf que ça n'a pas du tout pris avec moi. J'ai trouvé ça long, arriver au bout a été laborieux même si les jeux de mots et de langage dans la bouche d'un de ses personnages sont délicieux... au début.
Bref, j'en attendais tant que je suis très déçue. .
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« Camarade papa » de Gauz, dont j'avais beaucoup apprécié le premier ouvrage «  debout , payé » pour sa facture et son style bien personnels, m'attendait dans ma pile..plaisir en vue !!

Les premières pages m'ont emplie de joie.. l'histoire, racontée à sa façon me plaît, tout est parfait, le premier chapitre, celui du petit garçon à la peau claire avec un papa noir et une maman marron, qui disparaît du jour au lendemain, me parle !!
Sa copine Yolanda aussi dans une vitrine d'Amsterdam, on le comprend vite, tout autant !
Le discours communiste de la maman, du papa et les propos enfantins et pleins de fraîcheur du gamin me réjouissent, l'inventivité du vocabulaire et des tournures de l'auteur m'impressionne, tout me plaît..on avance !

Et puis, sans crier gare, nous voilà au milieu du siècle dernier dans une famille en deuil..et tout change : le style, les personnages..
et encore une autre fois, au sein d'une tribu dont la langue est ici encore traduite du mieux possible, vocabulaire et tournures adéquates, parfois très difficiles à comprendre !

Sans oublier les contes et légendes de grand Bassam en Cote d'ivoire, passionnants et revigorants !

Bref, même après avoir lu la quatrième de couverture qui parlait bien d'une reconstruction de la colonisation à deux voix , à deux voies bien sur, je n'ai pas reconnu l'histoire, ni L Histoire : ce livre est sans doute trop travaillé pour moi, l'art de Gauz, loin du mien, son univers également sans aucun doute, mais j'ai eu beau prendre, reprendre, lire et relire certains passages.. rien n'y a fait, je ne suis pas entrée dans ce récit ! Dommage sans doute !

Ceci dit j'ai appris de nombreux détails sur la vie des Agny, «  la transmission du pouvoir est avunculaire. On hérite de son oncle, le frère utérin de sa mère. » «  la justice Agny n'est pas pénale, elle est compensatoire. Dans un meurtre, le clan coupable peut être condamné à donner un enfant, une femme ou un homme jeune à la famille de la victime.. » Peine que j'ai vu également appliquée chez les indiens d'Amérique.
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