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sur 95 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Tenter de comprendre une fiction sans s'intéresser aux idées et à la vie de celui ou celle qui la crée relève de la gageure.
Pour la publication d'Un pays de fantômes chez Argyll, il semble indispensable de s'intéresser d'abord à son autrice : Margaret Killjoy.
Autrice transgenre et anarchiste revendiquée, Margaret Killjoy vit dans une communauté « autonome » des Appalaches, région montagneuse de l'Est des États-Unis. À la fois romancière et musicienne (au sein du groupe de Black Metal Feminazgûl), elle tient également un podcast survivaliste répondant au doux nom de Live Like the World Is Dying.
Un curriculum vitae qui en dit long sur les idées politiques et l'implication de Margaret Killjoy lorsqu'elle en vient à prendre la plume.
… Et ça tombe bien puisque c'est avec sa fantasy (forcément) anarchiste que débute sa publication dans l'Hexagone !

Un pays de fantômes ne perd pas de temps.
Il ne peut d'ailleurs pas se le permettre au vu de son nombre congru de pages. Narré par Dimos Horacki, journaliste pour la « Gazette de Borol », le roman nous emmène à la rencontre d'un peuple farouchement indépendant, celui de Hron. Envoyé par son Roi pour servir la propagande d'État de l'empire borolien, Dimos va vite s'apercevoir que l'armée de l'impitoyable général Dolan Wilder n'a rien de glorieuse. Au contraire : elle tue, brûle, torture et mutile quiconque se met en travers de son chemin. Dégoûté par les siens, notre journaliste est finalement fait prisonnier par un groupe de miliciens mené par Sorros et Nola. Au sein de cette Compagnie Libre de l'Andromède bleue, Dimos va parcourir Hron, découvrir ses us et coutumes et nouer des liens d'amour et d'amitié. Malheureusement, la Borolie n'a pas dit son dernier mot et la situation semble désespérée pour cette utopie perdue dans les montagnes…
Le mot est donc lâché : utopie.
À l'heure où la dystopie a le vent en poupe au sein de l'imaginaire, Margaret Killjoy tente de créer un univers fantasy en décalage avec les poncifs pessimistes habituels.
Si le roman commence par une plongée dans un corps d'armée borolien, avec toute la violence et la barbarie que cela suppose, il se tourne vite vers l'exploration de la vie en Hron une fois Dimos passé de l'autre côté du miroir.
On ne sera guère surpris de voir que l'utopie de Margaret Killjoy n'est pas autre qu'une mise en application de l'anarchie à l'échelle d'un pays complet. Enfin, si le mot « pays » a encore un sens dans cette optique.
Mais plutôt que de transformer son récit en un essai barbant et forcément attendu, l'américaine choisit de l'enchâsser dans le récit d'une résistance, celle du pays de Hron, face à une puissance étrangère impérialiste, la Borolie.
Il en résulte une aventure crédible où l'on s'attache aux personnages et où l'on espère avec eux. En somme, Un pays de fantômes parvient à être littéraire avant d'être politique.

