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Critique de Fabinou7


Le dramaturge norvégien, mort à Christiana (future Oslo), reste l'une des fécondes figures de la modernité qui métamorphose le théâtre de la fin du XIXème siècle.

Comme Strindberg ou Tchekhov, il se passionne pour les drames privés, domestiques et quotidiens, terres de grande fertilité romanesque et psychologique.

« Krogstad.  Les lois ne tiennent pas compte des mobiles.
Nora. Mais alors les lois sont mauvaises. »

Dans « Une maison de poupée », inscrite au registre de la « Mémoire du monde » de l'UNESCO, Henrik Ibsen prend fait et cause pour l'émancipation de la femme et l'égalité des sexes, pour laquelle beaucoup a été fait et tant reste encore à faire.

« Toi et papa vous avez été bien coupables envers moi. C'est vous qui êtes responsables que je ne sois bonne à rien (…) j'ai été grande poupée chez toi, comme j'avais été petite poupée chez papa. » L'oppression que subit Nora, l'épouse d'Helmer, n'est pas faite d'humiliations perverses, de violences physiques, elle est plus insidieuse et dans le même temps plus systémique. Il est question du statut de « poupée » de Nora c'est une métaphore de son incapacité juridique. Elle est traitée comme un agrément, dont le rôle est de divertir, d'élever les enfants, de recevoir les invités du couple, elle doit penser comme son époux, avoir ses goûts.

« Nora. Mes devoirs envers moi-même.
Helmer. Avant tout, tu es épouse et mère.
Nora. Je crois que je suis avant tout un être humain, avec les mêmes droits que toi. »

« Mais c'était bien amusant de travailler pour gagner de l'argent. Il me semblait presque que j'étais un homme. » Culturellement, l'homme est, à l'époque, celui qui subvient aux besoins du ménage, celui qui protège et lorsque Nora inverse les rôles dans un acte d'amour, pour protéger son mari, elle prend conscience de l'envergure de son humanité en dehors de son ménage. Des risques et responsabilités qu'il lui faut assumer et des ressources qu'elle a en elle pour y faire face, en toute autonomie. Bref la liberté. Pas de retour en arrière possible.

Il ne faut pourtant pas idéaliser la vie des hommes, et celle des femmes qui travailleront désormais toujours plus à l'extérieur : « il faut que je travaille pour supporter l'existence (…) quand on ne pense qu'à soi, cela détruit tout l'attrait du travail » dit l'un des personnages féminin de la pièce, laissant entendre que le travail est à la fois une béquille dans la solitude mais que cette solitude détruit tout l'attrait du travail dans le même temps. Quitter les fourneaux pour le bureau serait-il passer d'une aliénation l'autre ? Ce qui n'est pas sans rappeler le mot provocant de Marguerite Yourcenar, pour qui le fait d'avaler un café à sept heures du matin et se précipiter au bureau pour faire carrière était une idée de la libération des femmes qui la laissait “froide”.

Au temps d'Ibsen, une femme doit être un faire-valoir pour son époux, le suivre dans ses choix, le défendre dans ses turpitudes, s'oublier, elle n'a pas « d'égo », elle n'est qu'une « alouette » faite pour danser la tarentelle et faire choisir ses robes de bal à son époux. Ce sacrifice silencieux, entendu, des femmes, Nora l'aurait voulu pour elle, de la part de son mari :

« Helmer. Il n'y a personne qui offre son honneur pour l'être qu'il aime.
Nora. Des milliers de femmes l'on fait. »

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