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Marc Auchet (Traducteur)
EAN : 9782253052555
156 pages
Le Livre de Poche (05/06/2002)
3.97/5   731 notes
Résumé :
Dans cette maison où la femme est et n'est qu'une poupée, les hommes sont des pantins, veules et pleutres. Sans doute Nora incarne-t-elle une sorte de moment auroral du féminisme, alors qu'être, c'est sortir, partir. Et Ibsen, grâce à ce chef-d'œuvre, accède au panthéon de la littérature mondiale. Mais si sa poupée se met, sinon à vivre, du moins à le vouloir, au point de bousculer au passage l'alibi de l'instinct maternel, c'est qu'autour d'elle les hommes se meure... >Voir plus
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Une Maison de Poupée est de celles qui font date. Pourquoi ?
Parce qu'Henrik Ibsen installe avec cette pièce un théâtre qui annonce grandement Tchekhov, mais surtout, il envoie en pleine face une véritable bombe dans les convenances sociales de son époque.

Car, oui, c'est un grand artisan de la cause féministe, qu'il convient de saluer comme il se doit et de remercier, pour cette brèche, pour cette porte, qu'à sa façon, en 1879, il a essayé d'ouvrir, et qui ne trouvera la pleine ouverture qu'un siècle plus tard, avec la première grande poussée de libération sociale des femmes dans les années 1960-70.

Une ambiance à la Tchekhov, une tension qui monte, qui monte, qui monte, un fil qui s'étire dangereusement jusqu'à nous éclater au visage au moment voulu. Nora est une femme ordinaire de la petite bourgeoisie, appelée à devenir moyenne ou grande, suite à l'obtention d'un poste en vue dans une banque par son mari Torvald HELMER. Ceci fait suite à une période de vache maigre, où le couple a dû faire face à de relativement grandes privations financières.

Mais tout va bien, tout va mieux car Torvald a repris les rênes : il est désormais en mesure de pouvoir — très prochainement — assurer une opulence budgétaire à sa femme et à leurs trois enfants. Ainsi, Nora ne sera plus obligée de travailler en cachette pour sauver les apparences.

Car Torvald met un point d'honneur à faire vivre son foyer, à épargner sa petite femme, celle qu'il attend toujours dans le rôle qu'il lui donne, c'est-à-dire, d'être belle, de bonne humeur, toujours là où on l'attend, et de bien s'occuper des enfants... enfin, vous voyez le genre, n'est-ce pas ?

Seulement voilà, il y a un hic. Torvald s'était tellement surmené, il y a quelque temps, que sa santé fut en question et que les médecins avaient alors intimé l'ordre à Nora de lui faire faire un séjour thérapeutique de plusieurs mois en Italie, auprès des influences bienfaisantes de la Méditerranée...

Grand bain... euh non, grand bien lui fit et tout retrouva un cours satisfaisant, la preuve… mais, mais… au fait, j'y pense, j'y pense… d'où venait-il cet argent pour la cure en Italie ?...

Ah ! Je m'en voudrais de vous le faire savoir ici, mais sachez seulement qu'il est plus ou moins question de chantage, et que l'enjeu est le dévoilement du pot aux roses par Torvald, qui, lui, ignore tout des manigances de ce financement.

Et quel impact pourrait avoir la divulgation de cette nouvelle sur le tout nouveau personnage à responsabilités de la banque ? Que fera Torvald ? Et surtout, que fera Nora ? Quel déclic ? Quelle rupture cela engendrera-t-il, en elle, en eux, en tous ?

Ah ! Ah ! Voici du grand, grand art Monsieur Ibsen, et j'en redemande, moi, du comme ça. Et l'on comprend aisément que cette pièce en trois actes ait été inscrite au registre international " Mémoire du Monde " par l'UNESCO.

Bref, un incontournable pour toutes celles et tous ceux que la cause des femmes — et l'implication sociétale qui en découle — intéresse et/ou interpelle, ainsi que pour les fervents amateurs de très bon théâtre, indépendamment de ces questions. du moins, c'est mon avis, un avis de poupée, c'est-à-dire, pas grand-chose.