Pour bien comprendre ce qu'est Un pays de fantômes, il faut savoir qu'il s'agit d'une fantasy dénuée de tout type de magie, d'évènements fantastiques et autres créatures surnaturelles. Une fantasy qui préfère le pistolet, la mitrailleuse et le gilet d'argile pare-balles aux épées et cottes de mailles.
Sur ce fond hard fantasy dans la droite lignée des Récits du Demi-Loup de Chloé Chevalier, l'autrice américaine déploie son idée de l'utopie en la faisant vivre à travers la camaraderie des uns et des autres, en confrontant le point de vue d'un étranger (Dimos) aux habitants d'Hron, civils ou combattants. Ainsi, il s'agit de comprendre l'anarchie à hauteur d'hommes en tentant d'en expliquer les rouages et les motivations, les failles et les avantages. La force du récit de Margaret Killjoy, c'est qu'il n'est pas là pour imposer une idée mais pour l'exposer… tout en laissant de véritables enjeux derrière, à savoir la liberté du peuple Hron et le combat pour sa survie pure et simple.
En choisissant un journaliste comme narrateur, Margaret Killjoy fait coup double : elle permet à la fois d'avoir l'avis d'un étranger sur une société différente de la sienne et d'insister sur le rôle fondamental du journalisme pour rendre compte du réel envers et contre tout. On pense parfois aux Jardins Statuaires de Jacques Abeille, avec pour point commun de porter un regard extérieur sur une société nouvelle pour son héros-narrateur afin de mieux la comprendre (et de la critiquer).
Malgré sa bienveillance évidente envers l'utopie anarchiste représentée par Hron, Margaret Killjoy en teste aussi les limites notamment avec Karak, société de bannis et d'anti-sociaux qui ont constitué leur propre cité en réaction à leur ostracisation d'Hron.
Ce qui marque cependant dans le récit de l'américaine, c'est la volonté de livrer quelque chose de singulièrement différent, une tentative de société dans laquelle le mot liberté prend tout son sens. Où l'on décide de tout collectivement, où l'on prend ses responsabilités vis-à-vis de soi et des autres, où l'on s'attache à l'indépendance plutôt qu'à la soumission.
Et mine de rien, aussi naïve qu'elle puisse paraître parfois, cette utopie fait du bien au lecteur. Elle incite à repenser nos acquis et à s'interroger sur nos valeurs tout en délivrant un message sur le caractère belliqueux des empires, sur la vision conquérante d'un système fondamentalement oppressant où l'être humain finit seul, abandonné, isolé, négligé. La lutte des miliciens d'Hron rappelle les combats désespérés des peuples à travers L Histoire pour conserver leur mode de vie face à l'envahisseur. On pense aux amérindiens, aux africains et, plus généralement, à tous les peuples agressés par des empires expansionnistes à travers l'histoire.
Un pays de fantômes est tout autant un roman d'ouverture et de découverte qu'une ode à la résistance et à la révolte. Margaret Killjoy comprend que l'utopie ne veut pas dire pacifisme et que la violence reste parfois nécessaire pour assurer sa propre survie. Pas étonnant de retrouver l'auteur d'Un Enfant de Poussière, un certain Patrick K. Dewdney, à la préface…

On pourrait croire arrivé ici que la lecture d'Un pays de fantômes relève plus du tract politique qu'autre chose. Il n'en est pourtant rien.
Comme nous l'avons mentionné plus haut, Margaret Killjoy a l'intelligence de construire des personnages émouvants, du milicien Sorros à la générale Nola en passant par le jeune Grem et le révolutionnaire Vyn.
Les relations qui se tissent entre eux et le narrateur, Dimos, permettent au récit d'en devenir touchant et tragique, redonnant à la fiction sa place principale pour toucher le lecteur tout en l'interrogeant.
C'est par la lutte désespérée du David hronien face à l'écrasant Goliath borolien que le roman trouve toute sa force. Il parvient ainsi à justifier son propos politique qui, de ce fait, n'apparaît plus comme un prétexte mais comme un moteur de l'intrigue.
Il en résulte une histoire où l'on espère et où l'on croit, même l'espace d'un instant, que cette utopie anarchiste soit possible. C'est forcément, en soi, une sacrée réussite.

Roman hautement politique mais aussi et surtout éminemment humain, Un pays de fantômes s'aventure sur le terrain de l'utopie pour s'interroger sur les limites notre société de lois et d'ordre. Margaret Killjoy écrit la résistance et l'existence, et c'est finalement le lecteur qui est conquis à la fin.
Lien : https://justaword.fr/un-pays..
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Pour faire court : Une société anarchiste plus ou moins solarpunk se fait envahir par son voisin à l'ouest. le voisin est un empire colonial industriel steampunk. Les anarchistes doivent donc s'allier avec leurs voisins de l'est : les libertariens.

Si ça n'est pas une bonne prémisse de roman, je ne sais pas ce que c'est!

Margaret Killjoy, militante anarchiste trans, se sert de cette histoire comme prétexte pour explorer à quoi ressemblerait une société anarchiste fonctionnelle, ses défauts et ses limites. Elle s'interroge aussi sur les différences idéologiques entre l'anarchisme et le libertarianisme, leurs différentes conceptions de la liberté, et tout ça.

