CELLE QUI PARLE raconte la vie trépidante de Malinalli, une autre Pocahontas, qui était fille de chef Maya et vécut au XVIe siècle dans la péninsule du Yucatán.
Son histoire, contrariée par les ennemis de son peuple qui furent d'abord les Aztèques puis les Conquistadores espagnols, fut d'une exceptionnelle richesse.
Elle fera beaucoup mieux que s'inscrire au sein de la grande Histoire collective ; sa volonté, son indépendance d'esprit et son féminisme naissant, vont devenir des biens communs propres à toutes les femmes.
Le scénario s'inspire de la vie réelle d'une jeune femme courageuse, intelligente, cultivée et libre malgré son statut d'esclave qui lui pesa fortement pendant une grande partie de sa vie.
Elle était douée de la faculté d'apprendre et de parler plusieurs langues. Une grande partie de son intelligence sociale singulière - ce qui lui permit de bien comprendre les autres (leurs pensées et leurs sentiments) et d'agir efficacement - lui vinrent des discussions qu'elle eut enfant et adolescente avec sa grand-mère érudite et perspicace.
Femme adulte, elle a osé parler en son nom propre et, plus important encore, elle a su dire non aux hommes de son clan, puis à ses bourreaux et à ses maîtres. Plus tard elle saura aussi se dévouer pour épargner de la peine à ses compagnes d'infortune, ou les sauver.
Elle emmènera dans son sillage bien d'autres femmes de son époque et certainement, par un effet de rebond, celles des siècles à venir.
Et pourtant…
A la mort de son père, Malinalli, à peine pubère, est vendue par les dignitaires de son clan comme esclave afin travailler dans les champs de maïs d'un clan plus puissant. Mais dès sa puberté, elle doit assouvir les caprices sexuels de son nouveau maître.
Miriam, la jeune femme juive qui accompagne les Conquistadores, a été convertie de force à la religion catholique après que l'Inquisition eut assassiné ses parents. Elle fut emprisonnée dans un cachot putride et violée chaque jour par un prêtre inquisiteur. Son avis sur la docte morale chrétienne était à jamais gravé. Elle croisera les pas Malinalli pour leur plus grand bien à toutes les deux.
Jerónimo, un jeune homme Espagnol, seul survivant d'un naufrage près de la côté du Ma'Ya'ab, a été recueilli et soumis en esclavage pendant huit années dans une tribu dont il apprit la langue Maya, les us et coutumes et que, contrairement aux usages en Europe, la propreté du corps ne nuisait en rien. Il y fera aussi la connaissance du panthéon Maya et rendra depuis un culte secret au dieu aztèque de l'eau, Tláloc « celui qui fait ruisseler », « celui qui sème ».
Un culte secret… car en ce temps là, les Espagnols aveuglés par un Christ vengeur et inquisiteur n'aimaient pas les dieux différents de celui qui régentait - dans le sang - la religion qu'ils avaient embrassée.
Les parcours parallèles de Jerónimo et Malinalli comme traducteurs auprès des puissants fut pour eux l'occasion de partager leurs richesses sociales, sociétales.
Alicia Jaraba, l'auteur, croit fermement au pouvoir absolu de la parole et de la communication.
Son héroïne est vraiment formidable !
Cet album est décidément une très bonne pioche !!!