" Ne pas avoir à faire de choix, ça évite d'en faire des mauvais."
" Il ne se passe pas un jour sans que je me dispute avec ma soeur. C'est presque un plaisir."
A l'âge adulte, vers la fin du lycée, nous sommes censés tout savoir : qu'ils habitent à quelques centaines de mètres de nous, au-delà du no man's land, et que le fruit de leur exloitation nous permet de bien vivre, que leurs conditions d'existence entraînent pour eux une durée de vie très courte et une surmortalité des enfants en bas âge, mais que c'est ainsi depuis des générations et que rien ne justifie ue cette situation change un jour.
Je vais avoir dix-sept ans dans moins de trois mois. A cette date, je devrai être marié. C'est la loi ici. Mais pour avoir le droit de prêter les serments de fidélité éternelle, les deux candidats doivent au préalable avoir passé les tests de compatibilité. En clair, la future mariée doit être enceinte au moment du mariage. La vie est trop courte par chez nous pour perdre du temps à unir deux êtres qui ne pourraient assurer une descendance.
- Ma maison d'autrefois se trouve dans cette direction.
– Mais personne n’habite sur les plaines mauves.
Elle éclata d’un rire nerveux. Je pris la mouche car j'avais vraiment l'impression qu'elle se fichait de moi.
– Les plaines mauves, répétait-elle en reprenant son souffle, les plaines mauves, mais…
Elle me rattrapa alors que je quittais la terrasse en boudant.
- Je ne me moque pas de vous, Ludmilla. Mais ce mensonge tellement gros qu’il me surprend toujours quand on l’évoque. Il n’y a pas de plaine mauve, ce sont des nuages de pollution si denses qu’ils empêchent toute lumière de les traverser. En dessous, c’est la nuit et des gens vivent là, dans la pénombre. Ce phénomène se nomme la Nox. Tous les matins, je rêve que le nuage s’est enfin dissipé et que je vais apercevoir la maison de mes parents.
– Des gens vivent là-dessous ? Des gens comme nous ?
– Oui, comme moi surtout.
Ce jour-là, je découvris que mon père, contrairement à ce qu'il m’avait affirmé après la mort de ma mère, était capable de mensonges. Que me cachait-il d’autre ?
- Pourquoi faut-il accepter sa condition sociale ? C'est ça le sujet de mon devoir de morale. En clair, pourquoi faut-il accepter d'être pauvre ?
- Nous ne sommes pas si misérables, Lucen. Nous sommes dans la moyenne. Lis-moi ce que tu as déjà écrit.
- Je n'ai pas écrit grand-chose parce que je trouve cette question idiote: Pourquoi faut-il ...? A-t-on le choix ? Donc, j'ai écrit : Il faut accepter sa condition parce qu'on ne peut pas faire autrement, c'est tout. Le problème, c'est que je suis censé remplir toute la feuille.
- "Pourquoi faut-il accepter sa condition sociale ?" C'est ça le sujet de mon devoir de morale. En clair, pourquoi faut-il accepter d'être pauvre ?
— Ils ont oublié la lettre t, fait-elle remarquer. Ils ont écrit Marha !
— Elle a simplement retrouver son prénom de pauvre. Nous ne connaissons aucune Martha par ici. Et j'imagine qu'il n'y a pas de Lucen dans la ville haute.
— Non, le vrai prénom, c'est Lucien, cela vient d'un mot latin qui signifie lumière.
Tout le monde apprécie Firmie mais aucun fille ne voudrait lui ressembler et aucun garçon ne la voudrait pour femme. Elle est trop différente, trop directe peut être. Elle n'hésite pas à faire entendre sa voix et son opinion, et ici pour une femme c'est mal vu.
Suzon
Mes deux expériences dans la ville basse m'ont révélé que j'avais un tempérament aventureux et que je brûlais de faire des rencontres, même si, je dois me l'avouer, j'ai eu de sacrées trouilles. Quand j'y repense, j'en éprouve presque du plaisir, surtout celui de m'en être sortie.