Vraiment bien fait si le sujet vous intéresse.

Ça reste toutefois moins nuancé et poétique que Les Dépossédés de Ursula le Guin, que je recommanderais d'abord à quiconque se questionnerait sur l'anarchisme.
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Dimos Horacki, journaliste de Borolie qui a besoin de reprendre du galon dans le métier suite à un reportage qui n'a pas plu il y a quelques années, est envoyé sur le front des Cerracs, territoires montagneux que les Boroliens sont en train de coloniser, pour réaliser un nouveau reportage, cette fois dans le but de porter aux nues le général Dolan Wilder, et d'assurer la propagande de l'empire. Mais ce qu'il découvre sur place lui donne tout sauf envie de glorifier le général et l'empire, et son premier papier, qui raconte l'inhumanité du conflit et des comportements des soldats envers la population, va faire basculer son existence à un point auquel il ne s'attendait pas du tout, et le mènera à la rencontre inattendue des "ennemis", qui ont nommé les Cerracs Hron, et qui se présentent comme anarchistes, bien à l'opposé des Boroliens.

A travers cette chronique d'une guerre entre deux civilisations, entre deux façons de voir et d'envisager le monde et la société, Margaret Killjoy nous propose une histoire passionnante à lire, qui alterne habilement entre scènes qui font avancer l'intrigue, et explications sur ce qu'est, pour elle, un fonctionnement anarchiste, bien loin des caricatures habituellement présentées, au contraire tout en objectivité, permise par les questions que se pose, et pose Dimos à ce sujet, ayant lui-même toujours vécu dans l'autre système. Ainsi, les bons, comme les mauvais côtés, sont décrits, laissant toute latitude au lecteur quant à ses propres réflexions et questions ; le choix de l'autrice est, quant à lui, fait, ce qu'elle nous montre tout aussi habilement par la description d'Hron, sans pour autant moraliser son propos, ce qui est fort agréable.

Je regrette peut-être seulement sa brièveté : en effet, finalement, tout se passe un peu trop vite, de l'arrivée de Dimos sur le front jusqu'au dénouement qui scelle son destin, et celui de la guerre contre Hron. J'aurais aimé rester un peu plus longtemps dans cet univers apprécié et appréciable.
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Je dois avouer que j'avais déjà la version grand format dans ma PAL quand Pocket m'a envoyé la sienne… Mais ce fut plutôt une belle surprise car cela m'a poussée à enfin l'en sortir et quelle riche lecture. Elle n'avait rien à voir avec ce que la couverture m'avait laissée imaginer. Elle m'a offert tellement plus avec ce vibrant récit humaniste, révolutionnaire, contestataire et presque ethnologique !

Margaret Killjoy, l'autrice, est très joliment introduite avant ce récit grâce à une enthousiaste préface signée Patrick K. Dewdney (Le cycle de Syffe). La découvrir autant engagée a auguré pour moi du très bon moment que j'allais passer et cela s'est confirmé. Chouette ! Elle a mis ici tout ce qui la travaillait au service d'une belle et puissante aventure qui fait réfléchir, ce qu'on a parfois tendance à oublier au profit du divertissement.

Dans un récit assez resserré, elle va réussir l'exercice de nous proposer à la fois réflexion politique et réflexion humaine, il faut dire que l'un ne va pas sans l'autre, mais elle le fait, un peu comme Ursula le Guin dans La main gauche de la nuit, de manière quasi ethnologique grâce à son récit porté par un journaliste enlevé par le « pays » voisin auquel le sien fait la guerre. Dimos Horacki sera ainsi notre guide et avec lui, en allant à rencontre du peuple Hron, de ville en ville, de bourgade en bourgade, nous allons découvrir une société riche et surprenante.

