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Manufacturier : personne qui dirige une manufacture.
Ça se tient.
Accessoirement bouquin synonyme de panard intégral.

Sur la jaquette, il y est inscrit « inspiré de faits réels ».
J'ose espérer que cette véracité repose sur le conflit serbo-croate largement évoqué et non sur les exactions incroyablement violentes d'un manufacturier tortionnaire au sommet de son art.

Ce monument, si, si, j'insiste, d'une noirceur et d'une fureur absolue fait tout d'abord preuve d'une originalité folle et d'une construction étourdissante de maîtrise narrative.

Amis du cliffhanger en série et du « p'tain j'l'avais pas vu venir celle-là », jetez-vous sur ce pavé horrifico-historique, et vice et versa, pourvoyeur d'euphorie intégrale malgré (voire grâce à selon votre degré de tolérance à la douleur des autres) ces morceaux d'anthologie que constituent les nombreux sévices infligés à ces victimes sacrificielles.

Guerre des Balkans, Dark Web, vendetta, foire aux monstres, non, pas inflation, Castex s'en est déjà magistralement chargé, autant de thèmes abordés par un auteur à ne pas mettre entre toutes les pognes (sac à vomi de rigueur pour les plus délicats) mais qu'il me tarde déjà de retrouver histoire de confirmer cette magistrale première impression.
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D'un côté, le capitaine Vladimir Radiche, surnommé Zéro, de la section criminelle du Havre. D'une froideur implacable. Son objectif : démanteler le trafic de drogue et de prostitution de Khaledzaoui.
De l'autre, Milovan. Un jeune homme encore traumatisé par le massacre de sa famille par des militaires serbes. Aujourd'hui, poussé par son père adoptif, il contacte l'avocate de l'ONG Dignité et Justice, Irena Ilić, qui vient tout juste de permettre l'arrestation du criminel de guerre, Vladislas Krakić, afin de l'aider à retrouver le responsable de la mort de sa famille, Dragoljub, le meneur des Lions de Serbie.
Au centre, le Manufacturier. Son passe-temps favori : mettre en ligne sur le Dark Web ses mises en scène criminelles d'une infâme barbarie.

Glaçant au possible, d'une violence sans nom, d'une noirceur implacable, ce Manufacturier frappe fort. Inspiré de faits réels (l'on n'ose imagine jusqu'à quel point l'auteur s'est basé sur ces faits), ce roman traite aussi bien du constat alarmant de tous ces trafics (drogue ou prostitution) qui pullulent, de tous ces trafiquants sans état d'âme, mais aussi de la guerre, ici celle qui s'est jouée en ex-Yougoslavie et qui a vu les peuples s'entretuer, faisant des milliers de morts. Dans cette ambiance extrêmement tendue, vengeresse, les personnages, tout d'une incroyable force et aura, sont parfaitement dépeints, l'auteur semant ici et là quelques doutes les concernant, que ce soit l'avocate dont le seul but est de coffrer les criminels de guerre, le capitaine Radiche, homme détestable au possible, l'énigmatique et effroyable manufacturier ou encore Milovan, un jeune homme traumatisé qui cherche à obtenir réparation. Mathias Köping joue avec nos nerfs tout au long de ces 550 pages mais aussi nos acquis pour nous en mettre plein la vue au derniers tiers.
Un roman sans aucun état d'âme...
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Je sors de ma léthargie pour partager l'enthousiasme que j'ai éprouvé à la lecture de ce livre.
J'ai eu besoin de quelques inspirations profondes à la fin de quelques passages.
C'est violent !!! L'auteur le dit lui même ça pique les yeux, pour ma part ils ont saigné.
Mais l'histoire en vaut le coup ,
J'ai haï tout à la fois les serbes , les croates , à vous en retourner la tête , tout en éprouvant de la sympathie pour les personnages aussi odieux soient -ils .
Un véritable coup de foudre pour ce livre , chose qui ne m'arrive qu'environ tous les 2-3 ans.
Désolée pour cette critique foutraque que j'écris sous le coup de l'émotion, si j'attends je vais trop analyser et me décourager de l'écrire.
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Dubitative après la critique de Crossroads, je ne savais pas si je devais partir en courant ou me jeter sur ce livre. Evidemment, je n'ai pas su répondre à son provocateur « je sais que tu aimes les défis » autrement qu'en me jetant sur ce livre. Oui je sais mais on ne se refait pas…

Le gros avertissement encadré en jaune fluo sur la quatrième de couverture aurait dû me dissuader : «Ce roman est d'une très grande violence. Il est strictement réservé à un public averti âmes sensibles passez votre chemin » mais non pensez-vous. C'est pourtant limpide. C'est même plus de la témérité à ce stade c'est de l'inconscience. Surtout que l'auteur, sympa réitère dans la préface : « Je l'affirme donc haut et fort […] mes deux romans sont violents et s'adressent à un public averti […] Je me choque souvent moi-même lorsque j'écris, je ne me censure jamais ».

