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sur 111 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Dans le New York de l'entre deux guerre, des années 20, Charles Thomas Tester, un noir de Harlem, vit de petits boulots plus ou moins légaux, et joue du blues avec sa guitare, ce n'est pas le meilleur musicien qui soit. Un riche et étrange personnage de Brooklyn, va lui proposer un contrat juteux, où sa musique ne sera pas précisément l'objectif. J'ai aimé cette incursion dans l'étrange et le fantastique, c'est bien écrit, bien mené. J'ai découvert qu'il s'agit d'une variante sur le thème de “Horreur à Red Hook” d'H.P. Lovecraft. Je n'ai pas lu cette nouvelle et je me contenterai bien de cette version, ne supportant pas trop l'écriture de Lovecraft. L'incursion dans le blues apporte ici une couleur particulière, une atmosphère riche, la confrontation avec le fantastique fonctionne à merveille et les personnages sont bien abordés, leur évolution dans l'histoire est impressionnante, que ce soit Charles Thomas Tester ou l'inspecteur Malone. L'histoire commence doucement pour finir en une apothéose sombre et inquiétante et c'est parfaitement rythmé. C'est une lecture que j'ai appréciée, ce court roman m'a presque réconcilié avec H.P Lovecraft, ou je devrais plutôt dire : Lovecraft c'est pas mal quand c'est écrit par un autre.
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La collection Une Heure Lumière du Bélial' continue son bonhomme de chemin en proposant au lectorat français toujours plus de textes courts de qualité, souvent primés et écris dans la majorité des cas par des auteurs étrangers. Treizième de la collection, « La ballade de Black Tom » ne fait pas exception à la règle et permet de découvrir un nouvel auteur (américain, cette fois) puisque Victor Lavalle n'avait jusqu'à présent jamais été traduis chez nous. Sa novella s'inscrit dans un courant littéraire à la mode en ce moment qui consiste à réadapter des textes de Lovecraft tout en remettant en question la place des minorités dans son oeuvre. Après Kij Johnson et sa « Quête onirique de Vellitt Boe » (adaptée de « La quête onirique de Kadath l'inconnue ») qui proposait une réflexion intéressante sur la place des femmes dans le monde de l'auteur, Victor Lavalle revient pour sa part sur le texte de Lovecraft qui a sans doute la plus mauvaise réputation : « Horreur à Red Hook ». Cette réputation négative, elle tient d'abord à la qualité purement littéraire du texte qui, selon son auteur lui-même, ne figure clairement pas parmi ses meilleures oeuvres. L'autre raison pour laquelle la nouvelle est tenue en aussi piètre estime vient de son caractère résolument raciste, Lovecraft l'ayant écris après son installation dans un quartier cosmopolite de New-York, moment de sa vie qu'il a très mal supporté. Je n'ai personnellement pas eu l'occasion de lire le texte d'origine, et je vous avoue que je n'en ai pas spécialement envie compte tenu des quelques extraits nauséabonds auxquels j'ai pu avoir accès. Néanmoins si vous voulez un avis concernant « Horreur à Red Hook » vous pouvez vous reporter à l'article d'Apophis qui, lui, a eu le courage de se farcir la nouvelle originale.

L'univers n'a ici (presque) rien à voir avec les Contrées du rêve de Lovecraft, le récit surfant davantage sur le fantastique horrifique que sur la fantasy. L'action se situe à New-York dans les années 1920, où on fait la connaissance d'un certain Charles Thomas Tester, un jeune noir qui vit avec son père dans un petit appartement d'Harlem. Débrouillard, celui que tout le monde surnomme « Tommy » arpente le quartier à la recherche de petites combines qui lui permettent d'entretenir sa famille... quitte parfois à se retrouver confronté à des personnes très étranges. Tout bascule le jour où, alors qu'il jouait dans la rue, un vieil homme du nom de Robert Suydam lui propose de l'engager le temps d'une soirée dans sa maison cossue située dans les beaux quartiers. En dépit de l'étrangeté du vieillard et de sa proposition, Tommy accepte et se retrouve entraîné dans un terrible engrenage. le texte est décomposé en deux parties : la première est racontée selon le point de vue de Charles Thomas Tester, la seconde selon celui d'un certain Malone, inspecteur de police qui va, pour son plus grand malheur, croiser le chemin de « Black Tom » et Suydam. Nul doute que les lecteurs connaissant la nouvelle d'origine seront capables de repérer et d'interpréter l'ensemble des références distillées dans le texte par Victor Lavalle. Néanmoins, pour ceux qui, comme moi, ne connaîtraient pas l'oeuvre de Lovecraft, le plaisir de lecture reste très vif. L'auteur nous offre en effet un texte glaçant, qui séduit avant tout par son ambiance oppressante, presque malsaine lors de certaines scènes. Difficile de ne pas être tenté de dévorer la nouvelle d'une traite, tant l'atmosphère étrange qui imprègne cette ville de New-York exerce une fascination presque irrésistible sur le lecteur.

