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3,97

sur 88 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Pak Jun Do et la Corée du Nord. Combien de vies volées comme la sienne ? Cette émouvante histoire nous guide à travers La Corée du Nord, au gré des turpitudes et des caprices d'un «Cher Dirigeant» assoiffé de reconnaissance et de pouvoir (tout comme l'ont étés ses aînés et comme l'est, sans nul doute, son successeur). Jun Do ressent, plus qu'il ne sait, la vacuité de son existence dans ce pays étrange où tout semble irréel. Tellement irréel que, bientôt, il finit par adopter l'identité d'un autre dans l'unique but de survivre. Sa nouvelle identité va le conduire dans une situation plus inconfortable encore, mais va lui offrir un luxe que peu de de ses concitoyens, y compris «le Cher Dirigeant» en personne, n'ont l'occasion de découvrir en ce pays mystificateur. Ce luxe, que nous autres occidentaux, considérons comme acquis, s'appelle l'Amour. Et cet amour, bien qu'il le conduise vers un inéluctable et funeste destin, va lui permettre de comprendre le sens du mot «Liberté». Amour et Liberté, notions et sentiments formellement interdits et sévèrement réprouvés dans ce pays sans foi ni loi où règnent en maîtres la souffrance, la peur, la faim et l'ignorance. Jun Do, être étonnamment clairvoyant, au coeur pur et loyal, va permettre, par son sacrifice, à son Amour Sun Moon et à ses enfants de goûter pour de bon cette Liberté. Liberté chérie de nous tous, et que pour rien au monde, il ne faut accepter de perdre. Roman instructif, édifiant et bouleversant à la fois, La Vie Volée de Jun Do est à lire absolument !
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Kim Jong-Il est mort trop un an tôt pour pouvoir le lire, puisque «La vie volée de Jun Do», roman dont il est l'un des principaux personnages, est paru en 2012, et en septembre 2014 en français (traduction Antoine Cazé, Éditions de l'Olivier).

Mais le héros de ce livre n'est pas le Cher Dirigeant mais Jun Do, un John Doe de Corée du Nord dont la vie est volée dès l'enfance avec la disparition de sa mère cantatrice, une enfance passée dans l'orphelinat "Lendemains Infinis" dont son père est le Directeur. Son père ne peut se permettre la moindre trace de favoritisme, Pak Jun Do est donc élevé comme les autres orphelins et sa vie ne vaut rien. Dès quatorze ans il rejoint l'armée un rat de tunnel, un soldat entraîné au combat dans l'obscurité totale. Il est ensuite envoyé en expédition pour kidnapper des citoyens japonais pour le compte du régime, puis en mission dans le fond de la cale d'un chalutier de pêche, le Junma, afin d'y espionner les communications étrangères.
Au cours de ces mésaventures qui font sans doute dévier ses convictions intimes et croître son humanité, ce qui n'est que suggéré dans cette première partie du roman intitulée «Biographie de Jun Do», un titre sur lequel on reviendra peut-être à la fin du livre en se demandant par qui et pour qui cette biographie a été écrite, Jun Do réussit à échapper à la famine, au froid mortel et aux chausse-trappes monstrueux du régime, et même à être reconnu comme héros de la nation, jusqu'à l'échec d'une mission en Amérique pour le Cher Dirigeant.

Dans la deuxième partie, une année plus tard, le régime a laissé Jun Do sauver sa peau et devenir un autre, sans mesurer qui il est vraiment devenu intérieurement.

«Là d'où nous venons, lui rappela-t-il, les histoires sont purement factuelles. Si l'Etat déclare qu'un paysan est un musicien virtuose, alors tout le monde ferait mieux de l'appeler maestro. Et en secret, il serait bien avisé de commencer à prendre des leçons de piano. Pour nous, l'histoire est plus importante que l'individu. Si un homme et son histoire ne s'accordent pas bien, c'est l'homme qu'il faut changer.»

La narration éclate alors en plusieurs voix, la propagande du régime et l'histoire officielle diffusée par la radio, que tout citoyen doit écouter en permanence, la voix d'un inquisiteur qui torture et interroge les prisonniers pour que rien de leur biographie n'échappe au régime, et enfin les souvenirs de Jun Do, de ses compagnons de route, de sa détention et de son amour pour Sun Moon, l'actrice la plus populaire de Corée du Nord.