Alors laissez-moi vous dire que cette histoire de femme avertie qui en vaut deux c'est une grosse fumisterie. Oh punaise quelle claque ce bouquin ! Rien ne peut préparer à ça. Drogue, prostitution, viols, génocide et crimes contre l'humanité sous toutes les formes inimaginables. Ben quoi ? Vous vous dites que, ok les thèmes ne sont pas nouveau, mais croyez-moi jamais ils n'ont été abordés comme ça sous le prisme de la vérité cru! Si vous ouvrez ce livre, apprêtez-vous à plonger dans les ténèbres les plus sombres et les plus sordides de l'humanité. Et tant que vous y êtes oubliez le mot espoir qui semble exclu du vocabulaire de l'auteur. D'ailleurs une fois le livre refermé vous ne saurez plus ce que ce mot signifie.

Certains pour décrire ce livre utiliseraient des termes comme bestial, inhumain, sauvagerie mais dans ce cas ce serait ignorer complètement le message de l'auteur : arrêtons de nous voiler la face l'horreur est tout ce qu'il y a de plus humain. On n'a jamais vu un animal tenter d'exterminer une autre espèce ou torturer ses congénères. Pour preuve aussi violent soit-il ce livre est basé sur des faits réels (rien que d'y penser j'en ai la nausée). Nous sommes l'espèce la plus cruelle que ce monde a engendré et avec un tel livre impossible de l'oublier.

Débarrassé de toute forme de morale et de toute illusion sur la nature humaine KÖPING descend dans les abysses les plus glauques et les plus repoussants de l'âme humaine sans pour autant laisser un arrière-goût malsain de voyeurisme. de plus nous raconter des horreurs n'est pas une fin en soi. Il y a derrière tout ça une enquête palpitante menée à un rythme effréné, sans temps morts et sans laisser au lecteur le temps de souffler. le coeur est mis à rude épreuve. Tout s'enchaîne parfaitement comme une mécanique bien huilée. Aucune incohérence ou invraisemblance rien n'est laissé au hasard. du travail de pro ! Les personnages sont bien construits et cohérents jusque dans les plus petits détails. Ils transpirent l'humanité même si certains fileraient des sueurs froides à Hannibal LECTER.

Impossible de lâcher ce bouquin tellement j'étais subjuguée par l'audace de l'auteur qui bafoue toutes les limites et se fout royalement de ce qui se fait ou pas. J'ai été emportée par le scénario impeccable et le dénouement surprenant à bien des égards.

C'est glaçant, stressant, immoral, imprévisible, et sans aucune pitié. Avant de tourner la première page réfléchissez bien, car vous entrez en enfer.

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D'un côté, au Havre, le chef de la brigade criminelle, le capitaine Radiche dit « zéro » traque Zakaria Khaledzaoui à la tête d'un réseau de trafic de drogue et de prostitution.

D'un autre, dans le Causse de Mende, Boris Horvat va enfin réussir à convaincre son fils adoptif, Milovan, d'entrer en contact avec cette avocate serbe qui traque les anciens bourreaux de la guerre des Balkans.

Elle doit l'aider à trouver les membres survivants d'un groupe paramilitaire, et leur chef : Dragoljub, qui a exécuté sa famille de façon ignoble.

Enfin, dans un lieu inconnu, Serge Vivardoux se connecte sur le dark web au site du «Manufacturier de Jasenovac», hacker de génie, pour y regarder la dernière vidéo en ligne.

Dans celle-ci un type insulte son geôlier, puis se met soudain à hurler de terreur. Vivardoux comprend pourquoi lorsque la caméra se déplace en contre-champ. « Quelques rats, guidés par des tunnels en treillis métalliques, trottinaient en couinant vers les doigts de la victime. Les rongeurs parvinrent dans la cage et passèrent à table.

Les bestioles affamées dégustèrent le bout des doigts du type...».

