Magnifique !
C'est drôle : il y a des périodes où je vais de déception en déception dans mes lectures, et puis d'autres, où je saute d'un coup de coeur à l'autre ! C'est peut-être un état d'esprit… ou pas, car quelques autres livres lus à cette même période se sont révélés moins enthousiasmants, mais là, j'ai mis un 5/5 à "Alabama 1963" pas plus tard qu'hier, et me voici avec un nouveau maximum, sans aucune hésitation !
Ce livre est pourtant dans un style très différent et propose une histoire qui n'a rien à voir avec la précédente. C'est un roman beaucoup plus personnel, un voyage dans un décor magnifique mais tout autant vers l'intérieur de soi-même, à tel point que j'ai cru à un moment (quand Mari fait ses premiers pas là où Bri aurait dû les faire) qu'on avait là un énième roman feel good à tendance développement personnel. Mais finalement non, on comprend vite que ce n'est rien de tout ça !
C'est un roman assez simple en fait : Mari suit les pas de sa cousine Bri dont elle n'a pas vraiment fait le deuil, un deuil teinté d'une certaine culpabilité d'avoir gâché l'amitié profonde de toute une enfance, pour entrer dans une vie devenue tellement superficielle ! et le lecteur suit les pas
De Mari.
Ce voyage, d'emblée, ne pouvait que me plaire : certes je n'ai jamais fait de rando aussi « prestigieuse » que le John Muir Trail, mais à une époque de ma vie j'ai moi aussi marché en montagne, y compris en autarcie avec un petit groupe pendant 2 x 5 jours loin de toute civilisation, avec ravitaillement au milieu… Et je ne parle pas de quelques randos plus courtes, mais tout aussi mémorables et pour toujours, comme le tour des Dents du Midi (dans les Alpes suisses) avec celui qui deviendrait mon mari ou, quelques années plus tôt encore, un « trek touristique » jusqu'au Machu Picchu (qu'on ne présente plus) avec un petit groupe improvisé bien sympathique, car j'avais choisi de le découvrir sous cette forme de (courte) randonnée organisée, qui permettait d'y arriver en marchant sur la route des Incas, une route certes fréquentée mais un peu moins que les boulevards touristiques de visite d'une journée.
On l'a compris : ce roman peint la nature et en particulier la montagne, comme j'ai rarement eu l'occasion de lire dans une simple histoire, au point de ne pas avoir eu l'envie ni le besoin d'aller « vérifier » par des photos sur Internet. Tous les paysages présentés par l'auteure sont tellement bien décrits, tellement justes, qu'on vibre comme si on y était, sans même avoir besoin de les voir. Tout simplement magique !
Cela seul aurait sans doute suffi à rendre ce livre excellent, mais on a en plus un concentré d'émotions. Tant et tant d'émotions, même, qu'à un certain moment j'ai été chercher une boîte de mouchoirs à garder près de moi, tandis que ma fille me regardait d'un air inquiet, et m'a demandé un peu plus tard: « Tu l'as bientôt fini, ce livre qui te rend si triste ? » Comment lui expliquer que ce n'était pas de la tristesse, mais quelque chose de bien plus profond, peut-être pas hyper-agréable certes, mais qui rendait cette lecture d'autant plus précieuse ?
Le chemin que Mari entreprend vers elle-même résonne d'une telle justesse, d'une telle vérité, d'une telle détresse parfois aussi, qu'il faudrait être de pierre pour y rester insensible ! Son chemin est ainsi ponctué, par ailleurs, de quelques brèves rencontres qui soulignent ces rapports cordiaux que l'on peut retrouver spontanément entre randonneurs (il faut l'avoir vécu pour le comprendre, je crois), mais aussi d'une véritable histoire d'amitié avec ce petit groupe d'amis qui va croiser sa route, et avec qui elle va faire une bonne partie du chemin finalement. Cela donne le petit côté amitié-presque-romance bien agréable, qui n'était sans doute même pas vraiment utile, mais qui embellit l'histoire d'une légèreté sans laquelle on serait sans doute carrément dans le drame.
Bref, j'ai adoré, et je recommande vivement ce livre à tout qui aime la montagne et les belles histoires toutes simples mais pleines d'humanité !