Le second gros attrait de l'ouvrage tient à la manière dont Victor Lavalle transforme un texte résolument raciste en une nouvelle qui rend compte et dénonce la condition des Noirs dans les États-Unis de l'époque (situation qui mériterait malheureusement toujours d'être améliorée aujourd'hui). A travers le parcours de « Black Tom », le lecteur se trouve ainsi directement confronté aux humiliations et aux injustices subies par les personnes de couleur. Les Noirs sont ainsi tenus de rester dans leur quartier (le personnage se fait interpeller dans les transports en commun ou toiser par les passants (quand ce n'est pas pire) dès qu'il s'éloigne d'Harlem) ; ils ne peuvent absolument pas compter sur la police (pour qui ils ne forment de toute façon qu'une seule et même masse indistincte) de même que sur une quelconque protection sociale ou juridique (le père de Thomas en a fait la difficile expérience en tant que maçon). Cette ségrégation est d'autant plus durement ressentie par le lecteur qu'il apprend à connaître au côté de Tommy les réflexes développés par la plupart d'entre eux pour ne pas se faire remarquer des Blancs ou ne pas alimenter leur colère. Là où Victor Lavalle fait fort, c'est qu'il réutilise les arguments développés par Lovecraft pour stigmatiser les populations noires et s'en sert justement pour faire passer le message inverse. Mises dans la bouche des Blancs auxquels le héros se retrouve confronté, des phrases telles que « Décidément, ces gens ne sont pas comme nous. Ç'a été scientifiquement prouvé. » ou « Pas étonnant qu'ils puissent vivre de cette manière » ne véhiculent alors plus une idéologie raciste mais servent au contraire à la dénoncer.

Victor Lavalle signe avec « La ballade de Black Tom » une excellente nouvelle qui parvient à rendre hommage à l'oeuvre de Lovecraft tout en retournant habillement la vision donnée par l'auteur des populations noires. Bourré de références (que les connaisseurs de Lovecraft saisiront certainement mieux que moi), le texte séduit aussi et surtout par son ambiance résolument oppressante ainsi que par la qualité de la plume de l'auteur. Une belle réussite.
Lien : https://lebibliocosme.fr/201..
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« La ballade de Black Tom ». En voici l'amorce qui ne soulèvera que peu d'éléments du récit :

Le New-York des années 20.
La ségrégation s'impose avec férocité.
Harlem, Brooklyn, le Queens … etc.
Quartiers ghettos noirs où la précarité règne. Quartiers blancs au goût de paradis. Un mur, virtuel, entre les deux. Les flics patrouillent en Ford T et font tampon. Ils protègent les plus forts des plus faibles. Dichotomie à contraste accentué, l'argent et le luxe pour les uns, la dèche pour les autres. La vie à pile ou face sur la simple couleur de peau.

Charles Thomas Tester, 24 ans, traine une six cordes acoustique en bandoulière. Voix sans âme et instrumentiste besogneux. En tant que musicien de studio: pour lui pas d'embauche, les oreilles des autres lui bottent le train arrière. Malin et débrouillard, il fait la manche, chantant et grattant les cordes, sur les trottoirs des quartiers limitrophes où son absence de talent ne trompe que les blancs. Tombent tombent les pièces dans son chapeau renversé aux pieds des immeubles en promesse de gratte-ciel. Sa vie bascule quand il est embauché le temps d'une soirée par Robert Suydam, un vieil homme blanc et riche, adepte de sciences occultes. L'attendent les horreurs lovecraftiennes que vous avez tous et toutes croisées.

Thomas F. Malone, flic de son état, blanc, dans le sillage policier de Suydam, filatures et enquêtes diverses. Il y croise les pas de Charles Thomas Tester déjà deux doigts dans l'Ailleurs. Bienvenue en HPL Land, ses codes, ses atmosphères où rôde sans fin ce que l'on ne distingue ni n'explique que vaguement, une boule de terreur au fond de la gorge.