A mon avis :
Comme diraient les tontons flingueurs : « c'est du brutal ! ». Ça bouscule, ça cogne, ça déménage, ça vous prend aux tripes ! Un thriller noir et violent, sans états d'âme, à ne pas mettre entre toutes les mains, les âmes sensibles n'y tiendront pas.

Des meurtres, de l'immoralité, du sexe malsain, des viols, de la torture et j'en passe... mais un livre qu'on ne peut plus lâcher une fois commencé.

L'écriture est dynamique, on alterne les trois situations décrites plus haut en s'interrogeant sur leurs liens. Et comme dans chacune d'elle on trouve un intérêt particulier, ça avance très vite. Progressivement on voit se dessiner les liens qui unissent ces personnages mais il n'est pas impossible que vous fassiez fausse route sur l'identité de chacun car ce livre est aussi bien pensé et malin.

Thriller réaliste et bien documenté... largement au dessus du lot et qui ferait passer nos thrillers habituels pour de fades romans à l'eau de rose. En tout cas, c'est un livre qui marque et que vous garderez en mémoire d'une manière ou d'une autre.

Pour moi, c'est un chef d'oeuvre.

Alors, si vous avez le coeur bien accroché, précipitez vous !!!


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Voilà LE livre qui fait le buzz en ce moment et j'avais envie de découvrir ce que certains lecteurs ont pu rechercher et surtout trouver dans cette lecture. Je n'ai pas été choquée par ce livre (Je pense qu'il m'en faut plus que ça ou peut-être aurais-je été plus choquée par des images.) C'est bel et bien notre société que l'auteur dépeint. Et oui, tous ces faits ont existé ou existent, il a juste eu le culot de l'écrire sans détour et sans prendre de gants. Ils nous annoncent des faits, des actes, des mots...et nous plonge dans ce que l'homme a de plus malsain et abject. le conflit serbo-croate est vraiment intéressant, j'étais jeune et je n'y ai jamais vraiment prêté attention. Ce qui résulte de ma lecture est une réflexion sur le bien et le mal. Des notions qui sont souvent perverties. L'auteur a su mélanger ces notions tout comme nos repères et l'on en ressort KO!
C'est un livre puissant et dérangeant, à ne pas mettre entre toutes les mains. (...)

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Titre : le manufacturier
Auteur : Mattias Köping
Editeur : Ring
Année : 2018
Résumé : 19 novembre 1991, alors que la guerre fait rage en ex-Yougoslavie, le massacre d'une famille à lieu près du village de Erdut en Croatie. Les meurtriers sont des para-militaires serbes, dirigés par le sinistre Dragoljub. Deux décennies plus tard, une juge internationale aidé par le seul survivant du massacre, ouvre une enquête et se met sur les traces des assassins. 1er avril 2017, les cadavres d'une femme et son bébé sont retrouvés dans la banlieue du Havre. Atrocement mutilés, l'enchevêtrement des corps laisse à penser que le tueur réalise là une oeuvre d'art macabre. Quels liens relient ces deux histoires ? le territoire français sert-il de base arrière à des monstres sanguinaires qu'on pensait à jamais disparus ?
Mon humble avis : Une baffe dans la gueule, un coup de poing dans le pif, voilà à peu près l'effet du roman de Mattias Köping sur ses lecteurs. J'avoue ma très grande surprise à la lecture de ce texte, sachant que j'avais été plutôt déçu par les démoniaques, roman précédent de l'auteur Havrais. J'ai lu de nombreuses critiques dithyrambiques et je me suis dis qu'il fallait quand même que j'essaie et je n'ai aucun regret, c'est le moins que l'on puisse dire. le manufacturier est un grand polar, d'une violence inouïe, un texte implacable peuplé de personnages dont on a du mal à se détacher une fois le roman refermé. J'exagère ?  Tentez l'expérience ! Publié chez Ring, un éditeur à part, libre et controversé, le pavé de Köping est un polar rare, dense, documenté, puissant, précis, un bouquin à part dans la production française. On pense à Don Winslow, à l'illustre Ellroy bref , de sacrés références. Bien sûr l'intrigue, sur la fin, est un peu cousue de fil blanc, bien sûr certaines scènes de violence peuvent paraître un peu gratuites, mais quel souffle ! quel rythme ! Rares sont les auteurs français pouvant se targuer d'une telle réussite dans un style de littérature tellement balisé, tellement occupé par pléthore de romans souvent uniformes et sans reliefs. le manufacturier balaie toutes les perversions du genre humain et Köping ne nous épargne rien : viols, meurtres sur enfants, trafic d'êtres humains, prostitution, massacres, meurtres en série, violences policières et ce jusqu'à la nausée. Âmes sensibles s'abstenir... Mais le manufacturier ne peut être limité à cette litanie d'actes violents, la construction du roman tient la route, le rythme y est effréné et ce pavé se dévore en seulement quelques heures. Ce texte est un bulldozer lancé à pleine vitesse, un engin qui ne fait pas dans la dentelle et écrase tout sur son passage. Pour cela et pour toutes les raisons évoquées plus haut, je ne peux que m'incliner devant le talent et le travail, qu'on devine immense, de Monsieur Matias Köping.
J'achète ? : A ton avis ? Un texte implacable et rare. Une oeuvre à ne pas mettre entre toutes les mains, mais quel immense plaisir de lecture ! Cours-y !
Lien : https://francksbooks.wordpre..
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Un livre rempli de poésie, d'amour, de douceur, de générosité et bien entendue "beaucoup" d'humour…
Ne serais-je pas plutôt le contraire ?
J'ai bien peur que si !

