La mère d'
Ahmed Kalouaz a 84 ans, vit seule en Isère, perd un peu la mémoire et doit déménager du fait d'une mesure d'expulsion.
Ahmed Kalouaz décide de lui rendre ce qui sera peut-être une dernière visite, et pour cela, il choisit de traverser la France à mobylette, la vieille mobylette que son père avait achetée il y a 40 ans pour aller travailler. Ce choix, même s'il est convaincu de sa nécessité, il ne l'explique guère. Nous suivons son parcours par petites touches discrètes, quelques lieux, quelques rencontres.
Au fil des heures de route, il nous raconte sa mère, mère illettrée d'un fils écrivain, mère religieuse d'un fils athée, mère exilée d'un fils ancré en France, mais mère aimée malgré (à cause de?) tout cela. Au fil du voyage, l'auteur enchaîne les vignettes aléatoires, sans lien chronologique, sur l'enfance algérienne miséreuse, le mariage non choisi, les deux enfants morts décidant de l'exil en France pour nourrir sa descendance (quatorze enfants soigneusement élevés et préservés, puis partis un à un ), les taudis, le rejet. La fatigue au quotidien mêlée aux petites joies communes , les retours réguliers au pays…Et cet arrachement final de l'expulsion.
Rien de bien original si l'on prend une à une chacune de ces anecdotes de vie, mais leur somme constitue un ensemble cohérent et tendre, pudique, qui est tout à la fois l'histoire commune de tous les migrants,et l'histoire unique d'une mère aimée.
Ahmed Kalouaz rejette tout pathos, mais il ressort, une fois refermé ce petit livre, comme une émotion à la fois forte et douce.