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Citations sur Kiruna (28)

J'ai cherché une mine comme on cherche un point de passage dans le sous-sol terrestre, un accès aux formes qui le structurent, aux matières qui le composent, aux mouvements qui l'animent, à ce qu'il recèle de trésors et de ténèbres, à ce qu'il suscite comme convoitise et précipite comme invention. Je l'ai cherché comme on cherche la porte de cet espace inconnu sur quoi s'appuient nos existences, espace dont je ne sais s'il est vide ou plein, s'il est creusé d'alvéoles, de grottes ou de galeries, percé de tunnels ou aménagé de bunkers, s'il est habité, s'il est vivant. J'ai voulu descendre dans la mine, passer la tête sous la peau de la planète comme on passe la tête sous la surface de la mer afin d'entrer dans une autre réalité aussi déterminante et invisible que l'est l'intérieur du corps humain. J'ai voulu vivre cette expérience, j'ai voulu l'écrire : je suis partie à Kiruna.
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En un siècle d’existence, l’exploitation intensive du gisement a modifié le sous-sol de la ville : un milliard de tonnes de minerai ont été sorties de terre créant un réseau souterrain de voies, de tunnels, de boyaux, et tout cela a contribué, on s’en doute, à une déstabilisation générale du terrain. Affaissements, éboulis, fractures : plus la mine s’étend sous terre et plus les fissures apparaissent en surface.
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Je veux connaître la vie d'Alice, je veux savoir comment la gamine qui a grandi dans un village de la Beauce, sur les affleurements calcaires du Bassin parisien, fille unique d'un couple de pharmaciens cossus, se retrouve à moins de trente ans géologue à Kiruna. J'imagine la fillette savante et dégourdie, toujours dehors à s'aventurer sur ce sol fertile, cette couche de limon et de lœss, collectionneuse de minéraux et de mystères enfouis façon héroïne du Club des cinq, disposant sur l'étagère de sa chambre des pierres aux noms merveilleux qu'elle récite par cœur, les calcites et les quartz, les schistes et les basaltes, les amphiboles fibreuses, les améthystes violettes, les gypses limpides, les muscovites feuilletées, les fluorines et les pyrites, le soufre.
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Elle s’exprime, je l’entends, avec un léger accent anglo-saxon : cinq ans à vivre et travailler en anglais, son français a bougé.
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J’ai voulu descendre dans la mine, passer la tête sous la peau de la planète comme on passe la tête sous la surface de la mer afin d’entrer dans une autre réalité aussi déterminante et invisible que l’est l’intérieur du corps humain. J’ai voulu vivre cette expérience, j’ai voulu l’écrire : je suis partie à Kiruna.
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D'emblée, j’éprouve devant ce récit, devant ses documents, ses machines, ces dioramas et ces objets, une impression de linéarité, d'évolution constante, inéluctable comme si rien ne s'était jamais vraiment opposé à ce dessin industriel, à ce mouvement en avant que l'on appelle aussi "la marche du Progrès", et qui occulte la dose de croyance, de convoitise, de courage et de violence qu’il fallut pour imaginer la mine et la rendre réelle – la dose de folie aussi.
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J’ai imaginé Kiruna, j’ai prononcé son nom. Je me suis figuré un site industriel hors de proportion, illisble, un espace blanc, souillé fumant, et quelque part, enfoui, un trésor. J’ai pensé au grand Nord, la terre continentale, plate et dilatée, j’ai visualisé le cercle polaire, cette ligne fictive tracée sur le globe terrestre à hauteur du 63e parallèle et qui, à elle seule, produisait des visions, la pénombre bleutée, le froid, la glace, le renne et l’ours blanc, les hommes rares, la fourrure, le tambour des lapons et les aurores boréales, mais aussi les polars scandinaves crépusculaires et sanglants, les gerçures et la neige. Des visages ont rappliqué eux aussi, prélevés dans des films et, à ceux, si beaux, des héroïnes suédoises bergmaniennes – Liv Ullmann ou Bibi Andersson, par exemple -, j’ai préféré appeler celui de Rooney Mara, forte incarnation de Lisbeth Salander dans l’adaptation de Millénium au cinéma – cheveux noir corbeau, piercings et tatouages, la robustesse dans un corps frêle, la rationalité transgressive, la solitude de la hackeuse bipolaire. J’ai choisi Kiruna parmi toutes les mines parce qu’elle est la plus grande mine de fer du monde et d’emblée, j’ai frémi devant ce que cette pole position augurait de colossal, de sonore, de démesuré. Mais je n’ai pas noté tout de suite que, située à 145 km au nord du cercle polaire et couvrant une superficie d’environ 20 000 km², il s’agissait à la fois de la ville la plus septentrionale de Suède et de la commune la plus étendue du pays. De fait, Kiruna n’est pas une ville mais un territoire, ce qui est différent.
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Une fois au sommet, la voiture s’arrête sur un terre-plein et je sors pour voir, mordue aussitôt par le froid qui brûle à cette altitude, percutée par les rafales de vent, glaciales, abrasives. Devant moi s’étend la Laponie, immense, bosselée, étale et pourtant rétive, baignée de cette lumière bleutée qui laisse toujours croire que le ciel pourrait s’éclaircir. Là-bas, le pôle.
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