L'horreur serbo-croate m'a le plus marqué dans cet ouvrage.
Cette guerre faite de vengeance, de destruction, de pouvoir, de corruption, de richesse me dégoûte au plus haut point…

Le manufacturier donc le tueur en série est égal à ce que j'espérais de lui :-)
Je n'ai pas était étonné, j'ai compris très vite certains points important du livre… La fin demeure évidente (enfin pour moi).

Un récit à découvrir ! Pour ne pas oublier les monstruosités qui se sont déroulées pendant cette guerre serbo-croate. L'immondice à l'état pure…

Merci à Christian06 de m'avoir fait découvrir ce roman grâce à une de ses critiques (je lis le maximum de vos critiques mes ami(e)s de Babelio)

Bonne lecture !
Lien : https://angelscath.blogspot...
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Mattias Köping est LE nom d'auteur de thriller à retenir. Après « Les Démoniaques » qui en avait secoué plus d'un(e), moi y compris, le voici de retour avec son second thriller, toujours édité chez Ring, le fascinant « le Manufacturier« . Un ovni, un objet littéraire d'une noirceur totale qui est aussi une réussite éclatante. Mattias Köping repousse les limites de l'ultra violence dans un récit envoûtant, un véritable page-turner où l'on s'enfonce dans une histoire aux rebondissements machiavéliques. Il y a plusieurs récits qui s'entrecroisent pour ne former plus qu'un par la suite. C'est absolument captivant et on ne peut plus lâcher « le Manufacturier » avant d'avoir compris tous les ressorts de ce dernier. On plonge ainsi dans les méandres de la psychée de Milovan, un jeune homme qui a survécu par miracle au massacre de sa famille en novembre 1991 à Erdut, un village de Croatie. Ceux qui ont agis avec une inhumanité totale s'appellent « les Lions de Serbie ». Dragoljub est à leur tête. Milovan souhaite le retrouver et fait alors appel à une ONG avec à sa tête une avocate d'un courage remarquable. Mais ce n'est pas tout, au Havre, en avril 2017, une mère et son bébé sont retrouvés atrocement mutilés. L'enquête s'annonce longue car ce tueur qui s'appelle « le manufacturier » est un génie du Dark web qui vend les vidéos de ses crimes abominables à des initiés qui ont soif de sensations fortes. Au même moment, toujours au Havre, Vladimir Radiche, un flic pas comme les autres, insensible, froid, véritable force de la nature enquête sur un important trafic de drogues et de traites d'esclaves sexuelles adolescentes.. Bienvenue dans le monde apocalyptique de Mattias Köping qui noue les fils de ces trois histoires intimement imbriquées. Véritable somme, ce livre est un coup de poing dans l'estomac, une claque monumentale qui renverse les données du bien et du mal. On lit peu de thrillers de cette trempe. Attention cependant aux âmes sensibles car « le manufacturier » est un livre extrêmement violent qui peut mettre mal à l'aise, mais l'ensemble est tellement maîtrisé de bout en bout, que l'on en ressort exténué mais heureux d'avoir connu une telle expérience de lecture. Thriller sur le mal, la fascination qu'il exerce, ces multiples visages et facettes, réflexion aussi sur ce qui peut faire de nous des monstres, des voyeurs tout aussi abject.. J'ai aimé le style d'écriture percutant, l'absence de temps mort, la parfaite imbrication des différentes histoires.. Si vous ne deviez lire qu'un thriller cette année, je vous recommanderais, sans aucune hésitation, celui-ci. On touche du doigt le génie d'un Mattias Köping qui fait désormais partie des plus grands auteurs de thriller. Remarquable.
Lien : https://thedude524.com/2019/..
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Accrochez-vous, ça va secouer ! Si vous commencez ce livre, prévoyez de ne rien faire pendant deux jours, de boire beaucoup d'alcool, de laisser vos enfants crever de faim en hurlant sans cesse, « encore un chapitre et j'arrive », et éviter de manger toute nourriture aux alentours de la page 243 (chapitre 42)

