Citations sur Désobéir (88)
La démocratie critique n’est pas un régime politique parmi d’autres, elle est la structuration éthique du sujet politique. Elle désigne la possibilité, en chacun ouverte, structurelle, de désobéir à l’autre, aux autres, à l’Etat et aux institutions, depuis un pli irréductible à toute psychologie du moi individuel, à toute métaphysique de l’âme.
Pourquoi obéissons-nous et surtout : comment obéissons-nous ? Nous avons besoin d’une stylistique de l’obéissance qui seule pourra nous inspirer une stylistique de la désobéissance.
"La démocratie c'est une multitude anarchique de petits maîtres qui se chamaillent, un concert inaudible de voix égrillardes, prétentieuses, que nul n'est autorisé à faire taire. Ce n'est pas le conformisme qui règne, c'est le difformisme."
"Gouverner c'est protéger, prendre soin. Les sujets politiques font un peuple d'enfants reconnaissants et craintifs que l'Etat protecteur et grondeur prend sous son aile, sous sa coupe, sous sa tutelle."
L'enrichissement se fait au détriment de l'humanité à venir. Nous créons de la richesse en obérant le futur.
La Nature apparaît, pour la première fois, vulnérable. Pendant des siècles, nous avons tenté de nous protéger de la Nature par la technique. Désormais, c'est la Nature qu'il faut protéger de la technique. Mais aujourd'hui, près d'un demi-siècle après les analyses de Jonas [Principe responsabilité 1970], ce n'est lus de l'altération de la Nature qu'il est question, mais de sa suffocation : les conditions du «renouvellement» des espèces vivantes et des ressources minérales ne sont plus rassemblées, le cycle de la renaissance s'est brisé. Ce qui menace, c'est la fin des printemps.
Les règles de solidarité élémentaire s'effritent. La réalité humaine se dissout et il ne reste plus, dans les salons dorés des dirigeants légèrement pensifs et vautrés, que Dieu et les équations, alors que dans l'autre monde on se déchire les miettes.
«... on se dit que tant de déraison - cette monstruosité démente des inégalités - doit avoir une explication supérieure, théologico-mathématique au moins, et elle ne serait que de surface. C'est bien là la fonction atroce de l'introduction du formalisme mathématique en économie : innocenter celui qui engrange des bénéfices. Non, il n'est pas le salaud de profiteur qui fait crever l'humanité, mais l'humble serviteur de lois dont la souveraineté, la complexité échappent au commun des mortels. J'entends la voix de ces dirigeants surpayés, de ces sportifs millionnaires. Ils se donnent une conscience facile en opposant : «Mais enfin, ces émoluments exorbitants, je ne les ai pas exigés, on me les a proposés ! C'est bien que je dois les valoir.» Allez dire aux travailleurs surexploités qu'ils méritent leur salaire et qu'ils sont sous-payés parce qu'ils sont des sous-hommes.»
«Que voulez-vous, c'est bien malheureux, mais enfin les chiffres sont les chiffres, et on ne va pas contre la réalité des chiffres.» [...] Quelle réalité ? Pas celle, étouffée, des solidarités interindividuelles, du sens élémentaire de la justice, de l'idéal de partage. Pas l'épaisseur des réalités humaines, que les dirigeants - les «responsables» comme on dit, par ironie sans doute - dans un mélange d'indifférence et de calcul, oublient dissimulent, cachent à eux-mêmes derrière l'écran de leurs statistiques imprimées sur du papier brillant
... désobéir est une déclaration d'humanité.