Cher Mr Darcy

L'humiliation est encore cuisante. Qu'une demoiselle puisse me refuser, moi, Fitzwilliam Darcy de Pemberley, est incroyable. Qui plus est, être rejeté par Elizabeth Bennet, qui n'est personne et ne vient de nulle part, et qui aurait dû se sentir honorée que je m'abaisse à la remarquer, et pis encore, à lui demander sa main ! La chose est impossible.

J'ai rencontré quantité de femmes accomplies, belles et intelligentes, venant de bonnes familles, avec une dot coquette, mais aucune ne me tente. Je commence à me demander si je ne suis pas trop difficile. Pourtant je suis convaincu que la future Mrs Darcy doit avoir quelque chose de plus : une qualité indéfinissable qui fera d'elle non seulement une maîtresse adéquate pour Pemberley et une soeur bénéfique pour Georgiana, mais une épouse irrésistible et captivante pour moi.

Elisabeth a fait remarquer que si je poursuivais toutes mes résolutions j'arriverais à un total de vingt heures d'activités utiles par jour, et dans ce cas, quand dormirais-je ?

A présent, je dois vous quitter, car s'il y a une chose au monde que j'aime encore plus que vous écrire, Jane, c'est de passer du temps avec mon époux et d'être la maîtresse de Pemberley. Malgré son caractère imposant, c'est ma maison - comme le serait n'importe quel endroit où se trouverait mon cher Mr Darcy.

Louisa et moi brûlons d'en apprendre davantage au sujet de votre ami Darcy. Il ne s'agirait pas... mais je ne crois pas... et pourtant, peut-être... Votre Darcy ne serait-il pas le Darcy, par hasard ? Mr Fitzwilliam Darcy ? De Pemberley ? Si c'est bien lui, vous devez m'inviter à Londres sans perdre un instant ! C'est le meilleur parti de toute l'Angleterre. C'est exactement le genre d'homme que je voudrais épouser.

Caroline voulait que je prenne une maison là-bas aussi, mais je lui ai répondu que je n'allais pas pourchasser Darcy à travers tout le pays comme un chiot et qu'il faudrait qu'elle se contente de Bath.

J'ai dit à Mr Darcy qu'Anne semblait très agréable et j'ai fait quelques allusions à mon désir de visiter le Kent, ce qui a beaucoup embarrassé Charles. Il m'a réprimandée, mais je suis certaines que Mr Darcy n'y a rien vu d'étrange.

Vous est-il déjà arrivé que, malgré tous ces lourds inconvénients, une telle femme vous attire, contre votre volonté, et que de jolis yeux retiennent votre attention et vous privent de sommeil ? Ou que des manières insolentes, au lieu de vous rebuter, vous séduisent ? Ou que son manque de respect pour votre rang attise votre intérêt au lieu de l’étouffer ? Avez-vous déjà estimé nécessaire de vous éloigner d’une telle créature, afin d’éviter de
perdre tout contrôle sur vos sentiments et de donner naissance à des espoirs ? Et vous est- il arrivé de songer que si de semblables attentes devaient naître, ce ne serait pas une mauvaise chose ? Qu’au fond de vous, vous seriez heureux d’être contraint de lui demander sa main, même si toute votre personne se rebellait à l’idée d’une telle union ? Avez-vous trouvé difficile de garder la tête froide en pensant à elle ? Avez-vous, en un
mot, ressenti l’étreinte d’un sentiment qui vous dépassait ?

N'oubliez jamais qui vous êtes, et gardez toujours une supériorité dans vos manières qui reflète celle de votre naissance. N'encouragez pas le commun des mortels à se montrer familier avec vous ; soyez prudent, ces gens voudront attirer votre attention ; mais il vous suffira d'avoir l'attitude adéquate pour qu'ils abandonnent leurs prétentions.

Ah, pourquoi n’y a-t-il pas dans le monde autant de jeunes gens aimables et raisonnables que de jeunes filles qui les méritent ?