N. B. : on oublie aujourd'hui la vogue phénoménale qu'il y eut à un moment pour les maisons de poupées, qui n'était pas, loin s'en faut, réservées aux petites filles, mais plutôt bel et bien aux femmes adultes de la très bonne société à l'époque victorienne, dans et en dehors du royaume de Grande-Bretagne.
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Le dramaturge norvégien, mort à Christiana (future Oslo), reste l'une des fécondes figures de la modernité qui métamorphose le théâtre de la fin du XIXème siècle.

Comme Strindberg ou Tchekhov, il se passionne pour les drames privés, domestiques et quotidiens, terres de grande fertilité romanesque et psychologique.

« Krogstad.  Les lois ne tiennent pas compte des mobiles.
Nora. Mais alors les lois sont mauvaises. »

Dans « Une maison de poupée », inscrite au registre de la « Mémoire du monde » de l'UNESCO, Henrik Ibsen prend fait et cause pour l'émancipation de la femme et l'égalité des sexes, pour laquelle beaucoup a été fait et tant reste encore à faire.

« Toi et papa vous avez été bien coupables envers moi. C'est vous qui êtes responsables que je ne sois bonne à rien (…) j'ai été grande poupée chez toi, comme j'avais été petite poupée chez papa. » L'oppression que subit Nora, l'épouse d'Helmer, n'est pas faite d'humiliations perverses, de violences physiques, elle est plus insidieuse et dans le même temps plus systémique. Il est question du statut de « poupée » de Nora c'est une métaphore de son incapacité juridique. Elle est traitée comme un agrément, dont le rôle est de divertir, d'élever les enfants, de recevoir les invités du couple, elle doit penser comme son époux, avoir ses goûts.

« Nora. Mes devoirs envers moi-même.
Helmer. Avant tout, tu es épouse et mère.
Nora. Je crois que je suis avant tout un être humain, avec les mêmes droits que toi. »

« Mais c'était bien amusant de travailler pour gagner de l'argent. Il me semblait presque que j'étais un homme. » Culturellement, l'homme est, à l'époque, celui qui subvient aux besoins du ménage, celui qui protège et lorsque Nora inverse les rôles dans un acte d'amour, pour protéger son mari, elle prend conscience de l'envergure de son humanité en dehors de son ménage. Des risques et responsabilités qu'il lui faut assumer et des ressources qu'elle a en elle pour y faire face, en toute autonomie. Bref la liberté. Pas de retour en arrière possible.

Il ne faut pourtant pas idéaliser la vie des hommes, et celle des femmes qui travailleront désormais toujours plus à l'extérieur : « il faut que je travaille pour supporter l'existence (…) quand on ne pense qu'à soi, cela détruit tout l'attrait du travail » dit l'un des personnages féminin de la pièce, laissant entendre que le travail est à la fois une béquille dans la solitude mais que cette solitude détruit tout l'attrait du travail dans le même temps. Quitter les fourneaux pour le bureau serait-il passer d'une aliénation l'autre ? Ce qui n'est pas sans rappeler le mot provocant de Marguerite Yourcenar, pour qui le fait d'avaler un café à sept heures du matin et se précipiter au bureau pour faire carrière était une idée de la libération des femmes qui la laissait “froide”.

Au temps d'Ibsen, une femme doit être un faire-valoir pour son époux, le suivre dans ses choix, le défendre dans ses turpitudes, s'oublier, elle n'a pas « d'égo », elle n'est qu'une « alouette » faite pour danser la tarentelle et faire choisir ses robes de bal à son époux. Ce sacrifice silencieux, entendu, des femmes, Nora l'aurait voulu pour elle, de la part de son mari :

« Helmer. Il n'y a personne qui offre son honneur pour l'être qu'il aime.
Nora. Des milliers de femmes l'on fait. »

