« Sur mon lit de mort, quel regard jetterai-je sur la vie que j’avais eue : me sentirai-je heureuse parce que tel soir, j’étais la femme la mieux habillée du restaurant où il m’invitait ?
Je ne possédais rien, rien d'autre que des vêtements et un sac Chanel. Je venais d'un peuple qui avait été dépossédé.
Ce que dit de Acosta, et qui me fait mal, c'est qu'elle ne comprend pas comment elle, issue d'une riche famille d'aristocrates espagnols, a pu s'abaisser à aimer une "servante suédoise" qui, comme tous les pauvres, ne s'intéresse qu'à des sujets médiocres, et dont le vrai visage, derrière le masque de cinéma, est forcément vulgaire.
La mode se faisait le bras armé d'une société pour retourner la peau de tout mouvement contestataire, pour n'en garder qu'une enveloppe vide à vendre au plus offrant.
Une seule burka avait le pouvoir de soustraire à un être sa liberté, de lui nier son droit le plus important : avoir le choix.
La question que pose Breakfast at Tiffany's est bien plus profonde que ce que l'on a bien voulu y voir : de quoi faut-il s'amputer, quand on est issu d'origine modeste, pour changer de classe sociale ? Et se faire croire qu'on vit, enfin, dans un rêve... Quel prix à payer ?
Pourquoi s'achète-t-on des vêtements ? Pour plaire, séduire, piéger l'autre sexuellement, pour jouer le jeu social qu'on s'est choisi ou qu'on nous a assigné ? Pour changer de peau et devenir une autre, se mettre en scène mentalement dans une vie parfaite ? Se faire belle ou s'enlaidir, se rendre attirante ou repoussante, ou se parer d'une armure ou encore vouloir être déshabillée ?
Un gardien eut pitié d’elle. Il avait conservé la chemise du mort, et face à la détresse de la jeune femme, la lui rendit volontiers. Alors, elle prit le vêtement et l’enterra à la place du corps.
Garbo fut la femme la plus riche de Hollywood, la première femme à être mieux payée que les hommes, le premier mythe du XXe siècle. Et pourtant, ça n’avait pas suffi. Quelque chose lui avait échappé.
Ecrire, couper, monter, assembler, coudre : le couturier a des gestes communs avec le chirurgien, le cinéaste et l’écrivain.