«En prison, quand les pierres lui broyaient les phalanges ou qu'un coup de trique s'abattait sur sa nuque, il essayait de se transporter sur le pont du «Junma», doucement bercé par le roulis. Quand les aiguilles électriques du froid lui transperçaient les doigts, il tentait de se lover au creux de l'aria chantée par la diva, d'entrer dans sa voix même. Il s'efforçait de s'envelopper dans le jaune vif de la robe appartenant à la femme du deuxième second ou de rabattre la courtepointe américaine en capuchon sur sa tête, mais rien de tout cela ne marchait vraiment. Ce fut seulement après avoir vu le film avec Sun Moon qu'il put enfin disposer d'une réserve – elle le protégeait de tout.»

Extrêmement ambitieux et très impressionnant, «La vie volée de Jun Do» réussit le tour de force de construire un roman, fiction et dystopie pour le lecteur occidental, tout en étant totalement fondé sur ce qu'Adam Johnson a pu recueillir comme informations et apprendre lui-même, lors d'une unique visite en Corée du Nord. Il réussit à évoquer la vie quotidienne et l'intimité impossible des hommes de ce pays, à ne jamais tomber dans la caricature manichéenne, à dire la noirceur et l'horreur insoutenable des orphelinats, des famines, des camps de prisonnier et de la torture, tout en maniant un humour né de situations qui nous semblent totalement absurdes. Il réussit enfin avec Jun Do à construire un héros magnifique, qui s'est construit seul et dans le noir total.

«Et bien qu'il n'eût jamais su ce qui était arrivé au maître de l'orphelinat, Jun Do sentait que son père n'était plus de ce monde. Pour combattre dans l'obscurité totale, ce n'était pas différent : il fallait percevoir son adversaire, sentir sa présence et ne jamais se servir de son imagination. Les ténèbres au fond de votre crâne sont un puits que votre imagination emplit de récits sans aucun rapport avec la véritable obscurité régnant autour de vous.»
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Que ressent-on à la lecture de ce livre ? Une foule d'émotions qui varie de l'incompréhension à la révolte, de l'humour à la haine.
Pourquoi ? Parce que cette histoire ne peut laisser personne indifférent, surtout à notre époque où la plupart des pays se battent pour la démocratie et contre toute forme de dictature. Mais il existe un endroit, quelque part au-dessus du 38ème parallèle, où vivre est un combat quotidien, où chaque souffle et regard non conforme peut vous entraîner dans un camp pénitentiaire, dans une salle de torture ou mieux à une mort rapide mais douloureuse.
Il s'agit de l'histoire de Jun Do, un héros attachant qui a mené dans ce récit une vie palpitante et souvent malheureuse : marqué dans son enfance par une existence des plus misérables dans un orphelinat de province, il s'engage dans l'armée comme rat de tunnel puis devient kidnappeur professionnel et opérateur radio sur un chalutier. J'aimerai tout vous raconter mais je m'arrête là pour vous laisser découvrir la suite.
L'auteur essaie de décrire le régime politique nord-coréen : dictature de Kim-Jong-Il basée sur la propagande, les mensonges quotidiens diffusés par les haut-parleurs et la délation ; conditions de vie pathétiques de la population partagée entre la famine, la peur de se faire arrêter et un travail harassant ; les terribles camps pénitentiaires ou bagnes où sont envoyés les « dissidents » au régime.
Mais l'auteur ne sombre jamais dans le pathétique et même les situations les plus tragiques et absurdes sont traitées avec un brin d'humour. Et c'est ce qui m'a marqué dans ce livre !
Son style d'écriture est frais, dynamique et riche et mélange de multiples points de vue. On passe du récit à la 1ère personne à celui des commentaires incisifs des haut-parleurs sans presque sentir la transition. Bien que certains passages soient très durs, l'auteur arrive toujours à distiller un infime espoir et relâche la tension au moment où celle-ci est à son paroxysme. Il a un talent indéniable de conteur et d'écrivain et j''ai eu beaucoup de plaisir à lire cet ouvrage !
Conclusion: un prix Pulitzer bien mérité et un excellent livre à découvrir ! To be read? YES!
Lien : http://leslecturesdehanta.co..
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Jun do, un quasi-orphelin Nord Coréen, exécute sans ciller tous les ordres qui lui sont donnés, c'est un citoyen patriotique oeuvrant pour son pays, la « nation la plus démocratique du monde »,
Cependant, lors d'une mission d'espionnage en mer, il fait preuve de bravoure et est récompensé, son statut passe ainsi de simple citoyen à celui de « héros de la patrie ». Suite à cela il est affilié à une équipe qui aura pour mission d'aller au Texas afin de préparer la séance de pourparler entre la Corée du Nord et les États-Unis. Jun Do rencontrera le sénateur, il découvrira un monde très différent, une nouvelle définition de la liberté.

