Citations sur Au gré des jours (21)
Il n’y a guère de plus grande satisfaction que celle d’avoir passé quelques heures dans une conversation à bâtons rompus, pleine de vivacité, de renversements, de tête-à-queue, de retours en arrière, de mots d’esprit, de fous rires, de mines offusquées...avec une amie. Ce sont des moments de grâce et de grande vérité.
C’est cette capacité d’alterner aisément austérité et prospérité, maladie et santé, rage de vivre, peur de mourir, qui me donne force et résistance.
Je menai à bien une licence d’histoire et de géographie, seule valide pour les filles, alors qu’il existait deux licences séparées, l’une d’histoire, l’autre de géographie, pour les garçons, l’explication de cette différence étant que les filles n’étaient pas suffisamment armées intellectuellement pour les difficultés théoriques des questions difficiles de géographie ! Les lectrices d’aujourd’hui n’en croiront pas leurs yeux, mais c’est pourtant authentique.
Le rire instaure une liaison forte entre les humains parce qu’il concrétise un continuum entre les corps qui se régénèrent dans les soubresauts et l’esprit qui s’aiguise. Nous sommes heureux de rire ensemble parce que nous sentons et pensons de la même manière.
Rire jaune à l’histoire « drôle » du vieil académicien sourd à qui on crie dans l’oreille : « il y a une femme à l’Académie ! » et qui répond benoîtement : « ne pourrait-elle attendre qu’on ait levé la séance pour faire le ménage ? »
Humer l’air frais de la montagne narines au vent et yeux mi-clos, s’être refusée énergiquement en plein mois d’août à Ouessant à entrer dans l’eau dont son amie Claude sortait bleue de froid et ravie à la fois, aimer les appels du bout des doigts sur l’avant-bras de l’autre, les cheveux écartés du front, les sauts à deux dans la vague, le fruit offert, la cigarette allumée, le regard complice, tous les jolis gestes de la tendresse…
Se poser la question : est-ce que les autres se souviennent de vous avec la même émotion que vous qui vous souvenez d'eux ? , avez-vous compté pour eux, dans leur histoire, comme ils ont compté pour vous, quoique différemment bien sûr ?
penser à ses amis comme à des kaléidoscopes vivants dans tout leur chatoiement
caresser l'idée que, peut-être, sait-on jamais ?, tout compte fait, à tout prendre, pourquoi pas ?, à tout hasard, éventuellement, ce sentiment qui vous emplit de joie pourrait bien être ce qu'on appelle l'amour
Ne plus pouvoir décider seul de son temps est chose très douloureuse. Il n'est pas question ici des horaires qui structurent la vie consacrée au travail mais de l'ensemble réglé de la vie, quand elle dépend de la venue à des horaires aléatoires et de la présence de divers professionnels de santé. Il faut faire un apprentissage de l'attente. Une attente sans aucune autre fin qu'attendre le bon vouloir des autres.
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Chose très douloureuse peut-être, encombrante plutôt, mais ce qui serait très douloureux serait de n'avoir aucun visage connu à attendre, aucune personne sur qui compter, à saluer gaiement, par son nom, à qui sourire et qui vous répond avec les mêmes attentions que vous avez pour elle.