"Un papa, il faut en prendre soin, on n'en a qu'un."
C'est faux. Moi, j'en ai eu deux. Le perfide et le repère.
Elle ne m'a pas porté dans son ventre, mais à bout de bras.
Ils ne pouvaient pas savoir qu'adopter n'était pas simplement adopter un présent et un futur. Ils adoptaient aussi un passé, des failles, des douleurs. Ils ne savaient pas que nous étions des bombes à retardement, affamés avant même de naitre, avant même de n'être, tout simplement.
Je ne me rappelle pas le goût du sein d'une mère, je ne garde en bouche que l'amertume d'une enfance brisée.
Lui aussi aurait aimé se blottir dans les bras d'une mère, lui aussi aurait aimé être bercé par la voix tendre et grave d'un père. Mais ce n'était pas lui qui avait été désigné pour vivre tout cela. Non, ce n'était pas lui. Il se sentait trahi par le Monde entier.
Si l'amour des mots les avait rapprochés, l'amour et ses maux les séparèrent, peu à peu.
Elle ne m'a pas porté dans son ventre, mais à bout de bras.
Autour de moi, durant des années, j'entends les gens répéter.
"Une maman, il faut en prendre soin, on n'en a qu'une."
C'est faux. Moi, j'en ai eu deux. L’Éphémère et la Merveilleuse.