A son retour il est envoyé en prison et aux travaux forcés, pour s'en sortir il usurpe l'identité d'un puissant personnage, un homme détenant la ceinture dorée de takwaendo et qui épousa Sun Moon, l'actrice nationale. Ne pouvant sortir de son rôle il sera présenté au Cher Dirigeant Kim Jong-Il en personne, et fera la connaissance de la magnifique Sun Moon.

Ce roman est à la fois une fenêtre ouverte sur la Corée du Nord, nation emprisonnée par une politique absurde et cruelle, véritable énigme pour le reste du monde. Ainsi qu'une histoire d'amour douce-amère, Jun do tombera amoureux de Sun Moon et tentera de lui décrocher la lune.
La vie volée de Jun Do mérite indéniablement le prix Pulitzer à bien des égards. Adam Johnson a réalisé un véritable travail de journaliste, c'est réellement un livre que je ne pouvais plus lâcher tant il est obsédant, la curiosité est piquée à vif et l'écriture est parfaite.
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L'auteur a une plume telle qu'il ne vous laisse pas indemne. Qu'il vous emporte dans le doute, la peur, la tristesse mais aussi dans les joies de la vie et la liberté.
C'est déstabilisant et attristant surtout si cette histoire est proche de la réalité. La Corée du Nord … pays inconnu et connu à la fois. Une telle pauvreté, un tel dévouement, un tel dénuement semble tellement impossible pour nous européens … tellement loin de nous.
Nous suivons Jun Do dans une première partie, jeune "presque"-orphelin engagé dans l'armée. Est-il besoin de préciser de force ? Et, dans une deuxième partie, un "presque"-héros, le commandant Ga. Tous deux habitent en Corée du Nord mais pas tout à fait avec le même statut. Sont-ils plus à l'abris pour autant ?
Tellement réel qu'il en parait irréel. Tellement dur que la moindre once de tendresse vous fait fondre. Et ce doute instiller par la propagande … La vraie histoire est-elle celle des hauts-parleurs ou celle de Jun Do. Qui vole qui ? Où est l'espoir ? dans ces photos peut-être.

Challenge Multi Défis 2016 : Un livre avec une usurpation d'identité
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Un roman dur, dur comme peut l être la vie d un jeune orphelin coréen sous le régime de dictature qui sévit alors en Corée du Nord.

Le personnage de Jun Do est attachant et offre au lecteur l occasion de voyager dans les coulisses du règne de Kim-Jong-Il où se mêle intérêts, corruption et sentiments subtiles, un vrai défi mais aussi une mine d or pour le lecteur qui s intéresse à l histoire de cette nation si particulière.

