Citations sur Les cahiers ukrainiens : Mémoires du temps de l'URSS (15)
"La tristesse arrive en traître, quand on affronte le sujet de l'avenir."
Deux mots sur Ania...
Elena me parle d'Ania qui, il y quelques années, s'est fait surprendre par une averse dans la ville d'Energidar, où il y avait une centrale atomique.
Une fois rentrée chez elle, elle a pris une douche et s'est mise à faire son train-train quotidien.
Puis elle est allée se coucher.
Quand elle s'est réveillée, elle était chauve. Ses cheveux sur l'oreiller. Les médecins disent que ce qu'il y avait dans l'air, et que la centrale rejetait, a réagi avec l'eau.
Elle avait 30 ans, Ania. Elena ne l'a plus revue. Elle ne sait pas si elle est encore en vie. Les gens de villes comme Energodar ou Tchernobyl ont l'interdiction de parler de ce qui s'y passe.
Au début pour moi, l'Ukraine était quelque chose d'indistinct, un nuage appartenant au firmament soviétique. Et puis j'ai commencé à la visiter et les noms exotiques que j'entendais chez moi depuis l'enfance, Kiev, Odessa, Poltava, Sébastopol, Leopoli, Yalta, sont devenus des paysages concrets. Je me demandais sincèrement comment était la vie pendant et après le communisme là-bas.
L'Ukraine d'aujourd'hui cherche l'appui international pour que l'Holodomor soit reconnu au palais de verre de l'ONU comme génocide. La Russie, membre permanent, a droit de veto. Elle menace de l'exercer.
Nous sommes le 26 septembre 2008, l'Ukraine retire sa motion.
Reconnaissant la famine comme crime contre l'humanité : Argentine, Azerbaïdjan, Belgique, Canada, Estonie, Géorgie, Italie, Lettonie, Lituanie, Moldavie, Pologne, États-Unis, Hongrie, Vatican.
Indépendance ou pas, les Ukrainiens de cette partie du monde se disent "Russes". C'est comme si les racines de celle qui a été l'Union soviétique, la SOVIETSKI SOÏOUZ, vivaient et palpitaient encore.
Un immense territoire habité par des pratiques et des conventions qui ont survécu, incrustations d'un passé qui ne veut pas s'éteindre.
Il suffit de gratter un peu pour entendre s'écouler, sous la discrétion soviétique, l'envie d'être écouté.
Je me suis retrouvé là, au moment où avait lieu le vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin.
J'ai tendu l'oreille pour écouter les histoires et j'ai décidé de les dessiner. Je ne pouvais tout simplement pas les garder pour moi. Ce sont des histoires vraies, de personnes rencontrées par hasard dans la rue à qui il a été donné de vivre à l'étroit dans l'étreinte du rideau de fer.
Et ils ne rêvent même pas, car personne ne leur a appris. Il n'y a pas d'espoir, rien que de l'étourdissement et de la confusion.
Il suffit de gratter un peu pour entendre s’écouter, sous la discrétion soviétique, l’envie d’être écouté. Je me suis retrouvé là au moment où avait lieu le vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin. J’ai tendu l’oreille pour écouter les histoires et j’ai décidé de les dessiner. Je ne pouvais tout simplement pas les garder pour moi. Ce sont des histoires vraies de personnes rencontrées par hasard dans la rue à qui il a été donné de vivre à l’étroit dans l’étreinte du rideau de fer
A prendre la douche dans une cabine en bois, dehors -on s'habitue à tout- la patience des paysans ukrainiens est proverbiale.
District de Vyssokopolsk. Le 16 février, à Zagradovka, le jeune Nikolaï, 13 ans, est mort dans la famille d’un paysan pauvre. Sa mère F. et sa voisine Anna S. ont coupé le cadavre en morceaux et l’ont servi avec les plats qui avaient été préparés. Presque la totalité du corps a été consommée. Il ne restait que la tête, les pieds et une partie de l’épaule, une paume de la main, la colonne vertébrale t quelques côtes. Toutres les parties du corps ont été retrouvées dans le sous-sol de l’isba. F. a expliqué son geste par l’absence totale de nourriture. Il lui reste trois enfants, tous gonflés. Une aide a été apportée à cette famille
Les appartements que je vois ne sont pas pour les ukrainiens. Eux, ils habitent les immenses banlieues sombres à une heure du centre. Il me dit que le marché immobilier est géré par la mafia. Deux familles qui font la pluie et le beau temps décident les prix et excluent des centaines de milliers de personnes normales.