Esprit d'hiver.
« Quelque chose les avait suivis de Russie jusqu'à chez eux » cette lancinante antienne, devient obsédante dès les premières pages. Hitch' recommandait qu'on ne racontât pas la fin de « psycho », je vous recommande de ne même pas raconter le début de ce livre exceptionnel.
Après avoir tourné la dernière page de « suspicius river » je m'interrogeais sur le caractère sublime de l'auteure, qui pour moi, seule, mérite cet(te) épicène (avec peut-être Poppy Z.Brite dans un tout autre genre).
Laura Kasischke (faites le prononcer à votre libraire pour vous amuser) est une femme qui parle aux hommes, contrairement à beaucoup d'autres.
Et vivre dans la tête, dans le corps, d'une femme est pour un homme une expérience rare, inoubliable qui dégage dans le bas-côté les « angoteries » ( pour ne pas nommer les autres) malsaines.
Une écriture qui n'a rien perdu de sa précision et du mal qu'elle procure à l'« âme » depuis le premier récit abominable et ravageur de 1999, vous enferme dans cet incroyable drame vécu presque seule par une femme deshabitée, perdue dans ses mensonges, une mère abandonnée avec son rôti tiédissant dans la cuisine.
L'extrême lenteur, comme de la neige qui tombe en silence à travers la fenêtre, est une fascination, une sorte de délice littéraire qu'on rencontre peu.
Alors, bien sûr, « suspicius river » confine au chef d'oeuvre en tant que premier pas, mais là,c'est l'oeuvre qui dépasse le chef et je me dis qu'il faudra tout lire. du reste tout est déjà commandé du disponible.
Un livre à lire d'urgence, au coin du feu, en regardant furtivement son jardin si d'aventure on en possède un, et une expérience inoubliable.