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Citations sur Sång (45)

Kerstin ouvrit la bouche pour aspirer une goulée d’air ; l’atmosphère de la chambre était étouffante. Un feu grogna dans sa poitrine et partit à l’assaut de sa gorge. Le désespoir mêlé à la rage. Elle plaqua ses mains sur ses lèvres et se mit à hurler. Son visage se fripa sous les pleurs – des sanglots secs, sans larmes. Encore et toujours cette tristesse aride. Mais cette fois elle l’accueillit et s’y blottit comme elle l’aurait fait dans les bras de Göran, réfugiée dans son étreinte, tapie dans son ombre. Et sa peine l’engloutit.
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Londres, Hampstead, Flask Walk, domicile d’Emily Roy,

samedi 3 décembre 2016, 4 heures.



Le paquet de café moulu à côté de la boîte de thé English breakfast. Le thé vert au jasmin, au-dessus du thé vert nature. Puis le miel de thym. Le bocal de sucre demerara. Et les quatre boîtes de pepparkakor de chez Anna, empilées les unes sur les autres.

Aliénor Lindbergh respira profondément. Le placard d’Emily était parfaitement rangé.

La profileuse avait aligné trois tasses sur le plan de travail. Elle avait rempli le filtre en inox de thé noir et l’avait replacé dans la théière. Puis elle avait versé un peu de lait dans une des tasses, oubliant une fois de plus que Jack préférait l’ajouter en dernier. La main sur l’anse, elle attendait maintenant que la bouilloire s’arrête. Ensuite, ils s’attableraient tous ensemble. La conversation tarderait à démarrer. Jack poserait le premier mot. La première phrase. Et elles l’écouteraient en buvant leur thé.

Aliénor se demanda si, pendant son absence, le cellier de ses parents avait été réorganisé. Si le chocolat en poudre O’Boy était toujours placé entre le café et la tisane de menthe poivrée. Sa mère avait-elle classé les livres de la bibliothèque familiale par couleur, comme elle l’avait toujours souhaité, et non par thème et par ordre alphabétique, comme ils l’étaient à son départ ?

Voilà ce qu’elle ferait à son retour en Suède. Avant de voir ses parents. Avant de les embrasser. Et de poser sa joue contre celle de sa sœur. Elle irait vérifier que tout était à sa place : le chocolat en poudre et les livres. Et les paniers des chiens dans la remise de l’arrière-cuisine. Même s’ils étaient morts, les chiens.

Aliénor se força à caresser les rainures de la table en vieux chêne.

Sept mois. Sept mois qu’elle avait quitté le domicile de ses parents. Sept mois à travailler en tant que stagiaire aux côtés d’Emily et de Jack pour la Metropolitan Police. Emily voulait la former à devenir BIA, Behavioral Investigative Adviser. « Profileuse », dans le langage commun. Jack Pearce n’approuvait pas. Mais il ne pouvait pas dire non à Emily. Peut-être parce qu’ils couchaient ensemble.

Emily avait tout de suite soupçonné Marty Partridge. Elle ne s’était pas trompée. Elle avait résolu la disparition et le meurtre de Jennifer Marsden en quelques heures…

…au moment même où sa famille se faisait massacrer.

Le paquet de café moulu à côté de la boîte de thé English breakfast. Le thé vert au jasmin, au-dessus du thé vert nature. Puis le…

On ne la laisserait pas embrasser ses parents. Ni poser sa joue contre celle de sa sœur. Ils devaient être sur la table d’autopsie, maintenant, tous les trois. Ou peut-être encore dans les housses de transport. Nus ou habillés ? Elle ne le savait pas.

— Aliénor ?

La voix d’Emily.

Elle et Jack affichaient exactement la même posture, les mains serrées autour de leurs tasses qui ne fumaient plus. Ils la fixaient d’un regard dur. Ou plutôt inquiet. C’était ça : de l’inquiétude. Elle reconnaissait le pli au-dessus du nez, entre les yeux.

— Oui ?

— À 9 heures, ça te va ? répéta Emily.

— De quoi tu parles ? Je n’écoutais pas.

