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Citations sur La désertion (13)

Quatre jours après sa disparition, il s’était rendu en bas de son immeuble. Il était resté longtemps immobile, face à la porte cochère ; elle n’était pas apparue. Il avait aussitôt regretté son inertie des premiers jours. Il était revenu le lendemain, le surlendemain et le jour d’après. Jamais elle n’était venue. Même, le cinquième jour, il s’était rendu dans le nord de Paris, en bas de chez l’homme qu’elle fréquentait et jusque chez qui, un soir, il l’avait suivie.
Il craignait alors que cette pute, cette petite misère stupide, ne se fût suicidée en laissant une lettre qui l’aurait accusé. Il avait souhaité mettre à profit les quelques jours restant avant le déchaînement administratif à venir (procédure de licenciement, signalement aux personnes disparues, enquête) pour tenter d’y voir clair, et peut-être la retrouver. 
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Eva absente, il lui gardait son amour ; il avait fait le pari que, depuis la signification secrète qu'il avait accordée au mot de collision, les aléas des événements seraient les échos répercutés d'un chant qu'ils avaient entrepris tous deux, et dont la ligne mélodique perdurerait par-dessus le temps et par de-là leurs deux vies
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Elle n’avait pas été détruite, ni ne s’était suicidée, pas plus qu’elle n’avait essayé de négocier, de le faire chanter, de se venger. Elle s’était contentée de déserter le terrain de leur affrontement.
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Toute organisation humaine appelle une verticalité.
Toute association de personnes étant faite de leurs humeurs, de leurs incohérences, de leurs hauts et de leurs bas et de leur vanité et surtout, la plaie des plaies, de leur opinion, toutes ces personnes, lorsqu’elles sont réunies dans un but productif, ont besoin d’instances supérieures, rationnelles, décisionnaires, pour donner forme et nécessité à leur agrégat.
Il le croyait, il le savait.
Et quand bien même ces fonctions d’encadrement sont remplies par des êtres de chair, avec leur psychologie et leurs sentiments – avec leurs limites –, elles sont nécessairement inhumaines. Ou plutôt, non humaines. Ou encore, hors humaines.
Chaque matin, face au miroir, il se disait : « J’incarne l’ordre nécessaire à nos missions », avec une variante : « La mission est belle, elle est noble. » Et tous les matins, il se rêvait l’incarnant toujours plus, toujours moins humain, dissous dans l’idée de lui-même jusqu’à la disparition finale de son être réel.
Il le savait, cela lui convenait. Sans ordre, pas de société, pas de progrès, pas de réalisations ; une bouillie dépourvue de destination ; une purée de chaos. Cela lui convenait, même, cela lui plaisait. Il était un Cavalier luttant contre l’Apocalypse de la confusion.
Il exultait à l’idée de bientôt se fondre dans le tout d’une vie (par vie, entendez la vie à la grande échelle, la vie sur terre et non ce qu’il tenait pour ses irruptions aléatoires, les êtres humains) dont les mouvements seraient tous prévisibles et donc, encadrés – par des gens comme lui, des fantassins de la raison. Croyant sans Église, il se savait répondre à une autorité supérieure lui conférant une puissance secrète. Sa fonction était sacrée. Sans lui, pas d’ordre. Pas d’organisation. Ceux qui l’avaient recruté ignoraient la part mystique de son être ; lui, avait des renseignements sur tous.
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Toute organisation humaine appelle une verticalité?
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Avant, la vie allait de soi, les jours, les heures et les minutes, parfois elle pensait même aux secondes, les instants, la vie coulait, le travail, les rares amis, mais surtout le travail, ses missions, son importance, sa noblesse, oui, sa noblesse, et les rituels de la routine, la vie coulait, rythmée par le déroulé des jours, la répétition des tâches et des lieux, des choses à faire, des choses qu’on fait, prendre un café, faire une pause, voir les gens, sortir, sortir pour des dîners, des soirées, des apéritifs, avoir des discussions, appeler la famille, sa vie coulait, réglée, sans heurts, elle allait de soi jusqu’au jour où elle la refusa et elle ne saurait pas pourquoi. Elle ne saurait pas car ce n’était pas la question ici, la question, c’est un mouvement de bascule, la vie coule et, d’un coup d’un seul, tout s’effondre, tout.
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Paul avait en effet abandonné toute enquête ; la foi se passe de compréhension ; elle laisse filer vers l’inconnu, sûre de sa justesse. Il avait donc renoncé à comprendre et se contentait d’aimer. Depuis qu’elle avait disparu, depuis cinq ans, un mois et vingt-huit jours, il persévérait dans son ravissement. Il l’attendait.
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Il s’était fait un café pour mieux réfléchir à la collision, disant tout bas : "Le présent. Il n’y a que le présent. C’est ici, c’est maintenant et après on meurt."
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Cela n’avait pas duré bien longtemps, peut-être une dizaine de jours, et un matin elle n’était pas venue, un jour, deux jours, une semaine, deux semaines, tout le monde s’était inquiété, on l’appelait sur son téléphone portable, elle ne répondait pas, on lui écrivait chez elle, les lettres revenaient. On s’était même demandé si elle était morte et comment on licenciait une morte sans certificat de décès, puis ils s’étaient repris : si l’annonce de sa mort n’avait pas été faite, elle devait être vivante, quelque part et loin d’eux, ce qui lui avait été confirmé par un mot qu’elle lui avait fait porter au bout de trois semaines d’absence. Franck Bourgoin avait alors été contraint de la licencier, ce que Marie-Claude avait pris avec une forme de résignation douce.
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Il me semble que Dieu vous a envoyé sur terre pour m’essuyer.
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