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Citations sur Les Souterrains (13)

Dans le froid automne gris du Colorado et du Wyoming j'avais travaillé la terre et regardé des vagabonds indiens aux lèvres de vautour, aux mâchoires fluides et au visage ridé sortir soudain du bled près de la voie et avancer lentement dans la grande ombre de la lumière en portant des sacs-fardeaux et de la camelote, en causant tranquillement entre eux et si éloignés des soucis des ouvriers agricoles, même de ceux des Noirs des rues de Cheyenne et de Denver, des Japonais et de l'ensemble des Arméniens minoritaires et des Mexicains de tout l'Ouest, que regarder un groupe de trois ou quatre Indiens traverser un champ est pour les sens quelque chose d'incroyable comme un rêve - on pense "Ce doit être des Indiens - y a pas une âme qui les regarde - ils vont par là - personne n'y fait attention - pas grande importance de quel côté ils vont - une réserve ? " Qu'est-ce qu'ils ont dans ces sacs en papier brun ? " et c'est seulement avec un grand effort qu'on se rend compte " mais c'étaient eux les habitants de ce pays et, sous ces cieux immenses, ils ont été les tracasseurs et les protecteurs et les pleureurs des épouses de nations entières groupées autour de tentes - maintenant le rail qui court par-dessus les os de leurs ancêtres les entraîne plus loin pointé vers l'infini, spectres d'humanité cheminant d'un pas léger à la surface d'un sol si profondément suppuré par le concentré de leur souffrance qu'il suffit de creuser à un pied de profondeur pour découvrir une main d'enfant. - Passe le train de luxe avec un vrombissement de Diesel, broum, broum, les Indiens lèvent tout juste les yeux - je les vois disparaître comme des tâches - et assis maintenant dans la chambre à l'éclairage rouge de San Francisco avec la douce Marlou je songe " Et c'est ton père que j'ai vu dans le désert gris, englouti par la nuit - de ses sucs sont issus tes lèvres, tes yeux pleins de souffrance et de chagrin, et ne pourrons-nous pas connaître son nom ou nommer son destin ? " - sa petite main brune est blottie dans la mienne, les ongles de ses doigts sont plus clairs que sa peau, ceux de ses orteils aussi et, déchaussée, elle a un pied blotti entre mes cuisses au chaud et nous parlons, nous commençons notre roman au niveau le plus profond de l'amour et des histoires de respect et de honte. - Car la plus grande clé du courage est la honte et les visages flous dans le train qui passe ne voient rien d’autre dans la plaine que des silhouettes de vagabonds qui, en roulant, disparaissent hors de vue...
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Perchée sur une barrière de bois, attendant - pour voir si une idée viendrait du dehors lui dire quoi faire ensuite et pleine de portée et de promesses car il fallait que ce soit bien et une fois seulement - "Un seul faux pas dans le mauvais sens..." le sens de son impulsion, devrait-elle sauter d'un côté ou de l'autre de la barrière ? l'espace sans fin s'étendait dans quatre sens, des hommes morne-chapeautés allaient à leur travail dans des rues luisantes sans se soucier de la jeune fille nue cachée dans la brume, ou, s'ils s'étaient approchés et l'avaient vue, ils auraient fait cercle autour d'elle sans la toucher en attendant simplement que vienne la flicaille pour l'emmener et de tous leurs yeux las, indifférents, éteints par la pâle honte détaillant chaque partie de son corps - l'enfant nue. - Plus elle reste perchée sur sa barrière, moins elle aura le pouvoir à la fin de vraiment en descendre et de se décider...

La nuit pluvieuse clapote sur tout, embrasse partout hommes, femmes et villes en un flot unique de poésie triste -...  Elle est juchée sur la barrière, la pluie fine pose des perles sur ses épaules brunes, des étoiles dans ses cheveux, ses yeux farouches indiens-à -présent regardent fixement le Noir avec un peu de brume qui se dégage de sa bouche brune, la détresse comme des cristaux de glace sur la couverture des poneys de ses ancêtres indiens, la bruine sur le village autrefois et la fumée-de-misère qui sortait en rampant de sous le sol et quand une mère mélancolique pilait des glands pour faire de la bouillie en des millénaires sans espoir.