Les deux personnages sont en quête de leurs destins croisés. Ils vous y attendent. En compagnie de Black Tom. Mais qui est ce dernier ?

La présente chronique n'a pas été facile à écrire : « La ballade de Black Tom », malgré sa brièveté (143 pages), ne manque pas d'éléments à mentionner pour chercher à aller plus loin que sa simple lecture, de particularismes singuliers et charmants qui en font tout le charme ... le concernant tout est dans les détails.

Je vais essayer de faire court …Mdr.

Victor Lavalle est un auteur tout neuf, tout nouveau en France. 4 romans et un recueil de nouvelles déjà parus ailleurs. le voici présenté, pour sa première publication hexagonale, dans la collection « Une Heure Lumière » chez le Belial Ed. qui a eu l'idée saugrenue en ces temps de crise, mais apparemment justifiée au regard des résultats et de sa longévité inattendue, d'avancer sur le terrain des novelas de Science-Fiction et de Fantastique proposées sous un bel emballage. La série en est à sa 24ème publication (juillet 2020) et semble drainer à sa suite un bon nombre d'afficionados (et quelques réticents). J'y avais lu «Les attracteurs de Rose Street » de Shepard qui m'avait laissé assez satisfait. Je m'étais promis d'y revenir si ce n'est que le prix … (refrain connu me concernant). Qu'ici soit remercié quelqu'un qui se reconnaitra et qui, à titre de réciprocité à venir, m'a permis de m'affranchir de l'obstacle.

L'auteur, Victor Lavalle, dédicace en page 9 la présente novela comme suit: « A H.P. Lovecraft avec tous mes sentiments contradictoires » … car c'est bien de çà dont il s'agit ici tant le Reclus de Providence est dans l'air lovecraftien que le récit véhicule; tant Lavalle s'y montre échafaudant un hommage à HPL couplé à une critique douce mais palpable de certaines de ses considérations raciales, entre refus de ce qu'a parfois écrit le Maitre et vénération pour ce qu'il a imaginé, en un positionnement qui s'apparente à la nécessité de l'exorcisme. C'est du moins ce que j'y pressens au regard de la mode actuelle des récits qui revisitent Lovecraft, ses mondes obscurs et sa manière.

Compliqué ? Oui et non. Je m'explique:

Victor Lavalle est noir, Lovecraft, beaucoup moins. Mais çà, les fans du « Reclus » le savent depuis longtemps, à force de l'avoir lu s'auto-positionner socialement de manière discutable. Sa plume, via Providence, s'en est fait l'écho, à longueur de nouvelles, novelas et romans. Mais bon, on lui pardonne : la fascination que l'on ressent à son égard est ailleurs : lorsqu'il entrebâille l'Ailleurs sous nos pieds, dans nos caves obscures et sonores, derrière nos murs et leurs papiers-peints décollés où les couches de salpêtre humide griffent les parois, au-delà de portes titanesques dévoilant les abysses insondables qui laissent entrevoir des entités menaçantes.

Au-delà de cette gêne (voire crispation coléreuse) à sentir Lovecraft raciste et antisémite, l'auteur d'origine ougandaise s'est nourri de sa Mythologie des Grands Anciens. Naitra « La ballade de Black Tom » à cheval entre lumière et obscurité. Tout du long des 143 pages de la novella on sent le « oui, mais » qui pose à plat et retricote. Il y décrit le racisme ordinaire qui courbe les échines et fait baisser les regards devant l'homme blanc. Il y prend le contre-pied du positionnement d'HPL et c'est salvateur.

Nous avons ici affaire à la réécriture totale d'une nouvelle de Lovecraft. Son titre : « L'horreur de Red Hook » (je ne l'ai pas lu, je ne l'ai pas en stock mais elle est écoutable sur You Tube) ; elle est parue en 1927 dans Weird Tales. Passant pour être une des plus polémiques de son oeuvre, Victor Lavalle s'en empare, la pose à plat et la retricote, usant de ses propres mailles et de son propre style, s'échappant de celui reconnaissable entre mille de son initiateur. Il offre une bonne part de l'intrigue à son chanteur noir, reconfigurant les faits relatés au regard de son ressenti d'homme noir, à sa manière, à l'aune de sa vérité. Que les choses soient enfin claires, que le lecteur juge, qu'il décide qui de lui ou de Lovecraft est le plus crédible.