Beaucoup de choses ont déjà été écrites sur « le Manufacturier ». Personnellement, je n'ai lu aucune chronique négative, c'est un carton plein absolu. Je ne vais pas déroger à la règle en écrivant que ce livre est un chef-d'oeuvre de la littérature noire, certainement un des plus terrifiants qu'il m'ait été donné de lire cette année, un des plus addictifs aussi, une plongée dans les méandres vertigineux de la folie et du sadisme humain. Nous savons tous que certaines guerres ont été particulièrement dégueulasses : la seconde, le Vietnam, l'Algérie. Beaucoup de ceux qui ont survécu refusent même d'en parler. Je pense particulièrement à l'Algérie dont les combats et les horreurs restent tus, même venant d'un grand-père refusant obstinément d'en piper mot. le conflit serbo-croate a inondé tous nos écrans, il se déroulait aux portes de l'Europe, a pris la forme d'un génocide, une catastrophe humanitaire dont je ne savais au final pas grand-chose. Cette méconnaissance aveugle du conflit est ici réparée par Mattias Köping qui en révèle les arcanes et n'y va pas par le dos de la cuillère en terme d'horreurs et de scènes de tortures plus abjectes les unes que les autres.

Cette violence monstrueuse, répugnante, suffocante n'est pourtant pas gratuite. Elle sert le dessein de plusieurs histoires dans ce roman unique et met en lumière des portraits de personnages incroyablement vivants, tellement réels qu'ils pourraient être nos voisins de palier. Si les personnages sont brillants, la façon dont l'auteur les traite l'est plus encore. Volontairement, je ne citerai aucun nom par peur de dévoiler une intrigue savamment orchestrée. Mattias Köping souffle le chaud et le froid sur son lecteur. Il vous fait aimer ses personnages, les prendre en affection, ou en pitié, pour mieux détruire et lacérer tout ce que vous avez pu ressentir à leur égard. Ainsi, ceux qui semblent détestables, renvoyant bestialité et animalité en début de roman, vous les prenez en affection imaginant que la vie a dû être bien féroce pour qu'ils en arrivent là. Naît alors un instinct presque maternel de vouloir protéger ou juste câliner un être dont la dureté ne peut que révéler un passif désastreux. Mattias Köping vous assomme alors d'une révélation qui vous laisse KO debout. A contrario, les personnages que vous prenez en pitié, ceux qui ont toute votre compassion parce que l'auteur vous révèle, assez rapidement, les horreurs qu'ils ont subies, vous parvenez à les haïr du plus profond de vos tripes. Ce que vous lisez, n'est pas ce qui est. Tout le livre est construit en trompe-l'oeil. L'auteur vous balade, vous manipule, vous écoeure avec force détails par des scènes que vous ne pourriez même pas imaginer dans vos pires cauchemars. Et des cauchemars, il vous en donne un paquet. Vous vous retrouvez tour à tour membre d'une famille torturée, putain dans une chambre sordide, avocate entrain de crever, orphelin marqué au fer rouge rongé par une soif intense de vengeance.