— Le vol de 9 heures, pour rentrer à Falkenberg.

— Oui, ça me va.

Aliénor pressa son index sur les rainures bossues du bois.

— Tu viens avec moi ?

— Oui, bien sûr. Je viens avec toi.
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Espagne, El Palomar,

mardi 21 décembre 1937, 22 heures.



Teresa posa sa main sur l’épaule de Sole, qui s’apprêtait à se lever.

— Reste assise, Sole, s’il te plaît. Tu vas finir par me donner le tournis. Tu as passé la soirée debout !

— Je ne vais pas te laisser tout faire toute seule, quand même, hein ?

— Je ne veux plus te voir bouger de cette chaise.

— Il était bon, ton repas, ma Sole, dit Paco en étirant ses longs bras au-dessus de sa tête. Merci, mi amor, c’était une belle fête d’anniversaire.

Sole lui sourit en caressant son ventre volumineux qui tendait sa robe de laine.

— J’ai l’impression d’en avoir deux, souffla-t-elle en dessinant la circonférence du bout de ses doigts.

— Moi, je pense que tu n’en as qu’un, mais que c’est un costaud, intervint Teresa en débarrassant la table. Comme son père. Tu as vu la taille de Paco ?

— Tu vois, ma Sole, elle dit comme moi, ma sœur, renchérit Paco en terminant son verre de Montixelvo.

Le vin liquoreux enroba sa bouche de douceur et sa langue claqua de plaisir dans son palais.

Teresa déposa les couverts, les assiettes et les verres dans une bassine en métal.

— Tu es sûre que tu veux aller faire la vaisselle maintenant à la Font ? demanda Sole.

— Oui. Concha y sera sans doute aussi. On papotera un peu.

— La rivière doit être froide comme de la glace, Tere. Tu ne vas plus sentir tes doigts. Attends demain, non ?

Teresa et son frère échangèrent un regard. Ils ne pouvaient pas attendre le lendemain.

— Ça va me prendre un rien de temps, tu verras, répliqua-t-elle en soulevant la bassine pour la hisser sur sa tête.

La vaisselle tangua et cogna aux parois de la cuvette, occultant les premiers coups frappés à la porte. Les suivants furent plus vifs, invasifs.

Paco déploya sa grande carrure pour aller ouvrir. Il se figea aussitôt. Trois chemises bleues étaient plantées sur le seuil.

Teresa s’agrippa aux anses pour ne pas chavirer.

— Paco Morales Ramos, suivez-nous ! cracha le plus petit des trois en ajustant son couvre-chef, avant d’accrocher ses doigts à sa ceinture, à côté de son Astra 400.

Sole se leva, une main sous son ventre, l’autre en appui sur le dossier de sa chaise. Une pellicule de sueur glacée recouvrit sa nuque, puis sa lèvre supérieure. Elle serra la mâchoire pour ne pas claquer des dents.

Paco écarta les bras, ses larges paumes offertes au ciel, et força un sourire.

— Qu’est-ce qui se passe, señores ?

Le grand maigre lui attrapa le poignet.

— D’accord, d’accord, fit Paco.

— Soledad Melilla Santiago, aboya celui du milieu, certainement le chef, en direction de Sole.

Sans répondre, Sole se cramponna de plus belle au dossier de la chaise, son ventre se contractant par intermittence.

— C’est moi, Sole, s’interposa Teresa.

— Ah, oui ? C’est toi, Sole ? s’amusa le milicien.

Il fit un pas en avant, baissa son visage au niveau du sien et posa ses lèvres contre son oreille.

— Tu viens d’insulter El Caudillo : tu le sais, ça, espèce de traînée ? murmura-t-il. Tu crois qu’on ne mène pas notre enquête, hein, avant de venir cueillir les traîtres à l’Espagne ? Qu’on ne sait pas qui est rouge, comme ton frère, et qui est bleu, comme nous ? Tu crois qu’on ne sait pas que ce porc de républicain qu’est ton frère a engrossé sa femme ? Et que ton mari à toi, Teresa Morales Campos, est un maquisard ?

Teresa déglutit.

— Mon mari est mort depuis six mois, señor.