Au début, je pensais vraiment que l'intérêt de cette lecture allaient être les tensions entre la Borolie et le Hron, mais j'ai rapidement compris que ce conflit, ou plutôt cette invasion, n'était qu'un prétexte pour évoquer tout autre chose : le fonctionnement d'une société atypique, une société anarchiste. L'anarchie est un modèle politique qu'on cite souvent, surtout quand on est jeune et contestataire, mais qu'on a tendance à oublier ensuite. Je l'ai rarement vu exploité en littérature de l'imaginaire et j'ai été très agréablement surprise ici.

Bien que ce soit dans un texte assez court, l'autrice nous décrit comment une société a réussi à s'en inspirer pour créer son propre modèle de fonctionnement, un modèle où il n'y a pas de monnaie, pas de travail/emploi obligatoire, pas de mariage au sens où on l'entend nous plus, et pas d'armement ou industrie qui détériorerait l'environnement : bref une société libre, basée sur l'échange et la communication, et non le violence et la punition. Et ça fonctionne plutôt bien sous la plume de l'autrice car cette société, grâce à l'agitation qui vient la bousculer ici, est capable de s'adapter et se réinventer, nous proposant ma foi un sympathique modèle, utopique certes mais plus tant que ça au final.

J'ai donc aimé suivre Dimos dans sa découverte qui se couple avec les tensions d'un peuple en proie à l'invasion. le récit mélange aventure, découvertes sociétales et action. Nous allons à la rencontre de moult villes et personnages. le récit se veut varié jusque dans la diversité qu'il offre puisqu'on croise personnages handicapé, LGBT, ostracisé, etc. Tout se matche bien en plus sans que ça fasse artificiel parce que l'autrice à imaginer un cadre qui s'y prête bien. Cependant, je dois avouer que la brièveté du récit, son faible nombre de pages, a également empêché mon attachement à ces derniers. J'ai aimé suivre Dimos, parce que c'est le héros et que c'est celui avec qui on est le plus souvent, donc on apprend bien à le connaître. Mais dans l'ensemble, malgré les rôles intéressants que l'autrice leur donne à jouer, tout va trop vite pour développer un réel attachement à qui que ce soit et j'ai trouvé cela dommage. On reste un peu trop en surface.

Plus proposition de philosophie politique que réelle aventure fantastique nous emportant, Un pays de fantômes fut une belle surprise sur ce premier point. J'ai beaucoup aimé découvrir le modèle proposé et critiqué par l'autrice sur cette base anarchiste dont on parle souvent mais qu'on utilise peu. Je reste cependant sur ma faim dans l'ensemble tant cela va vite et tant cela est court. J'aurais aimé une écriture plus approfondie des personnages, surtout vu leur diversité. J'aurais aimé rester avec eux et peut-être vivre plus intimement cette guerre qui va tant les chambouler et ce nouveau monde qu'ils rebâtissent ensuite. Ce fut en tout cas une belle proposition inattendue derrière ce titre ô combien poétique.
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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Un récit prétexte à une présentation du mode de fonctionnement d'un ensemble de communautés anarchistes à l'échelle d'un pays, finalement assez bien mené.

Le livre de Margaret Killjoy ne s'embarrasse pas de faux-semblants, le but avoué est clairement d'édifier le lecteur, de l'instruire des méthodes et des modes d'organisations de communautés anarchistes, à la fois au sein de celles-ci et entre elles. Pour autant, le récit n'est pas oublié, les personnages sont solides et nuancés, et les péripéties ne manquent pas. Certains dialogues apparaissent clairement comme nécessaires à la démonstration plus qu'au récit proprement dit, toutefois cet aspect didactique n'est ni lourd, ni exagéré et cela passe sans douleur à la lecture. La présentation n'est pas trop manichéenne et la cité de Karak et ses habitants proposent une lecture différente des idéaux de Hronople.