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Un des romans dans lequel j’ai eu le plus de difficultés à citer un passage. Et pourquoi pas la description d’une Amérique bâtie sur la misère et l’oppression : «… Souci pour son père, parce que j’étais allé là-bas et m’étais assis par terre et avais vu le rail, l’acier de l’Amérique, qui couvrait le sol plein des os de vieux Indiens et d’Américains Primitifs. ― Dans le froid automne gris du Colorado et du Wyoming j’avais travaillé la terre et regardé des vagabonds indiens aux lèvres de vautour, aux mâchoires fluides et aux visage ridé sortir soudain du bled près de la voie et avancer lentement dans la grande ombre de la lumière en portant des sacs-fardeaux et de la camelote, en causant tranquillement entre eux et si éloignés des soucis des ouvriers agricoles, même de ceux des Noirs des rues de Cheyenne et de Denver, des Japonais et de l’ensemble des Arméniens minoritaires et des Mexicains de tout l’Ouest, que regarder un groupe de trois ou quatre Indiens traverser un champ est pour les sens quelque chose d’incroyable comme un rêve ― on pense « Ce doit être des Indiens ― y a pas une âme qui les regarde ― ils vont par là ― personne n’y fait attention ― pas grande importance de quel côté ils vont ― un réserve ? « Qu’est-ce qu’ils ont dans ces sacs en papier brun ? » et c’est seulement avec un grand effort qu’on se rend compte » mais c’était eux les habitants de ce pays et, sous ces cieux immenses, ils ont été les tracasseurs et les protecteurs et les pleureurs des épouses de nations entières groupées autour de tentes ― maintenant le rail qui court par-dessus les os de leurs ancêtres les entraîne pllus loin pointé vers l’infini, spectres d’humanité cheminant d’un pas léger à la surface du sol si profondément suppuré par le concentré de leur souffrance qu’il suffit de creuser à un pied de profondeur pour découvrir une main d’enfant…»
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"[... ] la chanson de la tribu chasseresse d'Asie retentissant le long de l'ultime chaîne Alaskienne de la terre et descendant jusqu'aux Désastres du Nouveau Monde (dans leurs yeux, et maintenant dans les yeux de Mardou, l'éventuel royaume d'Inca Maya et la vaste Aztéca brillant de serpents d'or et de temples aussi nobles que les Grecs, l'Egypte, les puissantes mâchoires longues et lisses et le nez épaté de Mongoliens de génie créant des arts dans des salles de temps et l'élan de leurs mâchoire pour parler, jusqu'à ce que les Espagnols de Cortés, les miséreux Hollandais las, vieux-monde, efféminés, pantalonnés de Pizarro soient venus en écrasant les roseaux dans les savanes découvrir les cités scintillantes des Yeux Indiens, hautes, perspectivées, boulevardées, ritualisées, blasonnées, pavoisées de ce même Soleil du Nouveau Monde auquel un cœur battant était présenté)" [page 46]
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([...] j'ai approché mon visage du sien pour parler de livres, elle avait tourné son visage vers moi, tout près, c'était un océan de choses fondues et noyées, j'aurais pu y nager, j'ai eu peur de toute cette richesse et j'ai détourné le regard –)
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[...] mais pendant qu'on parlait un grand courant électrique de vraie compréhension passait entre nous et je sentais les autres niveaux, leur nombre infini et celui de chacune de ses intonations et des miennes et de ce monde de significations dans chaque mot – je ne m'étais jamais rendu compte avant combien il se passe de choses tout le temps, et les gens le savent – ça se voit dans leurs yeux, ils se refusent à le laisser voir par tout autre – [...]
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Qu'est-ce qui m'attend dans la direction que je ne prends pas ?
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"Les hommes sont si fous, ils veulent avoir l'essence, c'est la femme qui est l'essence, elle est là juste sous leur main, mais ils filent ériger de grandes constructions abstraites"
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Mais en détaillant ses petits charmes je n'avais eu qu'une seule idée dominante c'est qu'il me fallait plonger mon être solitaire [...] dans le bain tiède et la rédemption de ses cuisses
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Je ne sais pas vraiment ce que je voulais dire mais je voulais que tu aies quelques mots de moi ce mercredi matin [...] Nous sommes comme deux bêtes qui s'enfuient dans des trous sombres et tièdes et vivons seuls nos souffrances
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