Qu'en pensez-vous ?
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Quoi de plus agréable lorsqu'on veut s'immerger dans l'atmosphère d'une pièce de théâtre vivante, intelligente, "engagée" et divertissante que de s'adresser à Henrik Ibsen, dramaturge norvégien du XIXème siècle, lequel réunit toutes les qualités énoncées précédemment... et d'autres encore, dans une pièce en trois actes dans laquelle se côtoient harmonieusement romantisme, réalisme et symbolisme ?
Pour parler de - Une maison de poupée -, il est souhaitable de connaître quelques éléments de la biographie de son auteur.
Ce Norvégien qui n'a pas obtenu ses galons sans avoir à franchir de nombreux obstacles, a connu l'insuccès, le doute, l'échec, le manque d'argent, l'exil, avant que grâce à l'influence constante, stimulante et persuasive de son épouse, son talent encouragé ne fasse de lui un dramaturge de renommée internationale et un des piliers de la "restauration littéraire" norvégienne plongée depuis plusieurs décennies dans un confort stagnant et réfractaire à la remise en question et au consentement à entamer sa révolution copernicienne.
La genèse de cette pièce s'inscrit dans la biographie d'Henrik Ibsen et de Suzannah Ibsen son épouse.
C'est sa femme qui, en effet, lit en 1869 le livre de John Stuart Mill - de l'assujettissement des femmes -, qui vient de paraître, et en parle à son époux avec enthousiasme et persuasion.
Dans cet ouvrage, le philosophe britannique défend la thèse selon laquelle « le principe qui régit les relations sociales entre les deux sexes - la subordination légale d'un sexe à l'autre - est mauvais en soi et constitue l'un des obstacles principaux à l'amélioration du genre humain. » Mill est un défenseur de l'émancipation des femmes et milite pour leur droit au suffrage.
Concomitament, les Ibsen ont une amie, l'écrivaine norvégienne Laura Petersen qui, mariée à un professeur danois victime d'une grave pathologie pulmonaire pour lequel elle emprunte à l'insu de ce dernier une forte somme d'argent afin qu'il puisse être soigné, et rédige une fausse lettre de change. Lorsque son mari l'apprend, il fait enfermer sa femme pour instabilité psychique.
Voici deux des éléments à l'origine de la pièce.
Ibsen faisant le constat qu' « une femme ne peut pas être elle-même dans la société contemporaine, c'est une société d'hommes avec des lois écrites par les hommes, dont les conseillers et les juges évaluent le comportement féminin à partir d'un point de vue masculin », il écrit - La maison de poupée -

La pièce se déroule donc en trois actes et a pour cadre et décor l'appartement des Helmer.
Dans ce salon va se jouer un drame qui va impliquer Helmer, avocat récemment promu directeur de sa banque, époux de Nora, très belle jeune femme, mère de trois jeunes enfants, le docteur Rank, ami d'enfance d'Helmer, et secrètement amoureux de la femme de son ami, Madame Linde, veuve et amie de Nora, Krogstad, un avoué véreux, usurier et ma^tre chanteur à ses heures, la bonne des Helmer ainsi qu'Anne-Marie, nourrice des enfants.
Nous sommes à la veille de Noël.
Nora rentre à la maison. Cette année, elle a pu faire de plus nombreux et plus jolis cadeaux à sa famille ; la promotion de son mari a donné une aisance au couple... qui en avait besoin.
Helmer surveille cependant le rapport de sa femme à l'argent, sa femme ( son alouette, son étourneau, son écureuil ) qu'il juge dispendieuse.
Pendant que Helmer planche, en tant que nouveau directeur de la banque, sur la "restructuration" ( terminologie au goût du jour ) du personnel, Nora reçoit la visite inattendue de Madame Linde, une vieille amie qu'elle n'a pas revue depuis dix ans.
Les deux femmes se confient sur ce "gap" temporel durant lequel...
Nora a dû, pour faire face à la maladie de son mari atteint d'une grave infection des bronches, emprunter, sans l'assentiment de ce dernier, une forte somme d'argent assortie de lourds intérêts, et ce faisant commettre un faux en écriture pour satisfaire à l'exigence d'une "caution" ( autre terminologie contemporaine ) pour pouvoir valider le prêt. Elle est confiante... elle est en passe de pouvoir rembourser très vite l'emprunt en question...
Madame Hilde s'inquiète de la situation "délicate" dans laquelle son amie s'est mise...
Elle, est veuve depuis peu et est venue en ville à la recherche d'un toit et d'un emploi.
Elle demande à Nora d'intercéder pour elle auprès d'Helmer.
Celui-ci accepte, engage Madame Hilde au détriment de Krogstad qui se voit licencié.
Fou de rage, celui qui est l'usurier de Nora vient la faire chanter. Il exige le remboursement du reste de l'emprunt avant terme et menace de révéler le faux en écriture passible de justice.
Nora ne sachant que faire demande l'aide de Madame Hilde dont naguère Krogstad fut follement amoureux.
Hélas, l'usurier persiste dans ses menaces.
Elle voit une dernière bouée de secours en la personne du docteur Rank... avant qu'elle ne puisse lui expliquer de quoi il retourne, Rank lui confesse l'aimer en secret depuis toujours.
Face à cet aveu Nora renonce à faire appel à lui.
La situation lui échappe, elle semble être perdue.
Le couple est invité à une soirée dansante chez les voisins du dessus, des notables influents.
Nora costumée doit y danser la tarentelle.
Dernière soirée de fête avant...
À vous la suite...

