La Petite Femelle

Je crois bien que ma famille est maudite et moi aussi.

WOW. J’écris ces mots quelques minutes après avoir terminé la lecture du livre. Quelle peine j’ai eu en lisant les dernières pages.
L’histourz fut vraiment prenante, parfois déstabilisante. On oublie trop souvent quelle chance nous avions, nous femme, d’avoir obtenu une certaine liberté au cours des dizaines dernières années.
Merci à l’auteur de m’avoir fait prendre du recul sur certaines choses, de m’avoir fait rend prendre conscience à quel point les humais peuvent être honteux, à quel point la justice peut être tournée en faveur ou défaveur de quelqu’un. Étant étudiante en droit, ce livre ne me sera que bénéfique et m’a fait souligner l’importance qu’avait la réflexion avant l’action, avant le jugement.
Enfin, je place ce livre dans mon top 3, avec Belle Du Seigneur d’Albert Cohen et l'inévitable roman d’Albert Camus, l’Etranger.

Voila, la petite femelle est en cage. Dehors on va pouvoir s'en donner à cœur joie, elle va comprendre sa douleur, c'est parti mon kiki.C 'est maintenant que vieux messieurs et dames aigries vont passer à l'action.

Pauline, bien entendu, refuse la demande en mariage. Gentiment — elle est attendrie et flattée — mais sans ambiguïté. C'est bien trop tôt, elle a beaucoup de choses à faire d'abord, ses études de médecine en particulier, et surtout elle n'est pas sûre que Félix le doux, le calme, le limpide, soit le genre d'homme qui lui convienne, dont elle ait besoin ou envie. Plus clairement, elle n'est toujours pas amoureuse de lui. (On lui reprochera jusqu'à l'écœurement : "Vous n'aimiez pas Félix Bailly !". Mais est-ce aussi intolérable ? On ne doit coucher qu'avec des gens qu'on aime à la folie ? On doit aimer corps et âme dès le début, pour être une femme respectable ?)

- Et lui, il t'a comprise?
- Oui, il m'a comprise, lui. Je suis une petite femelle, Il faut me laisser faire ce que j'ai envie.

Les pompiers, tous, du chef aux bons sapeurs de base, feront bravement face aux penseurs et à leurs témoins fiables. Le lieutenant Gérard : « Il ne fait aucun doute pour moi que la femme a effectivement tenté de se suicider. Il ne s’agissait pas d’une mise en scène. » Le caporal Pierre Oudot : « Je suis convaincu que cette femme a bien tenté de mettre fin à ses jours. » Le sergent Robert Jan : « Sa tentative de suicide ne fait aucun doute. » Le sergent Jean Jolidon : « Il ne pouvait pas s’agir d’une mise en scène. » Ces hommes sont, pour certains, pompiers depuis vingt ans. Des suicides au gaz, des malheureux qui ont l’écume aux lèvres et se pissent dessus, qu’il faut ranimer pendant plus d’une demi-heure, ils en ont vu des brouettes et des camions (rouges), on la leur fait pas, c’est pas une gamine de quatrième année qui va les mystifier. Et pourtant, on s’en taperait la tête contre les murs que ça ne servirait à rien, dans l’acte d’accusation comme au tribunal en plein procès, on balaiera sans honte leur expertise, comme si des marmots donnaient leur avis sur la politique monétaire européenne. Qu’est-ce qu’ils y connaissent à la psychologie, ces gars-là ?

Elle aimait beaucoup la musique classique, ce qui ne l’empêchait pas de faire admirablement bien la cuisine, de confectionner des robes et d’arranger son intérieur avec beaucoup de goût.

Ce qu’on attaque et salit chez ces femmes-boucs émissaires, ce n’est pas leur esprit de traîtresses, de complices de l’ennemi, on ne les emprisonne pas, on ne les traite pas de collabos, mais de salopes et de putains, on vise avant tout leur féminité, c’est par là qu’elles sont coupables et sur cela qu’on peut se défouler. Tout ce qui les différencie des hommes est bon à prendre : leurs cheveux longs qu’on supprime, leurs robes qu’on déchire, leur corps qu’on expose en public, leurs seins qu’on couvre de croix gammées …

Mais déformer ostensiblement la réalité pour laisser croire que la vérité se cache quelque part sous la fiction, c’est précisément ce dont parlait Paul Valéry, plus faux que faux, pire que le mensonge. - p.655

Il y a plus faux que le faux, c’est le mélange du vrai et du faux. ( Paul Valery)