Pour finir, ce fut une lecture agréable mais il faut reconnaître que l'on n'est pas au niveau de nuance, de richesse et de finesse d'Ursula le Guin, en particulier dans Les Dépossédés.
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Un pays de fantôme est un livre particulier, l'histoire n'est pas particulièrement innovante mais je n'ai jamais eu envie de lâcher cette histoire classique. L'utopie anarchiste évoquée dans cet ouvrage est tellement bien détaillée, tellement bien expliquée que l'on se laisse emmener avec facilité à Hron et à croire qu'un tel monde est réalisable. La résistance a l'empire Borolien envahisseur sert de point de départ au récit mais même si il reste un élément important n'est pas l'élément central du récit, ce qui peut être un peu déroutant. On s'intéresse plus ici à la vie des personnes, à leur mode de pensée et aussi à leur incompréhension vis à vis du monde conventionnel. Ce livre n'est pas Candide au pays des anarchistes et le questionnement du héros est bien dosé pour ne pas le faire passer pour un imbécile.
Bref une bonne lecture.
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Un roman rafraîchissant dans son aspect pro-anarchiste, un thème trop rarement croisé à mes yeux ; mais malheureusement peut-être un peu trop empreint d'une volonté promotionnelle à mes yeux pour parvenir à me séduire.
En dépit d'efforts réussis pour intriquer ses thèmes avec un récit humain et ancré dans une réalité organique, Margaret Killjoy n'est pas parvenu à injecter assez de chair à son roman pour lui donner assez de densité à mon goût.
De fait, une lecture frustrante, montrant de belles choses, mais juste pas assez.
Lien : https://syndromequickson.com..
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Nous sommes ici sur un roman de fantasy où la magie n'est pas présente, mais où l'intrigue politique, géopolitique et stratégique prennent le dessus dans un monde imaginaire.
D'un côté un empire qui broie et conquère tout sur son passage, de l'autre un peuple libre et sans gouvernance, qui dicte ses propres règles sans les écrire, en laissant chacun décider de ses choix, de ses valeurs et misant sur la responsabilité de chacun. Une utopie Anarchiste ! Et c'est cela le plus intéressant dans le roman.
Nous suivons un jeune journaliste faisant parti d'un camp et qui par la force des choses va basculer dans l'autre, le personnage en lui-même est perdu par ce changement, il ne peut qu'annaliser les différences et surtout se rendre compte qu'il est bien plus proche du "camp ennemi" que du sien dans lequel il n'avait pas vraiment de prise sur sa vie, il va gagner en maturité avec le temps.
J'ai beaucoup aimé ma lecture, surtout concernant les tenants et les aboutissants de la vie en communauté anarchiste, même si tout n'est pas rose ni forcément bon, l'humain se voit bien plus proche du bonheur que dans l'autre société, celle qui réprimande, qui oblige, qui punit mais ne valorise pas son peuple.
Je tiens également à vous dire que les orientations sexuelles des personnages ne son jamais jugées, chacun fait ce qu'il veut et c'est très bien comme cela.
C'est un livre adulte, parfois très violent, il vous met devant le fait accompli et ne prend pas de détour pour dénoncer les injustices.
Les personnages, sans êtres inoubliables m'ont tout de même plus, le décor lui est très secondaire, mais j'insiste sur le fait que ce roman est fait pour réfléchir aux conditions de vie des deux sociétés présentées.
Je vous conseille fortement cette lecture qui est très enrichissante.
C'est le deuxième roman que je lis des éditions Argyll en quelques semaines, et c'est mon deuxième coup de coeur, ce qui veut dire que ce ne seront pas les derniers à passer entre mes mains.
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J'ai choisi ce livre pour découvrir la maison d'édition dont j'avais entendu beaucoup de bien. Et je dois dire que je n'ai pas été déçue. Sous couvert d'un reportage sur un pays en guerre, un pays en pleine campagne de propagande contre un autre pays invisible, dispersé et presque sauvage, on découvre un autre système de société, un autre système économique et politique, un autre système de pensée et de philosophie, un autre système de vie, si différent de nos sociétés que j'appellerai "modernes". On pense lire un roman de fantasy et c'est finalement un roman de vie, une découverte de mode de vie, de ce que pourrait être nos vies vies à nous, si à un moment dans l'histoire, le capitalisme n'avait pas prévalu et gagné sur les autres modes de vie. J'avoue que ce sont le type de romans que j'adore, ceux qui nous sortent de notre quotidien mais qui nous amènent justement à réfléchir sur notre quotidien. C'était très bien pensé et je serai plus que ravie de me lancer dans de nouveaux romans de l'autrice et de la maison d'édition.
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« « L'homme sous le haut-de-forme » : voilà comment je comptais intituler cette rubrique, lorsque les directeurs de la Gazette de Borao me l'avaient confiée. Quarante, peut-être même cinquante pouces de colonne par semaine, six mois durant, sur Dolan Wilde, « le conquérant de la Vorronie ». Dolan Wilder, l'énigmatique jeune loup issu de l'armée impériale de Sa Majesté, célèbre pour son audace militaire à la « Après moi, chargez ! » Celui qui avait revendiqué plus de kilomètres carrés au nom du vert et or que quiconque depuis un siècle.
J'étais fin prêt à décrire sa mâchoire couverte d'une barbe rêche, ses boucles noires, son goût pour le brandy et sa clémence pour les ennemis vaincus. On m'avait demandé de réserver au moins deux pouces de colonne à son ton bourru mais amical. le portrait que je devais dresser était celui d'un homme froid, insensible, dont le coeur ne battait que pour le service, le Roi, et la gloire de l'Empire borolien. Au lieu de cela, hélas, je l'ai vu mourir. Mais c'est sans importance ; de tous les traits qu'on m'avait demandé de lui attribuer, il n'en possédait qu'un petit nombre et ceux qu'il avait réellement ne lui réussissaient pas. Laissez-moi plutôt vous parler de Sorros Ralm, simple milicien, et du pays de Hron. Je doute que vous puissiez lire mon compte-rendu dans la Gazette. »