La pièce qui maîtrise tous les ressorts d'unité de lieu, de temps, ceux plus subtils à faire coexister que sont le romantisme, le réalisme et le symbolisme est un modèle parfait d'oeuvre théâtrale huilée, réglée comme un coucou suisse.
Les situations s'intriquent parfaitement les unes dans les autres, les dialogues ne souffrent d'aucune maladresse, incohérence, invraissemblance, exagération, théâtralisation, dramatisation.... Ils sont parfaitement adaptés tant du point de vue de la respiration de la pièce, de son souffle, de son rythme, de sa tonalité et du circonstanciel. La pièce d'Ibsen est un pur tableau vivant réalisé par un Maître.
Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si elle est inscrite au registre international Mémoire de l'UNESCO.
Ces quelques passages pour illustrer le propos d'Ibsen sur la condition féminine.
- HELMER. Nora, Nora, on voit bien que tu es une femme ! Mais soyons sérieux, Nora ; tu sais ce que je pense de ces choses. Pas de dettes ! Jamais d'emprunts !
- Nora. Bon, bon, comme tu veux, Torvald.
- HELMER. Allons, allons, il ne faut pas pour cela que la petite alouette laisse pendre ses ailes. Comment T L'écureuil est en train de bouder ? ( Il sort son porte-monnaie ) Nora, qu'est-ce que j'ai là-dedans à ton avis ?
- NORA. ( Elle se retourne brusquement ). de l'argent !
Dans ce court extrait Ibsen croque bien la relation de dominant-dominée entre Helmer dans "l'essentialisation" qui mène à la domination, à la dépendance et à l'infantilisation de Nora réduite à son genre et aux injonctions sociales et sociétales qu'elles induisent. Et Nora qui, apparemment, respecte les codes imposés.

Autre cliché réducteur auquel est associé la femme.
- HELMER. Oh ! si tu savais, j'ai eu suffisamment l'occasion de m'en rendre compte comme avocat. Presque tous ceux qui ont mené de bonne heure une existence dépravée ont eu une mère qui mentait.
- NORA. Pourquoi justement... les mères ?
- HELMER.Cela vient la plupart du temps des mères...

Réquisitoire sans concessions de Nora contre le patriarcat, Nora en voie d'émancipation.
- NORA. C'est pourtant vrai, Torvald. Lorsque j'habitais avec papa, il m'exposait toutes ses idées, et j'avais les mêmes idées que lui. Et si j'en avais d'autres, je les gardais pour moi, parce qu'il n'aurait pas aimé cela. Il m'appelait sa petite poupée, et il jouait avec moi comme je jouais avec mes poupées. Et puis je suis entrée dans ta maison...
- HELMER. En voilà une expression pour parler de notre mariage !
- NORA. ( Imperturbable ). Je veux dire que j'ai quitté les mains de papa pour passer dans les tiennes... Toi et papa, vous portez une lourde responsabilité à mon égard. C'est votre faute s'il n'est rien sorti de moi.
- HELMER. Comment, tu n'as pas été heureuse ?
- NORA. Non, j'ai été gaie. Et tu as toujours été très gentil avec moi. Mais notre foyer n'a pas été autre chose qu'une salle de jeux. Ici, chez toi, j'ai été femme-poupée, comme j'étais la petite poupée de papa, quand j'habitais chez lui. Et les enfants, à leur tour, ont été des poupées pour moi. Je trouvais dela amusant quand tu me prenais pour jouer avec moi, de même qu'ils trouvaient cela amusant quand je les prenais et que je jouais avec eux. Voilà ce qu'a été notre mariage, Torvald.

