Le fauteuil de César

Ils sont venus, ils sont tous là… mais il ne va pas mourir, César. Certes, il n'en est pas passé loin. Un grave accident de voiture dont on ne sait pas grand-chose, si ce n'est qu'il est cloué dans un fauteuil roulant. Dans une ferme qu'il loue au fin fond de l'Hérault, il se remet doucement, assisté par Amelia. Une sacrée bonne femme, cette Amelia ! Bâtie comme un bûcheron, le verbe haut, elle tempère les coups de sang de son employeur avec une sympathie mêlée de tendresse.

Pour ce trente-neuvième anniversaire qu'il a failli ne pas célèbrer, César Cramer, « l'écrivain », a convié ses amis à passer quelques jours à la ferme. Ses amis… et son ex-femme. Mais la bande ne semble pas si soudée qu'on aurait pu le croire (évidemment). Chacun y va de sa petite remarque grinçante, de son silence qui en dit long, l'humour noir du roi de la fête met plus mal à l'aise qu'il n'amuse, et l'ambiance, au milieu des montagnes, n'est pas au beau fixe. Avec le sens du drame que tous lui connaissent, César, au charme duquel personne, jamais, n'a su résister, a une demande bien particulière à leur soumettre pour cet anniversaire. La tension monte, les premiers éclats de voix résonnent et l'hôte, lui, ricane. Sam, Sophie, Lilas, Eddie, qui a des choses à cacher ? L'heure est venue de faire le point sur la soirée trop arrosée qui a coûté ses jambes à leur ami.

Le décor est bien planté. Les quelques pages que j'ai découvertes lors des présélections du Prix des Auteurs Inconnus étaient convaincantes : le Fauteuil de César était mon favori. le huis clos a ses charmes, la perfidie des personnages parvient souvent à surprendre. La lecture des premiers chapitres laissait présager un roman noir, plus noir qu'il ne l'est en réalité. Voilà ma déception : je me suis imaginé que… et puis non. Si l'ensemble est bien ficelé et bien écrit, sans ces tics de langage qui me hérissent (resservez-moi du « clairement » en début de phrase et je tachycarde), ça manque de piquant. Je ne m'attendais pas à un slasher, mais… bon d'accord, un peu quand même. Quelque chose de plus violent, plus revanchard, des personnages plus méchants, plus consistants – les relations entre les uns et les autres souffrent de quelque facilité. Mensonges, secrets, révélations, amour, amitié, la recette n'est pas d'hier, et pour la rendre plus savoureuse, il lui faut une pincée de truc-en-plus. Je suis arrivée au bout assez frustrée. Est-ce moi qui attendais trop ? Toujours est-il que l'auteur a le sens du rythme et la tombée de rideau est bien vue. Je m'en veux presque de me dire déçue. Lisez-le donc et voyez par vous-même.