L écriture est fluide et plaisante , et l anatomie du roman divisé en deux parties semble toute indiquée une fois pénétrés les mystères de la vie volée de Jun Do.
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J'aurai voulu faire une longue critique à l'image de ce pavé fascinant qu'est ce livre. Mais en fait, je crois que je me contenterais de dire que ce livre aurait pu s'appeler "Forrest Gump en Corée du Nord". En effet, c'est exactement la sensation que j'ai eu en le lisant : on suit la vie de Jun Do, du début à la "fin" dans le régime dictatorial de Corée du Nord. Et c'est suffisamment bien écrit pour qu'on puisse parfois s'indigner, mais aussi en rire, parfois s'énerver, et parfois se laisser porter par l'histoire. Ce livre est fascinant, Jun Do est fascinant, et grâce à l'auteur, on touche du doigt ce que peut faire la propagande et le fonctionnement souterrain d'un monde sans liberté.
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J'ai acheté ce livre avant de faire un voyage en Corée du sud pour me mettre dans l'ambiance. L'intrigue du livre se déroule en Corée du Nord et donc l'ambiance n'est évidemment pas la même. J'ai trouvé ce livre extraordinaire tant par le fait que l'histoire se nourrit d'épisodes connus et avérés. On ne sait pas ce qui est reel de ce qui ne l'est pas mais on se doute que dans cet état tout pourrait être possible. L'intrigue est extrêmement bien ficelée et il est compliqué d'arrêter la lecture de ce livre passionnant.
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“Citizens, gather ‘round your loudspeakers, for we bring important updates!”

Un livre impressionnant, coup de poing.


Corée du Nord, Pyongyang, état et ville de tous les fantasmes puisqu'il s'agit d'un des derniers pays les plus fermés au monde. Un jeune garçon décrit sa vie dans un orphelinat, il se dit non orphelin et que le maitre de l'orphelinat est son père, d'où le titre du livre. Il décrit une vie de cauchemar, où ces orphelins sont de la main d'oeuvre sans aucune valeur. Il décrit la famine qui s'abat sur eux. Famine qui est appelée « La marche ardue » par les politiques.

On le retrouve ensuite soldat dans des tunnels sans lumière, puis kidnappeur de Japonais(e)s et enfin pour être récompensé de ses bons et loyaux services espion sur une épave qui sillonne la mer. Dans ces deux dernières activités, il va nous décrire des rencontres tant Coréennes qu'avec les Japonais / les Américains. Il y est également question de malades que l'on achève en leur prélevant leur sang. La rencontre avec les Américains va être épique et la disparition du drapeau et des portraits du leader adoré va amener une série d'événements qui vont transformer la vie de Jun Do (remarque en Anglais un John Doe est un quidam comme serait en France un Martin Durand). Il va se retrouver au Texas où il notera que la différence entre son pays et les US tient au fait que les citoyens sont motivés par la peur (le bâton) dans son pays et aux US par les récompenses (la carotte). Suite à cette excursion aux US, on retrouve notre héro dans un goulag où il ne devrait pas survivre. Mais il va être pris sous la protection d'une ancienne et cela le sauvera.

Commence alors la deuxième partie, où je n'irai pas plus loin pour ne pas vous gâcher votre plaisir. Mais sachez que c'est une énième et ultime vie qui commence pour notre Jun Do. La seconde partie est moins intéressante que la première. Mais elle à l'avantage de présenter l'autre coté de la médaille. On passe du coté des puissants, de cette cour qui ne souffre pas de la faim mais qui peut disparaître pour des peccadilles.

C'est un livre qui vous prend et que vous ne lâcherez pas. Je ne sais à quel point ce que décrit cet auteur est proche de la réalité et à quel point c'est de la propagande mais dans tous les cas on s'y croit. Les scènes de torture sont nombreuses mais l'auteur ne s'y appesantit pas tant que cela. On perçoit l'absence de raison de tout cela. Y est décrit une vie qui est rythmée et décidée par le haut. Où le citoyen n'est rien, sa vie est entre les mains de hautes instances. Les hauts parleurs sont partout, les femmes sont distribuées au bon vouloir de quelques uns. On devient un héro ou un renégat sans trop savoir pourquoi. On peut être l'un puis l'autre.

Ce livre a eu le prix Pulizer de la fiction. C'est un livre à lire pour les âmes pas trop sensibles.

Par contre je serais réellement curieuse de savoir ce qui est dans le domaine du possible et de celui de la fiction pure (trépanation avec des clous, etc) et ce qu'en pense des Nord Corééns qui ont pu fuir. J'ai reconnu des éléments semblables (questions pour savoir si le haut parleur du voisin est branché) à ceux que l'on m'avait racontés pour l'ex Allemagne de l'Est.
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