J'ai parlé de syncrétisme de genres harmonieux entre le romantisme, le réalisme et le symbolisme.
Trois exemples que vous retrouverez en (re)-lisant la pièce.
L'amour secret qui consume le pauvre docteur Rank... et l'utilisation comme procédé littéraire d'Ibsen du feu, de la flamme, de la fumée de l'allumette et du cigare (scène entre Nora et Rank ).
L'apothéose étant la fameuse "tarentelle" que doit danser et danse Nora, tarentelle dont elle espère que surgira "le prodige" espéré...
Lorsque Nora a fait appel à l'argent de Krostad, c'était pour emmener Helmer se soigner en Italie où, grâce à l'emprunt contracté par sa femme, le malade a pu séjourner un an au bord de la Méditerranée et guérir.
C'est là qu'ils ont fait connaissance de la tarentelle...
"La tarentelle est une danse italienne dont le nom est en rapport avec la tarentule, une araignée de la région de Tarente, dont la morsure peut entraîner la folie, quand elle ne provoque pas la mort. Une croyance populaire voulait qu'on ait quelque chance d'en guérir si l'on se livrait à une danse effrénée."
Ibsen qui a vécu longtemps en Italie a utilisé cette légende comme procédé théâtral d'une grande efficacité dramatique et symbolique dans sa pièce... dont je réalise que j'ai tant dit à son propos que je ne suis plus vraiment sûr de rendre une copie autre que brouillonne.
Tant pis !
Le troisième exemple était d'ordre lexical. Helmer appelle Nora "son étourneau"... dont la symbolique liée à l'écervelée, celle qui est sans cervelle, sans jugement, n'aura échappé à personne...
- Une maison de poupée - appartient à ces oeuvres qu'on qualifie d'incontournables... à raison !
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L'édition d'Une maison de poupée, du Livre de poche, comporte une longue introduction du traducteur. Ce préambule m'a été précieux pour appréhender un grand auteur dont j'ignorais tout.
La pièce est assez courte, mais riche. Les femmes, et en particulier Nora le personnage principal, sont au devant de la scène.
Ibsen propose une vision très avant-gardiste pour l'époque, du rôle et de la place de la femme dans une société bourgeoise et conformiste.
Qu'importe si le trait peut paraître parfois forcé, puisqu'il est au service de la grande cause féministe et qu'il bouscule les conventions séculaires.
On est au théâtre, que diable, et la voix doit porter!
Pour cela, deux personnages masculins sur trois se révèlent vils, lâches et décevants. Helmer, l'époux de Nora, reste l'homme de la pièce le plus marquant... Pas foncièrement mauvais, mais prisonnier d'un carcan de conventions et de préjugés qu'il paiera cher puisque Nora le quittera!
Une action inouïe, qui contraindra Ibsen à modifier la fin de Une maison de poupée pour sa représentation en Allemagne, tant elle heurte la morale de cette fin du 19e siècle.
Une Maison de poupée, c'est le coup de griffe dans le contrat établi entre le mari et son épouse et leurs rôles inégalitaires. C'est aussi un plaidoyer pour une parole et une communication sérieuse entre les époux... Communication trop tardive et qui ne saura changer la décision irrévocable de Nora.
Voilà. Une belle lecture qui enjoint à voir la pièce avec comédiens et décor pour donner vie et chair aux personnages.
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Un ouvrage que j'ai trouvé dans la médiathèque lors de mes déambulations dans le rayonnage "théâtre" car, je l'avoue, étant donné que j'en fais moi-même depuis peu, j'ai décidé de me nourrir de cette chose délicieuse que l'on appelle lecture de pièces de théâtre. Même s'il est vrai que celles-ci sont plutôt faites pour être vues, ou du moins entendues, leur lecture n'en est pas moins négligeable.

