Son but n'était pas de remplir les prisons de désespérés. Ce qu'il voulait, c'était découvrir la vérité dans chacune des enquêtes qu'il menait.
Sa barbe en broussaille dissimulait sa bouche lorsqu'il parlait, ce qui était souvent le cas puisque l'homme était bavard et semblait avoir une opinion sur tout ce qui existait entre ciel et terre.
- C'est à eux que va ma compassion. Ce sont eux qui doivent affronter l'événement et s'en accommoder. Ils doivent faire face au deuil et la douleur de l'absence les accompagne jusqu'à la fin de leur vie. Ce sont ceux qui restent auxquels je m'intéresse le plus.
En revanche, j'aimerais bien que la version officielle du destin de Matthildur demeure inchangée. Si c'est possible. Il y a dans l'histoire de sa disparition une certaine beauté. Même si elle est fondée sur un satané mensonge...
Autour de lui, il fait froid, il fait noir. Des pensées, des silhouettes et des événements passés lui traversent constamment l’esprit sans qu’il puisse rien y faire. Il a énormément de peine à distinguer les lieux et les époques. Il est partout et nulle part en un seul et même instant.
Allongé dans sa chambre, il est envahit par un calme étrange après cette piqûre. C’est en vain qu’il continue de lutter. On dirait que le sang cesse de couler dans ses veines et ses pensées se perdent dans le brouillard.
Le médecin lui explique ce qu’il va faire, mais il l’entend à peine. Il se débat et crie tout ce qu’il peut jusqu’au moment où on l’attrape pour le remettre dans le lit. Le médecin suggère à mi-voix une solution à sa mère qui hoche la tête d’un air résigné. Il aperçoit la seringue entre ses mains, sent la douleur de la piqûre qui entre dans son bras et calme peu à peu.
Assise sur le bord du lit, sa mère lui caresse le front. Elle a l’air infiniment triste et il ferait n’importe quoi pour mettre fin à sa mélancolie.
- Tu peux nous dire quelque chose sur ton frère ? murmure-t-elle
Il monta jusqu'à la maison de retraite d'Egilsstadir en réfléchissant à ceux qui connaissaient l'histoire de Jakob et de Matthildur.
Ces derniers étaient vieux quand ils n'avaient pas atteint un âge très avancé, comme Erza et Ninna.
Bientôt, cette histoire, les destins de ces gens, leurs vies emplies de deuils et de victoires, sombreraient dans l'oubli.
Tout cela finirait par disparaître dans une éternité de silence, enterré dans les tombes d'un cimetière où personne ne viendrait à l'exception du vent sous lequel les brins d'herbe frissonnent.
Telle la flamme fragile d'une bougie, les souvenirs vacillaient dans son esprit.
Bientôt, cette histoire, les destins de ces gens, leurs vies emplies de deuils et de victoires, sombreraient dans l'oubli. Tout cela finirait par disparaître dans une éternité de silence, enterré dans les tombes d'un cimetière où personne ne viendrait à l'exception du vent sous lequel les brins d'herbe frissonnent.
Il sait que le grattement qu'il entend sous la terre n'est que le fruit de son imagination, les gémissements lointains qui lui parviennent sont des bruits qui n'existent qu'à l'intérieur de sa tête.Il connaît leur origine et ne les redoute pas.
Sa conscience sombre à nouveau dans le néant.
D'autres sons l'assaillent .des paroles qu'il a prononcées dans un passé lointain, avec lesquelles il a vécu toute sa vie , mais qu'il n'aurait jamais dû laisser sortir de sa bouche.
des mots tellement insignifiants.
Des mots tellement gigantesques.
- Mais pour les autres ?
- Quels autres ?
- Ceux qui restent
- Et alors ?
- C’est à eux que va ma compassion. Ce sont eux qui doivent affronter l’événement et s’en accommoder. Ils doivent faire face au deuil et la douleur de l’absence les accompagne jusqu’à la fin de leur vie. Ce sont ceux qui restent auxquels je m’intéresse le plus.