Dès la deuxième ligne d'
Esprit d'hiver, on sait qu'il y a un problème. Il est même souligné par une phrase en italique : « Quelque chose les avait suivis depuis la Russie jusque chez eux. » le 25 décembre, Holly et Éric se réveillent tard (trop de rhum dans le lait de poule la veille…) alors qu'ils reçoivent toute la famille d'Éric et des amis pour le repas de midi. Leur fille Tatiana (Tatty, 15 ans) n'est pas encore réveillée, et Éric part en catastrophe pour aller récupérer ses parents à l'aéroport. Et à partir de là, on va assister à une lente et progressive dégradation de la situation pendant que, dehors, la chute de neige se transforme en tempête qui isole complètement Holly et Tatiana…
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Dans ce roman divisé en « parties » séparées par un astérisque,
Laura Kasischke nous propose un huis clos dérangeant. Un narrateur à la troisième personne nous permet de voir par les yeux d'Holly. Il n'y aura aucun changement de point de vue, et nous n'aurons accès qu'aux pensées d'Holly. de fréquents retours en arrière nous font vivre, entre autres, l'adoption de Tatiana qu'Éric et Holly sont allés chercher dans un orphelinat en Sibérie. Nous partagerons les inquiétudes d'Holly, ses doutes sur ses qualités de mère, sa culpabilité, son enfance douloureuse, ses problèmes avec certains voisins, sa frustration d'avoir arrêté d'écrire ses poèmes, ses hésitations sur l'attitude à adopter devant sa merveilleuse et magnifique petite fille qui se transforme en adolescente grognon et exigeante, son amour pour elle, qu'elle sait dévorant : Holly se surveille, ne veut pas perturber Tatty, etc. Et lentement, progressivement, le lecteur comprend que le problème annoncé est bien réel. Les bizarreries s'enchaînent, la situation se modifie légèrement, le désarroi d'Holly s'accentue, l'attitude de Tatiana empire.
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J'ai beaucoup aimé ce livre dans lequel je suis retournée picorer à peine la dernière page tournée… N'allez surtout pas lire la fin : vous perdriez, je crois, une part du plaisir que vous réserve ce roman. La « surprise » m'a rappelé Usuel Suspects : on revoit le film, et on se dit que tout était là, déjà en place, et que, bon, bien sûr, on avait bien compris que quelque chose était étrange, mais sans pouvoir mettre le doigt dessus, si ce n'est quelques pages avant le final… Et plus j'avançais dans ma lecture, plus j'avais envie d'accélérer le rythme. Je ne l'ai pas fait, et j'en suis bien contente ! C'est mon premier
Kasischke. Il y en aura d'autres… Une auteure d'une grande finesse alliée à beaucoup d'habileté.