Tu le sais, poursuit-elle, il n'y a rien qui répare, rien qui comble.
Ce qui venait de se passer avait tout rasé, tout brûlé. Cette mort exigeait une reconstruction, un réapprentissage, un recommencement. Il ne restait de moi que cette envie de réparer le mal que mon ignorance avait répandu.
Les Français ne sont pas alambiqués, ils sont sophistiqués, je plaide avec un clin d'œil.
Je me demande ce que Karl ressent et ce qu'est la perte d'un conjoint.
L'amour continue d'exister dans le vide, comme dans tout deuil, mais il pèse dans chaque acte du quotidien dépeuplé de l'autre. La vie telle qu'on l'a tissée, cousue et raccommodée pendant des années d'existence partagée meurt elle aussi. Finalement, il ne reste que la moitié de tout. (p.290).
Comme Thomas Jefferson, je crois beaucoup en la chance. Et, comme lui, j'ai conscience que plus je travaille, plus la chance me sourit.
Il sait très bien que c'est une invitation en I'air. On ne partage pas un deuil.
Où que j'aille, j'emporterai le souvenir de Freyja avec moi. Ma femme est partout : dans le café du matin, dans la bière du soir, dans le silence de la nuit. Je l'aimais de cet amour qu'elle trouvait féminin, j'aimais être l'ombre de sa lumière. Elle trouvait ça fleur bleue, ça la faisait rire.
Freyja est ma terre. Je la transporte partout, accrochée à la semelle de mes chaussures. Elle me suit malgré moi. (p.105).
Tu sais, ajoute-t elle, on pense toujours à ceux qui partent, mais on devrait faire plus attention à ceux qui restent
Mais est-ce que l'abondance de tout, en ville, ne crée pas des besoins ? Se concentrer sur l'avoir plutôt que sur l'être ne favorise pas les moments d'introspection.
« Nichée au cœur de Stockholm, la place Stureplan grouille d’une foule apprêtée, de talons qui bravent la neige, de cheveux gominés à l’excès, de lèvres brillantes qui ne demandent qu’à être embrassées, de jambes qui dansent par anticipation. La place vibre comme un soir d’été. »
« Je prends place dans un profond canapé en cuir noir et songe, en détaillant l’homme à l’impeccable chemise blanche et à la barbe taillée qui me reçoit, que personne ne porte le deuil de la même façon. Certains se raccrochent au contrôle de soi, d’autres s’abandonnent au chagrin, littéralement. »