Ici, le lecteur fait la connaissance d'une jeune mère de famille, Nora, mariée à un influent avocat qui vient de se voir offrir le poste de directeur de banque. Nora est considérée par son mari, tantôt comme un oiseau fragile qu'il faut sans cesse conseiller, tantôt (et cela, elle le dit elle-même, comme une poupée dont il faut sans cesse s'occuper car incapable de prendre de justes décisions par elle-même). Mais l'image que s'en fait est tout autre. Elle ne veut plus être Nora l'épouse ou encore Nora la mère mais seulement Nora, un être humain comme les autres, capable de réflexion, de prises de décisions et surtout dotée de sentiments. Les retrouvailles avec sa vieille amie d'enfance, Kristine Linde, qui semble si épanouie dans sa vie, ne dépendant d'aucun homme (c'est d'ailleurs la raison pour laquelle elle cherche du travail afin de pouvoir se suffire à elle-même) vont jouer un rôle important dans la prise de conscience de Nora sur le rôle qu'elle joue exactement dans cette maison. Cette dernière ne sera cependant pas le seul facteur déclenchant de cette révélation. Il y a autre chose, quelque chose de bien plus grave (du moins est-ce grave aux yeux de son mari), un homme dont je ne vous révélerai pas l'identité ici ni ne vous dirai quelle rôle il a joué dans cette affaire qui va largement influencer la terrible décision que Nora va être amené à prendre...

J'espère avoir assez éveillé votre curiosité car je ne peux que vous recommander cette lecture dans laquelle le rôle de la femme dans la société est abordé mais aussi d'autres tels que l'argent ou encore l'identité. Un ouvrage qui, à mon avis, aborde donc des sujets intemporels et qui est loin d'être dépassé. Un très beau style d'écriture avec des personnages attachants. A découvrir !
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Citations et extraits (84) Voir plus Ajouter une citation
Au fond, c’est un plaisir d’attendre la terreur.
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Helmer - Est ce l'alouette qui gazouille ?
Nora - Oui, c'est elle.
Helmer - Est-ce l'écureuil qui frétille ?
Nora - c'est l'écureuil !
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Krogstad - Les lois ne tiennent pas compte des mobiles.
Nora - Mais alors les lois sont mauvaises.
Krogstad - Mauvaises ou non... Si je porte ce papier à la justice c'est d'après elles que vous serez jugée.
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L'étourneau est un animal très gentil, mais que d'argent il lui faut. C'est incroyable ce qu'il en coûte à un homme de posséder un étourneau. (Helmer).
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HELMER : Nora... que signifie tout cela ? Cet air figé...
NORA : Assieds-toi. Ce sera long. J'ai à m'entretenir de beaucoup de choses avec toi.
HELMER : Tu me fais peur, Nora. Et je ne te comprends pas.
NORA : En effet, c'est bien cela : tu ne me comprends pas. Et je ne t'ai jamais compris non plus... jusqu'à ce soir. Non, ne m'interromps pas. Écoute simplement ce que je te dis... Nous allons mettre les choses au point, Torvald.
HELMER : Que veux-tu dire par là ?
[...]
NORA : Cela fait huit ans que nous sommes mariés. Est-ce que tu ne te rends pas compte que c'est la première fois que nous parlons sérieusement ensemble, toi et moi, en tant que mari et femme ?
HELMER : Sérieusement... mais qu'est-ce que cela veut dire ?
NORA : Pendant dix ans... et même plus... dès le moment où nous nous sommes rencontrés pour la première fois, nous n'avons jamais échangé une seule parole sérieuse concernant des sujets sérieux.
HELMER : Fallait-il que je passe mon temps à te tenir au courant de soucis que, de toute façon, tu ne pouvais pas m'aider à porter ?
NORA : Je ne parle pas de soucis. Je veux dire que nous n'avons jamais pris le temps de chercher sérieusement ensemble à approfondir une question.
HELMER : Mais voyons, ma chère Nora, est-ce que cela aurait été des choses pour toi ?
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