Au final, percevant à minima cette « ballade » comme un récit fantastique traditionnel bien mené et bien écrit, ou du moins dans la bonne lignée lovecraftienne, je lui trouve en bonus son intérêt principal dans le contrepied, la réécriture, la mise en avant d'un angle nouveau. Je suis prêt pour un autre voyage de la même eau, le principe me plait au moins au titre de curiosité.


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Sous une anodine ballade dans les rues de Harlem, Victor Lavalle dynamite les apparences. Et ceux qui en font leur miel.

Charles Thomas Tester aurait pu avoir une vie normale comme tant d'autres. Mais il traine une sacré casserole dans cette Amérique des années 1920 : il est noir !

Cette novella peut se lire comme un simple récit fantastique, réussi qui dose très finement la montée dramatique. L'atmosphère est bien rendue, on est dans les pas du personnage, visitant ces quartiers malfamés, ou huppés dans une ambiance jazzy. Les personnages sont bien campés, tout en nuance.
Nous suivons la ballade d'un jeune noir qui survit grâce à quelques combines. Jusqu'au jour où il va croiser la route d'un vieillard qui ne se laisse pas abuser par l'habit... Peu à peu, l'auteur égrène quelques notes de magie, noire, d'occultisme et de réalité pervertie pour en milieu de récit changer de point de vue et nous offrir un autre regard.

On peut aussi lire ce texte de manière politique. Et c'est la cerise sur le gâteau.
Qu'elle soit vestimentaire, physique ou morale, l'apparence est un des maitre mot de ce texte. Charles Thomas Tester n'est pas dupe de cet état de fait, joue le Noir devant Le Blanc, devant le flic. Il est débrouillard, alors se faire passer pour une personne que l'on est pas, tenter de devenir invisible dans un quartier où être noir est un affront...
Le remerciement de Victor LaValle en début de texte "À H.P. Lovecraft, avec tous mes sentiments contradictoires" suffit en une économie de mots à rendre à Paul ce qui lui revient, mais c'est surtout un bon coup de genou dans les roubignoles de l'écrivain de Providence. En ces temps de Lovecraft-mania, salutaire!
Un texte aussi très actuel sur le ressenti des fils d'immigrés qui ont vu leurs parents trimer pour une misère, en devant baisser la tête pour unique prime.
Bref, une novella sociologique qui parvient à en dire beaucoup plus qu'un essai sur la condition des immigrés et des inégalités, tout en préservant le plaisir de lecture.

Cependant, malgré une montée en tension réussie et un regard social réaliste, La Ballade de Black Tom n'est pas un texte qui me restera longtemps en mémoire. J'ai trouvé le récit fantastique assez convenu somme toute. Je n'ai pas grelotté sous ma couette, ni sursauté.
Une belle ballade, certes, pas inoubliable. Mais tout à fait recommandable, pas comme certains textes d'un certain auteur...
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1924. Charles Thomas Tester, la vingtaine, vit dans Harlem de petits expédients et s'avère un musicien sans talent et sans oreille (il possèdent ses deux appendices de chair), un comble quand nous considérons ses origines et le milieu pauvre mais musical dans lequel il a été élevé. Sa mère était un chanteuse à la voix chaude et mélodieuse, son père, maçon de profession, maniait aussi bien la guitare que la truelle. Ce dernier a perdu son travail à la suite d'une mauvaise blessure, demeure dans l'appartement familial à pleurer sa défunte épouse et s'inquiéter sur l'avenir de son fils.

Otis, souhaiterait le voir reprendre le flambeau et chercher un travail plus stable au lieu de se contenter de quelques larcins, souvent en infraction avec la légalité. C'est lors d'une de ces missions qu'il est amené à flirter avec les dessous les plus sombres de Harlem et de ses environs. Il doit transporter un livre pour une dame dans le quartier voisin et pour une très jolie somme. Il s'agit du Grand Alpahbet, un codex très particulier…

Ce jour-là, le cours de son existence bascule. Non pas en raison de la vieille dame qui a acheté le codex, mais parce qu'il croise la route de Robert Suydam, un « illuminé » fan de sciences occultes. Celui-ci l'invite à venir jouer pour une soirée contre une somme faramineuse. Quelques minutes après cette rencontre, c'est l'inspecteur Malone qui l'interpelle au sujet de ce personnage bizarre.

