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Critique de Rodin_Marcel


Lagercrantz David – "Indécence manifeste" – Actes Sud, 2016 (ISBN 978-2-330-06073-2) ; 382p. - copyright 2009 pour l'original en suédois

L'auteur produit ici une biographie romancée d'Alan Turing (1912-1954), mathématicien anglais qui fut l'un des principaux concepteurs de ce qui deviendra l'informatique et les ordinateurs.
Mieux encore, pendant la Seconde Guerre Mondiale 1939-1945, il appartint à l'unité intellectuelle d'élite réunit dans le secret absolu à Bletchley Park et ayant pour mission de casser le code secret "Enigma" mis au point par l'état-major allemand pour communiquer avec ses armées disséminées un peu partout, et surtout avec ses sous-marins qui infligeaient des pertes sévères à l'armada navale britannique. Selon certains historiens, l'aboutissement réussi de ce décryptage aurait permis d'avancer d'au moins deux années la fin victorieuse de cette guerre mondiale et la débâcle des troupes nazies.

Malheureusement, il faut attendre la page 163 et le chapitre 19 pour que l'auteur consacre à cet aspect de la carrière de Tuning à peu près autant de place qu'à l'autre versant, à savoir les quelques poursuites qu'il eut à subir du fait de son homosexualité.
Les dix-huit premiers chapitres ne traitent que de cet aspect, et par la suite, ce thème revient constamment, car l'auteur tient à faire passer sa thèse principale : c'est en raison de sa "différence" que Tuning aurait été en état de projeter ce qui deviendra l'informatique et la mise au point des ordinateurs.

Personnellement, je reste fort sceptique à ce sujet : de nombreuses autres personnes ont contribué à l'émergence de l'informatique de façon tout aussi décisive, et les homosexuels représentaient sans doute dans ce secteur la même proportion (relativement minime) que dans toute autre activité humaine, ni plus ni moins. Attacher une telle importance à cet aspect de la vie privée des gens revient vite à les faire passer pour des sortes d'animaux de cirque, ce qu'elles et ils ne souhaitent pas forcément, surtout dans ces générations où l'on distinguait encore radicalement entre la vie privée et la vie publique (ce qui n'est hélas plus le cas aujourd'hui, où tout un chacun se croit obligé d'étaler sa vie privée dans de grands élans nombrilistes).

L'auteur reste tout de même prudent sur les causes de la mort de Turing, même s'il la relie pesamment aux tracas judiciaires dont il fut l'objet en 1952 : l'un des biographes autorisés de Turing, Jack Copeland, penche de son côté plutôt pour un accident...

C'est bien écrit, c'est intéressant, ça se lit bien, mais je n'apprécie pas qu'un auteur se serve d'un sujet pour illustrer une thèse quelle qu'elle soit – surtout lorsqu'elle rencontre "par hasard" une thématique très à la mode...

Dans une tentative analogue, je trouve que le roman de Jérôme Ferrari intitulé "Le principe : roman" publié en 2015 (ISBN 978-2-330-06556-0 – voir recension) et consacré à la vie de Werner Heisenberg est bien plus convaincant.
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