La construction du roman est brillante. Je vous le disais, vous suivrez plusieurs histoires d'une même histoire, vous vous demanderez à chaque page et de quelle manière elles vont se rejoindre. La force qui frôle le sublime, c'est cette volonté de l'auteur de ne pas vous donner ce que vous attendez, de ne pas alterner équitablement les chapitres qui parlent de l'un ou l'autre des personnages. Il vous fait mariner, il vous fait attendre, il vous emmitoufle dans un sadisme inconscient en titillant votre curiosité malsaine de voyeur qui se planque. Parce que oui, Mattias Köping fait de son lecteur un voyeur et surtout un témoin privilégié. Comment ? En vous offrant toujours un coup d'avance sur l'intrigue. Concrètement, ça veut dire que vous en savez toujours un peu plus sur l'enquête en cours et que, fort de cet avantage, vous pouvez observer et analyser comment il déroule le fil. Je crois que c'est une façon de procéder que j'aime assidûment chez un auteur et qui en fait, pour moi, un auteur de talent. Ce n'est jamais la fin qui m'intéresse vraiment, même dans un thriller, c'est la dextérité avec laquelle un écrivain nous y amène. Autant dire qu'ici, on est face à la crème de la crème. Les révélations qui sont données, au compte-gouttes sont vertigineuses dans les implications qu'elles enfantent, et donnent une force inouïe au scénario. Cette façon de retourner le lecteur dans ses certitudes, de ne le laisser respirer que par à coups, de proposer une intrigue intelligente, réaliste, dans une atmosphère anxiogène en fait réellement un prodige de la littérature noire. Peut-on employer ce mot lorsqu'il est question de viols, de meurtres, de tortures, de bestialité, d'inhumanité, de scènes qui génèrent une plongée dans la folie ? Je dis oui! Absolument! Sans aucun doute ! Pourquoi ? Parce que le livre n'est pas tout à fait un roman, il se place dans une réalité qui a existé. C'est sans doute le point le plus troublant, le plus dérangeant, la pensée la plus atroce qui m'habite en le refermant. Ce monde décrit est en fait notre monde, et l'homme dépeint est celui que nous avons laissé grandir. C'est vraiment la chose qui devrait nous faire flipper. Refermer ce livre ce n'est pas en avoir fini, c'est savoir que de telles monstruosités ont existé, existent, et existeront encore. Alors, le constat fait par l'auteur est triste, dans ce pessimisme ambiant où l'homme reste un loup pour l'homme, incapable de progresser, retranché dans sa bestialité, ignorant compassion ou mansuétude.

Mattias Köping se fait le témoin d'une ère, d'un temps, de comportements, de laisser-faire, de silences. Il sait adapter son verbe à la teneur de ses propos. Il sait formuler des pensées philosophiques, voire métaphysiques lorsque c'est nécessaire et que cela sert ses intentions. Il dépasse le roman noir, l'utilise comme prétexte pour donner un sens plus profond au tableau peint de notre société. Il sait même être poétique.(voir page 165-166) Plus généralement, il met sur la table des connaissances d'un conflit qui ont dû nécessiter de nombreuses heures de recherche et de témoignages, dévoilant par ce biais, la nature de l'Homme en situation de crise. La fin qu'il choisit pour clore son roman le démontre étonnamment bien. Ce n'est pas la fin que j'aurai choisie. Cependant après mûre réflexion, il demande encore une fois à son lecteur-témoin de faire un choix dans l'horreur. Et ce choix est abominable, les implications accablantes, les sous-entendus abjects (qui choisiriez-vous de sauver ?) et les conséquences crasses.

Certes, ce livre n'est pas à mettre dans toutes les mains. Oui, certaines scènes sont abjectes, oui les mots sont parfois orduriers, oui les souffrances explicitées sont du domaine de l'indicible. Rien n'est épargné, ni femmes, ni enfants, toutes les valeurs sont bafouées, chaque scène vous plonge dans un nouveau degré de barbarie quand vous pensiez avoir atteint le sommet, et pourtant… C'est un bouquin remarquable, puissant, à l'équilibre parfait, autant sur la forme que sur le fond, qui provoque des montées d'adrénaline et des descentes polaires. Impossible de rester indifférent à cette oeuvre magistrale qui fait de son auteur, un grand parmi les grands.

Je termine en disant que Mattias Köping a gravé pour toujours dans ma rétine une statue que je ne verrai plus jamais sans penser à ce qu'il en a fait dans son livre. J'avais eu la chance de la voir en vrai dans la basilique Saint-Pierre du Vatican. Oser toucher ainsi à une forme de sacré en transformant le sublime en monstruosité ouvre un pallier vers le destin sombre promis à l'homme. Dans le pouvoir suprême d'une description transcendante, Mattias Köping offre à son lecteur de pouvoir toucher le summum de l'abomination.

Je referme ce livre en me disant chapeau bas, Monsieur ! Il y aura un avant et un après « le Manufacturier »…. Un livre qu'il va falloir citer lorsqu'on évoquera la littérature noire. Nous allons compter Mattias Köping dans la cour des grands et cela va permettre une émulation dont je me délecte par avance !

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