— Tu es sûre de ça, Tere ? Qu’il est mort depuis six mois, ton Tomeo ?

Elle frémit.

— Sí, señor.

Le chef acquiesça sans la quitter des yeux. Il rajusta sa veste en tirant sur ses manches, puis ordonna d’une voix placide à ses deux acolytes :

— Embarquez-les tous les trois.
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Angleterre, Londres, Harrow, Grant Road,

samedi 3 décembre 2016, 1 heure.



Le père de Jennifer Marsden avait contacté la police à 20 heures. Le Detective Chief Superintendent Jack Pearce avait immédiatement fait appel à Emily Roy. La profileuse avait interrogé les parents, puis les grands-parents, qui vivaient un peu plus bas dans la rue, ainsi que les voisins.

Emily questionna du regard Aliénor Lindbergh. Celle-ci acquiesça d’un bref signe de tête. La profileuse appuya sur la sonnette, puis recula de quelques pas.

La porte s’ouvrit presque aussitôt sur une femme d’une trentaine d’années, emmitouflée dans une robe de chambre beige, ses cheveux noirs noués en un chignon ébouriffé au sommet de son crâne.

— Martine Partridge ?

La jeune femme se gratta la joue de ses faux ongles bleus.

— Ouais…

Aliénor nota le sourire d’Emily. Les commissures relevées, les lèvres scellées. Elle l’enregistra.

— Je suis Emily Roy. Je travaille pour la Metropolitan Police. Voici ma collègue, Aliénor Lindbergh.

Martine Partridge détailla Aliénor.

— Vous les prenez au jardin d’enfants, vos recrues, ou quoi ? C’est pour Jennifer, je suppose.

Emily plissa les paupières.

— Désolée de vous importuner aussi tard, Martine, continua la profileuse. Je peux vous appeler Martine ?

— Je préfère Marty.

— Marty.

— C’est quoi, le nom de votre collègue ? J’ai pas compris.

— Elle s’appelle Aliénor.

— Alien-or ? Eh ben, ça aide pas dans la vie, un nom comme ça ! Ça a dû être votre fête à l’école, ou j’me trompe ?

Emily fronça les sourcils. Aliénor ravala sa réponse. C’était finalement ça, le plus difficile : savoir quand intervenir et quand se taire, même si l’interlocuteur attendait une réponse. Ces comportements à décoder en permanence. À comprendre, à intégrer. Une autre langue à maîtriser.

— C’est pas d’chez nous, ça, « Alien-or », continua Marty. Ça vient d’où ?

Emily acquiesça d’un signe discret du menton.

Aliénor imita le sourire d’Emily : commissures étirées, yeux fripés.

— C’est français, répondit-elle en essayant de maintenir son sourire.

— Français ? Ah ben, merde ! Vous avez pas l’accent, pourtant. Jamais j’vous aurais prise pour une froggy.

— Je ne suis pas française : je suis suédoise.

— Suédoise ? Eh ben, pourquoi faire simple…

— Quand avez-vous vu Jennifer pour la dernière fois, Marty ? intervint Emily.

— Ce matin. Elle passe devant chez nous pour attraper le 122 qui l’emmène au lycée.

Marty ouvrait et fermait les yeux avec la lenteur d’un lézard engourdi par le soleil.

Emily laissa peser le silence entre elles.

— Ça vous ennuierait de continuer notre conversation à l’intérieur ? demanda-t-elle.

Le regard de Marty s’accrocha à ses ongles pointus. Elle en lissa les contours du bout de l’index.

— Jones… Jones a besoin de se reposer…

— Jones ? Votre mari, Marty ?

— Oui, murmura-t-elle, comme si elle avait tout à coup peur de le réveiller.

— Je ferai attention, répliqua Emily en avançant vers elle.

Forcée de s’écarter, Marty la laissa passer. La profileuse se fraya un chemin jusque dans la cuisine et prit place à la petite table carrée où traînait la vaisselle du dîner. Marty se planta face à elle, comme si elle attendait des instructions. Emily l’invita à s’asseoir.

