Citations sur A la lumière d'hiver - Leçons - Chants d'en bas - Pensées s.. (71)
Écoute, écoute mieux, derrière
tous les murs, à travers le vacarme croissant
qui est en toi et hors de toi,
écoute... Et puise dans l'eau invisible
où peut-être boivent encore d'invisibles bêtes
après d'autres, depuis toujours, qui sont venues,
silencieuses, blanches, lentes, au couchant
(ayant été dès l'aube obéissantes au soleil sur le grand pré),
laper cette lumière qui ne s'éteint pas la nuit
mais seulement se couvre d'ombre à peine,
comme se couvrent les troupeaux d'un manteau de sommeil.
(extrait de "À la lumière d'hiver").
"A ramasser les tessons du temps, on ne fait pas l'éternité.
Le dos se voûte seulement comme aux glaneuses. On ne voit plus que les labours massifs et les traces de la charrue à travers notre tombe patiente."
Déjà ce n'est plus lui.
Souffle arraché : méconnaissable.
Cadavre. Un météore nous est moins lointain.
Qu'on emporte cela.
Un homme - ce hasard aérien
plus grêle sous la foudre qu'insecte de verre et de tulle,
ce rocher de bonté grondeuse et de sourire,
ce vase plus lourd à mesure de travaux, de souvenirs -,
arrachez-lui le souffle : pourriture.
Qui se venge, et de quoi, par ce crachat ?
Ah, qu'on nettoie ce lieu.
(p. 51)
Si tu avais moins peur
tu ne ferais plus d’ombre sur tes pas.
Qu'on me le montre, celui qui aurait conquis la certitude
et qui rayonnerait à partir de là dans la paix
comme une montagne qui s'éteint la dernière
et ne frémît jamais sous la pesée de la nuit.
Je suis comme quelqu'un qui creuse dans la brume
à la recherche de ce qui échappe à la brume
pour avoir entendu un peu plus loin des pas
et des paroles entre des passants échangées...
A ramasser les tessons du temps,
on ne fait pas l'éternité.
(p. 146)
Qu’on me le montre, celui qui aurait conquis la certitude
et qui rayonnerait à partir de là dans la paix
comme une montagne qui s’éteint la dernière
et ne frémit jamais sous la pesée de la nuit.
Ainsi écoute-t-on la voix de ces moines
qui vivaient sur le toit du monde
au fond de temples pareils à des forts
dressés sur le passage des vents inconnus
dont leurs conques ramassent la violence.
Leur gong tonne
ou c'est un glacier qui se fend
(...)
Leurs voix à la mesure des montagnes
les tenaient-elles en respect ?
Mais chaque jour peut-être, on peut reprendre
le filet déchiré, maille après maille,
et ce serait, dans l'espace plus haut,
comme recoudre, astre à astre, la nuit...