Citations sur L'inconnue du quai (58)
Qui a dit qu'être mère était facile ?
J'étais heureuse dans notre maison en préfabriqué, à côté d'Ollagala, et malgré tous ces "un jour" de ma mère , je ne voulais pas que les choses changent. Elle avait coutume de dire : " Nous n'avons pas grand-chose, mais au moins nous sommes ensemble."
Et puis, un jour, même ça a disparu.
Ma mère adorait le thé . Surtout le thé vert . Des effluves de la boisson de Mme Flores viennent me chatouiller les narines , et aussitôt la voix de ma mère me revient en mémoire , affirmant que le thé vert protégeait du cancer, des maladies cardiaques et de la vieillesse .
Dommage qu'il n'ait pas eu également le pouvoir d'empêcher la Bluebird de sortir de la route .
Elles étaient pulpeuses , pleines de vie et productives .
Quand moi j'étais stérile. Aride et dévastée . Inutile .
[...] cette question me taraude. Et si Zoe n'avait pas été fille unique ? Les repas de famille auraient-ils été comme celui-ci - tendus et gênés, uniquement troublés par le bruit des mastications - ou au contraire animés et exubérants avec tirages de cheveux et blagues idiotes, insultes et chamailleries, n'importe quoi plutôt que le silence que notre seule enfant a adopté comme mode d'expression ? [A douze ans] Zoe incarne vraiment tous ces stéréotypes attribués aux enfants uniques - considérés comme solitaires, égoïstes et mal dans leur peau [...].
(p. 136)
Plus de trois millions de plaintes pour mauvais traitement à enfants sont ainsi déposées chaque année par des professeurs, autorités locales , amis de la famille, voisins ou à la suite d'inévitables appels anonymes auprès des services de l'enfance . Les termes "mauvais traitements" recouvrent des atteintes physiques - ecchymoses et fractures, plaies nécessitant des sutures , atteintes à la moelle épinière, au cerveau , au cou, brûlures au troisième degré et ainsi de suite .
Joseph était professeur de religion dans un collège communautaire. Il enseignait la Bible et, plus particulièrement, l'Ancien testament. Il enseignait un Dieu qui avait nettoyé le monde avec un déluge, déversant le soufre et le feu sur des villages entiers, tuant tous les habitants, femmes et enfants, bons et mauvais. Tout le monde. [...]
Joseph avait réussi à me convaincre que c'était moi qui déclenchais le tonnerre lorsque je faisais quelque chose qui déplaisait à Dieu. [...]
Joseph m'avait parlé de l'enfer. L'endroit où finissaient les pécheurs. Un lieu de punitions et de tortures incessantes et éternelles, peuplé de démons et de dragons, avec à sa tête le diable lui-même. La damnation éternelle. Des lacs de feu. Une fournaise. Un feu inextinguible. Du feu, du feu, du feu. Je vivais dans la crainte du feu.
(p. 143-144)
Rétrospectivement, c'est sans doute ce qui m'a le plus attiré chez Heidi quand nous nous sommes rencontrés : à la différence de tous les gens que je connaissais, elle n'était absolument pas obsédée par l'argent.
Son obsession allait plutôt vers ceux qui n'en avaient pas, les démunis, alors que moi, tout ce qui m'intéressait était de posséder le plus possible, de savoir qui avait le plus d'argent et de trouver comment faire pour lui en piquer une partie.
J'adore la bibliothèque avec son hall d'entrée inondé de soleil (quand il y en a évidemment), ses gargouilles grotesques en granit et ses millions et millions d'ouvrages. J'adore le calme qui baigne cette passerelle vers la connaissance, que ce soit la langue française ou l'histoire médiévale, l'ingénierie hydraulique ou les contes de fées, cet accès au savoir sous sa forme la plus primitive : par le livre, un objet qui a malheureusement tendance à céder rapidement la place aux technologies modernes.
"Nous n'avons pas grand-chose, mais au moins nous sommes ensemble." Et puis un jour, même ça a disparu.