Aliénor était restée debout dans l’encadrement de la porte. Elle observait Marty jouer avec la ceinture de son peignoir qui serpentait sur ses cuisses.

— Vous ne l’avez pas vue revenir, cet après-midi ? enchaîna Emily.

— Hein ?

— Jennifer. Vous ne l’avez pas vue revenir du lycée, cet après-midi ?

— Non.

— Vous connaissez bien la famille Marsden, Marty ?

— Pas beaucoup… Comme une voisine, quoi, répondit-elle les yeux mi-clos.

— Jennifer ne s’est jamais arrêtée chez vous en revenant du collège, pour discuter ?

La bouche de Marty s’arqua vers le bas. Elle lissait sa robe de chambre du revers de la main.

— Vous croyez que j’aurais permis à une traînée de venir chez moi ? Dans ma maison ? Sous mon toit ?

La profileuse adressa un bref signe à Aliénor.

— Vous parlez de Jennifer, Marty ? demanda Emily alors qu’Aliénor disparaissait dans le couloir.

— Ouais, Jen… Miss Marsden, cracha-t-elle, la bouche tordue par une moue de mépris.

— Marty, est-ce qu’on pourrait parler à Jones ?

La jeune femme secoua la tête avec une obstination enfantine.

— Pourquoi pas, Marty ?

— Je veux pas que vous le voyiez comme ça, répondit-elle en enroulant la ceinture de son peignoir autour de son index.

— Comment, comme ça ?

— Comme il est là… Nu… Tout nu…

— Ce n’est pas très grave, Marty. On peut le couvrir. Pour que personne ne le voie.

— Oui… C’est vrai…

Marty pencha la tête de côté.

— Votre collègue… Je veux pas qu’elle monte avec nous.

— Ne vous inquiétez pas, Marty. On ne montera que toutes les deux. Ma collègue restera en bas. Ça vous va ?

— Oui, c’est bien… Comme ça, c’est bien.

Deux policiers armés pénétrèrent soudain dans la cuisine en aboyant des ordres. Marty les considéra d’un air hébété, puis s’allongea ventre à terre, jambes et bras écartés comme ils le lui demandaient.

Emily rejoignit deux autres agents à l’étage. Ils l’attendaient devant la salle de bains. Au sol, une demi-douzaine de bougies couchées sur le flanc trempaient dans des flaques rougeâtres. Un homme gisait dans la baignoire, immergé dans une eau sanguinolente, le bras droit pendant à l’extérieur et la tête avachie sur le torse. Face à lui se tenait Jennifer, la gorge tranchée.

Emily sortit de chez les Partridge.

Le Detective Chief Superintendent Jack Pearce l’attendait près d’un véhicule de patrouille. Aliénor était accroupie à côté de la voiture, les genoux sous le menton, et se balançait d’avant en arrière.

— Qu’est-ce qui se passe ? demanda la profileuse.

Son supérieur déglutit et s’humecta les lèvres. Quelques secondes d’hésitation. Emily se raidit. Dans ce silence, elle avait détecté la douleur. L’urgence.

Et la peur.
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Suède, Falkenberg,

vendredi 2 décembre 2016, 22 heures.



Kerstin aurait voulu suspendre le temps. Étreindre ces quelques secondes où elle pouvait encore retenir le monstre. Le cacher. Le dompter.

Mais elle n’avait plus eu le choix.

Elle avait alors pris Göran par la main, et elle lui avait ouvert les portes de son enfer.



Il s’était endormi, à présent, son Göran, la bouche écrasée contre l’oreiller, la tête enfoncée dans le puits du coussin. Aucun des mots qu’ils avaient échangés après leur dîner n’égratignait son sommeil : sa rage s’était effacée, lissée par la nuit. Il dormait avec la sérénité et l’abandon d’un enfant, le corps délivré du jour et engourdi de fatigue, tout entier à son repos.

