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Citations sur Annabelle (13)

Elle revenait de la rue Viger et , parce qu'elle était épuisée, elle a décidé de prendre le métro. A la station Berri, comme il y a toujours du monde, elle s'est installée près du tunnel d'où la rame émerge. Elle écoutait une chanson de Sting sur son baladeur quand le métro est arrivé. C'est là qu'elle l'a vu. Comme un ralenti au cinéma. Un ralenti avec la musique de Sting, des visages stupéfiés sur la musique de Sting, et ce garçon, ce jeune homme qui saute, qui bondit comme un taureau dans l'arène, qui fait face au métro qui ne ralentit pas, pas assez, pas assez vite, les yeux d'un jeune homme décidés, butés et son corps qui vacille d'avant en arrière comme pour fournir sa part d'élan à l'impact. Elle l'a vu regarder la mort, elle l'a vu défier, attendre le métro, déterminé, les yeux fixes, les épaules rentrées, le front tendu contre le choc. Elle avait l'impression que si elle tendait le bras, elle pourrait freiner le wagon qui fonce, elle pourrait briser le mouvement dément, faire cesser le bruit atroce des freins inefficaces.
Elle n'a rien entendu d'autre, aucun son pour accompagner l'éclaboussement d'un corps projeté contre du métal bleu, rien, ni cri ni bang, seulement tout ce corps devenu liquide qui gicle partout sur la musique de Sting. Toute cette chair éparpillée, sanglante et tous ces yeux muets, fascinés. C'est en effleurant la tache rose sur son t-shirt qu'elle s'est mise à hurler. Comme une bête, gueule ouverte, elle hurlait sans pouvoir s'arrêter, pliée en deux, penchée au-dessus du gouffre à vomir son cri, vissée à même le sol qu'on tentait de lui faire quitter.
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Au début, presque sur ses gardes, Annabelle n'est pas très émue. La musique n'est pas une si grande perte, se répète-t-elle. Laissons-la aux gens doués qui ont du plaisir à exercer leur don. Mais, au mouvement lent que Lydia exécute avec un admirable legato, tout lui revient : le bonheur d'être assise au piano, d'arracher les notes du fond d'elle-même, de jouer avec tout ce qui l'habite et qu'elle ignore, l'in-nommable enfin nommé, la violence, l'isolement, la tendresse, la passion, toutes ces émotions si encombrantes qu'elle pouvait faire exploser sous ses doigts, avec son propre corps et un piano.
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Le couchant tamise l'éclairage peu à peu, l'enrobant de doré. Les oiseaux piquent dans les vagues et en ressortent avec des poissons qui brillent d'un dernier éclat avant d'être engloutis.
"T'entends ? Les vagues font un 4/4 ce soir : le temps va changer."
Elle n'aurait jamais parlé du rythme de l'océan. Elle n'a pas pensé que, pour lui aussi, tout se découpe en rythmes et en musique.
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Cette sonate de Schubert, si difficile à exécuter, cet andante dont la coda extrairait des larmes aux glaciers, s'échappe sous ses doigts raides. Plus elle joue, plus le clavier l'aspire, happe tout son chagrin. Elle est enfin chez elle. Elle n'est plus que ce contact furtif et puissant qui touche une corde, suspend le son, vibre et réveille toutes les abominations créées sur terre et toutes les minuscules consolations qui tentent en vain de faire gagner l'espoir. Elle reprend le même andante à deux reprises, le visage tendu de souffrance, le souffle hachuré.
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La nuit est tombée depuis un certain temps sur le fleuve quand il lui demande : "Tu veux venir avec moi, Anna ?"
C'est comme une pluie d'été chaude et douce dans sa gorge. Une pluie qui sent la terre brûlée de poussière, les feuilles déshydratées ; c'est le goût de ses larmes qui l'inondent du dedans.
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C'est comme une pluie d'été chaude et douce dans sa gorge. Une pluie qui sent la terre brûlée de poussière, les feuilles déshydratées ; c'est le goût des larmes qui l’inondent du dedans.
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» Elle hoche la tête, elle veut lui échapper, il se contente de la fixer avec ses yeux doux qui ne condamnent pas. Elle sait bien que c’était la chose la plus importante au monde, que c’était son rêve sacré. Pour elle aussi. Elle aussi voudrait retrouver le salon de Cape Cod quand la musique était légère et qu’elle coulait au bout de ses doigts sans effort. Quand la musique la soulevait, quand sa vie avait un sens. « Papa… papa, je voudrais, mais je ne peux plus… je m’excuse, j’ai essayé, je te jure, mais ça ne marche plus, ça ne vient plus. C’est… c’est parti. La musique est partie. »
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« Ce qu’il y a de pénible avec la vie, c’est qu’il faut collaborer, il faut l’organiser, la construire, l’édifier jour après jour. On ne peut pas se contenter de la subir. On ne peut pas se contenter de récriminer comme s’il y avait eu erreur sur la marchandise livrée. »
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Julie Boisvert [le professeur de piano] frotte doucement son dos comme toujours : « Respire, ma belle, avec ton dos, doucement. » et la main aide, soutient l’effort d’Annabelle. Comme par le passé, le mouchoir salvateur est tendu accompagné d’un : « C’est terrible Schubert comme il sait parler… »
Julie Boisvert retire la cassette, la replace dans la bibliothèque : « Tu l’as reconnu? »
Annabelle se remet à peine de ses émotions
- Non. Je… je n’ai pas fait attention à ça.
- Dommage…
- C’était qui? Lydia?
La main de Julie, si réconfortante dans son dos : « C’était toi, Annabelle, quand tu avais dix ans.
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« JE VEUX SEULEMENT TE DIRE CECI : DANS TOUTE CETTE MERDE, DANS TOUS CES SILENCES, J’AIMERAIS, EN FAIT JE TE SUPPLIE, DE NE PAS TE FAIRE DE MAL, DE NE PAS T’ACHARNER SUR TOI, DE NE PAS T’ABÎMER. JE M’EXPLIQUE MAL, MAIS JE NE VOIS PAS POURQUOI TU PAYERAIS POUR NOS ERREURS. POURQUOI TA MÈRE ET MOI, ON S’EN TIRERAIT PLUTÔT BIEN ET QUE TOI TU PÂTIRAIS. CE N’EST PAS JUSTE. ET LÀ, JE DIS NON. TU AS LE DROIT DE NE PLUS ME PARLER, DE NE PLUS ME VOIR, DE NE PLUS M’AIMER, DE ME DÉTESTER, DE ME RENIER, DE ME BATTRE (OUI, JE VAIS ME DÉFENDRE), MAIS JE T’EN PRIE, NE TE PUNIS PAS. »
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