Il y a des livres dont il suffit de lire les premières lignes pour être d'emblée séduit par la petite musique de leur écriture jointe à la promesse de ce qu'ils nous annoncent, et on se dit qu'ils vont nous plaire. C'est ce que j'ai ressenti en commençant à lire le récit rétrospectif à la première personne de Dimos Horacki, début repris ci-dessus, et cette impression ne s'est pas démentie.

Envoyé comme journaliste de terrain pour couvrir la nouvelle campagne vorronienne, le jeune Dimos Horacki, observateur d'une guerre de conquête dans laquelle il ne reconnaît rien de glorieux, avec ses exactions et ses tueries, va finir par rejoindre le clan adverse, celui de Hron. Mais de Hron, ce pays qui vit selon son absence de lois bien à lui, hors de tout cadre rigide répartissant les rôles entre les uns et les autres, Dimos ne sait rien…

Tout m'a plu, dans ce petit roman et en particulier cette manière de ne pas expliquer mais d'illustrer ce que représente concrètement l'anarchisme en tant que mode de vie d'une collectivité, puisque c'est celui de Hron, le peuple attaqué par la Vorronie. On dit qu'il n'y a pas de meilleure démonstration que celle faite par l'exemple et « Un pays de fantômes » en est la preuve. Qu'importe l'« accord » signé par les habitants de Hron, dont la teneur n'est évoquée que de manière diffuse car les termes en ont été plus ou moins oubliés, ou globalement les théories, quand c'est au jour le jour qu'il faut continuer à apprendre à vivre ensemble. Et lorsque l'inacceptable fait irruption, ici la volonté de conquête d'un peuple voisin supérieur en nombre, il convient de réagir et le temps manque. Mais comment ? Il n'y a pas de mode d'emploi délivré avec ce type de société auquel nous ne sommes pas habitués, où la consultation de tous peut prendre des heures et des heures, mais où l'autorité de l'un ou l'autre, parce qu'il s'avère le plus capable, peut aussi temporairement être reconnue.
J'ai donc eu le plaisir de lire une histoire très prenante, portée par une plume élégante et quelques personnages attachants, en réfléchissant, aux différentes étapes de son développement, aux questions posées par son principal protagoniste, Dimos : soucieux de s'éveiller à un mode de pensée différent, il a pourtant du mal, au moins au départ, à s'affranchir de son point de vue habituel, à le décaler pour penser autrement.
« Un pays de fantômes » conjugue avec bonheur récit d'aventure et réflexion sociale : un court roman tout ce qu'il y a de recommandable !
Lien : https://surmesbrizees.wordpr..
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