Kerstin ôta son peignoir et se glissa dans le lit. Elle posa une main sur le torse grisonnant de son mari et lui embrassa l’épaule, là, à l’orée de l’aisselle, ce delta où elle lovait sa tête. Elle aurait aimé rabattre sa cuisse en équerre sur ses jambes, frémir au contact du muscle ferme et de la caresse des poils. L’enlacer jusqu’à ce que la peine l’inonde, après une bataille pour remonter à la surface d’elle-même. Elle les attendait, ces larmes. Qu’elles arrivent, hésitantes, timides, coulant goutte à goutte avec une certaine retenue déplacée, pour soudain déborder et se déverser en torrent. Hoqueter, paniquer en cherchant son souffle, tousser pour cracher la tristesse qui s’accrochait à sa gorge, voilà ce qu’elle aurait aimé. Chavirer de chagrin. Et se noyer dedans.

Kerstin frissonna et remonta la couette jusqu’à ses épaules. Elle détestait cette obscurité qui n’en finissait pas. Certains jours, le soleil ne semblait même pas se lever, et il fallait qu’il neige pour aider la lune à percer la nuit visqueuse. Leur chambre se trouvait au-dessus du salon, face à l’océan. Chaque soir, Kerstin savourait ce moment suspendu où elle le contemplait depuis son lit. La mer n’était jamais aussi grandiose qu’en été. Au seuil de l’hiver, elle dansait à peine. Le vent lui donnait la chair de poule en la hérissant de vaguelettes. La neige n’était peut-être pas loin, après tout.

Kerstin sortait de la douche lorsque Göran lui avait demandé d’aller dormir dans la chambre d’amis ; loin de lui. Il avait plié le plaid en fourrure, ôté les coussins du lit, placé le tout sur la méridienne avec les mêmes gestes placides et précis répétés chaque soir, mais sans lui adresser un regard. Kerstin avait quitté la chambre en peignoir. Ses cheveux mouillés ocellant le parquet de gouttes, elle avait fermé la porte et patienté avec la docilité d’une chienne punie. Le nez collé au chambranle, elle avait écouté le silence et attendu qu’il s’impose pour revenir se coucher auprès de son mari. De toute façon, elle ne savait pas dormir autrement.

Un poids lui lesta soudain le bas-ventre, comme si une lourde pierre lui écrasait le bassin. C’était là que sa colère cachée s’amassait. Un problème de « territoire », de « positionnement par rapport au groupe », d’après son acupuncteur. Soit. Pourquoi pas ? Ce soir, elle avait en effet la sensation d’être un atome perdu.

Kerstin massa son ventre en cercle du bout des doigts, assez longtemps pour limer les angles de la douleur.

Le matelas tangua : Göran venait de se retourner. Il avait basculé sur le flanc, les yeux rivés à la mer, loin de Kerstin. Elle attrapa sa main et mêla ses doigts aux siens, forçant sa paume moite contre celle de son mari. Elle chercha son regard, essayant de le ramener vers elle pour poser des mots sur ce qui s’était passé. Göran se dégagea comme si elle lui était étrangère, insupportable. Il repoussa la couette, bascula hors du lit et sortit de la pièce.

Kerstin ouvrit la bouche pour aspirer une goulée d’air ; l’atmosphère de la chambre était étouffante. Un feu grogna dans sa poitrine et partit à l’assaut de sa gorge. Le désespoir mêlé à la rage. Elle plaqua ses mains sur ses lèvres et se mit à hurler. Son visage se fripa sous les pleurs – des sanglots secs, sans larmes. Encore et toujours cette tristesse aride. Mais cette fois elle l’accueillit et s’y blottit comme elle l’aurait fait dans les bras de Göran, réfugiée dans son étreinte, tapie dans son ombre. Et sa peine l’engloutit.



Soudain, on lui enserra les chevilles. Son corps nu roula au sol, sa tête claqua contre le parquet. La douleur enserra son crâne comme un casque, irradiant jusque dans ses doigts. Ses ongles crissèrent contre les lattes de bois, se brisant au passage.

Un élancement fulgurant lui déchira la poitrine. Ses yeux écarquillés s’accrochèrent au plafond. Son corps se balançait de gauche à droite, au rythme des coups, mais la terreur avait pris le pas sur la douleur vorace qui lui labourait les poumons et le cou.

Louise Louise Louise Louise

Sa fille, endormie à l’autre bout du couloir.
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