Viens plus près

C’était un homme capable d’aller au bout de n’importe quelle grille de mots croisés, d’ouvrir n’importe quelle bouteille, d’atteindre sans effort l’étagère du haut au supermarché. Il représentait la stabilité, quelqu’un sur qui je pouvais compter, mon roc, jour après jour. Quelqu’un qui m’aimait, qui ne m’abandonnerait jamais.

e nouveau don de voyance m’a plus ou moins accompagnée tout au long de l’été sans que je sache jamais vraiment quoi en penser.

Aucun être vivant ne me voyait plus d’un bon œil ces temps-ci : les bébés se renfrognaient, les chiens me montraient les dents, les chats crachaient, je faisais même fuir les écureuils. Et les êtres humains adultes – même pas la peine d’en parler.

Après tout, en ville, on ne sait jamais à qui on a affaire. Cette personne pourrait avoir un couteau, une arme, n’importe quoi. Elle pourrait, je ne sais pas, moi, être le genre de personne qui déteste les hommes qui traînent dans les gares en attendant les femmes.

Bien évidemment, notre vie de couple n’était pas toujours rose. Tous les couples se disputent, et nous ne faisions pas exception. Il y avait quelques détails chez Ed, de petites choses, qui me rendaient folle. Par exemple, son amour de l’ordre frisait l’obsession : un bout de papier posé sur la table basse pendant plus d’un jour ou deux pouvait l’exaspérer.

C’était un homme capable d’aller au bout de n’importe quelle grille de mots croisés, d’ouvrir n’importe quelle bouteille, d’atteindre sans effort l’étagère du haut au supermarché. Il représentait la stabilité, quelqu’un sur qui je pouvais compter, mon roc, jour après jour. Quelqu’un qui m’aimait, qui ne m’abandonnerait jamais. On ne peut pas reprocher à cet homme sophistiqué, civilisé, de ne pas avoir les mêmes instincts qu’un chien errant.

Imaginez que vous avez devant vous une bouteille de whisky, et que quelque chose en vous dise, Mince, j'aimerais vraiment une gorgée de ce whisky. Et puis, une autre voix en vous chantonne, Voyons, tu ne devrais pas, tu dois prendre la voiture pour renter. Et une troisième voix ajoute, Allez, bois-le, et puis c'est tout. Cette voix de l'esprit est nouvelle, c'est un bruit que vous n'êtes pas habitué à entendre dans votre tête, mais elle n'est pas tellement étrange non plus, elle imite assez bien votre propre voix intérieure et vous aimez ce qu'elle dit. Allez. Ne prends pas le temps de réfléchir. Tu vas t'amuser. Bois-le. Tout de suite.
Vous seriez loin de vous douter que cette troisième voix ne vous appartient pas. Vous vous contenteriez sans doute de boire le whisky.

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