Sur une toile du peintre Emmanuel de Witte, une femme apparaît, de dos, dans un intérieur hollandais bourgeois de la ville de Delft. Qui est-elle ? Pourquoi ne voit-on pas son visage ?
A partir de ce beau tableau un peu mystérieux,
Gaëlle Josse imagine la destinée de cette femme, Magda van Beyeren. le roman est son journal intime. Si l'histoire ne couvre qu'un mois, de la mi-novembre à la mi-décembre 1667, il plonge dans les souvenirs de Magda. La voilà enfant. Elle accompagne son père, administrateur de la Compagnie des Indes. Les bateaux la fascinent, ainsi que les produits rares que cachent leurs ventres rebondis. Adolescente, elle se penche sur les livres de comptes. Puis, elle épouse un capitaine qui reprend le commerce et lui donne une nombreuse progéniture. Hélas, l'existence des enfants est si brève ! Et puis arrive déjà le soir de sa vie...
En quelques coups de pinceau délicats,
Gaëlle Josse brosse le commerce avec l'Orient, les porcelaines, les épices, le thé. Elle redonne souffle aux artistes de l'époque : Emmanuel de Witte, bien sûr, dont la toile intimiste s'anime soudain. Là, au fond du couloir, avez-vous remarqué la servante qui lave le carrelage ? C'est Sarah, une simplette, le souffre-douleur de l'orgueilleuse et dure Catherina.
Et Vermeer. Il a réalisé de beaux portraits de femmes. Voici une amie de Magda, « Rebecca Beekman, l'épouse d'Abraham Beekman, le banquier de la Donkestraat (…) On la voit affairée à peser de l'or et des perles, grosse de son huitième enfant. »
La musique, douce, chaleureuse, berce ces pages. Magda joue de l'épinette, Elisabeth, sa fille, a une voix magnifique, qui, un jour, a bouleversé un hôte prestigieux de ses parents, et Nicolaes Brouwer, son maître de musique, ne brûle que pour son art.
Ce court roman est un vrai bijou qui m'a transportée au XVIIe siècle et m'a permis, un peu, de réaliser un rêve : pénétrer dans un tableau.