Victor LaValle nous fait découvrir une Harlem de 1924 a l'ambiance tout à fait saisissante, une précarité « intrinsèque » à ce quartier, vivant replié sur lui-même avec ses lois et ses habitudes propres, ses clubs louches et accueillants, la musique à chaque coin de rue, sa délinquance, un ADN puissant.

Au-delà, il s'agit de la transformation d'un jeune homme s'émancipant par rapport aux autres, sa couleur et lui-même. Cette plongée happe le lecteur dans un univers aux franges de la réalité, aar les forces mises en oeuvre dans cette novella n'ont rien de bienveillantes. Suydam souhaite réveiller un Roi. Un Roi sombre, puissant.
critique plus complète sur mon blog
Lien : https://albdoblog.com/2017/1..
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En Résumé : J'ai passé un très bon moment de lecture avec cette novella qui est, d'une certaine façon, à la fois un hommage à l'univers de Lovecraft, mais aussi une réponse au racisme du maître de Providence. Victor Lavalle nous offre ainsi un récit maîtrisé dans son intrigue, ses révélations et ses surprises, qui offre une ambiance qui monte lentement en tension et en angoisse, poussant ainsi le lecteur à tourner les pages avec l'envie d'en apprendre plus. La narration à deux narrateurs est efficace et permet d'offrir deux points de vues, deux visions différentes. L'univers construit réutilise de façon solide et efficace les codes lovecraftiens, mais surtout gagne en intérêt dans la toile de fond qu'il dessine. Cette musicalité qui s'en dégage, mais aussi ce New York des années 20 à la fois fascinant, mais aussi glaçant par tout ce qu'il soulève comme réflexion sur la place de chacun le racisme ou encore la haine. L'auteur nous propose des personnages complexes, efficaces et fascinants à découvrir et à suivre. Qu'ils soient bons ou mauvais, ils ne manquent pas d'attraits à travers leurs envies, leurs quêtes ou leurs peurs. Je regretterai peut être une transition entre les deux parties un peu abrupte avec une ellipse légèrement frustrant, ainsi qu'une seconde partie peut-être un chouïa plus rapide que la première, mais rien de dérangeant tant j'ai passé un très bon moment de lecture. La plume de l'auteur est entraînante, efficace, soignée et je lirai sans soucis d'autres écrits de Victor Lavalle.

Retrouvez la chronique complète sur le blog.
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Ce petit roman est une réécriture d'une nouvelle de H.P. Lovecraft que je n'ai pas lu; je ne peux pas en conséquence la comparer à l'originale. Mais en soi le récit m'a paru assez intrigant. Ne pas avoir su de quel auteur il s'agissait j'aurais pencher pour du Edgar Allan Poe; une situation banale qui se complique tranquillement, des personnages un peu étranges aux contours mal définis, du fantastique apparait, prend de l'ampleur et le dénouement, qui n'en est pas vraiment un, nous laisse à la fois songeurs et un peu sur notre faim. Cette histoire n'est pas marquante, mais pas désagréable à lire non plus. de là à revisiter l'auteur il n'y a rien d'évident.
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Charles Thomas Tester est un jeune noir de Harlem en 1924 qui vit avec son père, se débrouillant par des magouilles dans le racisme ambiant. Il décide de jouer de la guitare près d'un cimetière dans un quartier blanc et rencontre Robert Suydam un vieil homme qui veut l'engager pour meubler une soirée. Il croise ensuite Malone un flic accompagné d'un détective qui semblent le surveiller. Tommy se rend comme convenu chez Suydam qui lui montre et lui vante le retour des Grands Anciens.
La première partie de l'histoire illustre la vie dans certains quartiers de New-York à cette époque de façon réaliste. le fantastique s'installe doucement et subjugue ce gamin perdu qui trouve dans l'ouverture de portes dimensionnelles une échappatoire. La seconde partie déroule l'enquête du flic passionné d'occultisme jusqu'au climax éminemment lovecraftien. C'est un hommage qui entérine le contexte social d'une Amérique raciste tout en se basant sur les réflexions universalistes d'un péril qui concerne l'humanité en tant qu'espèce. La ballade de Black Tom s'insère dans Horreur à Red Hook de Lovecraft, dans une mise en abyme qui permet de vivre l'embrigadement du point de vue d'un habitant, d'adoucir et de circonstancier le récit original, de développer les personnages de Suydam et Malone, de moderniser l'action avec l'intervention très musclée de la police, s'engouffrant dans les mystères ménagés par Lovecraft dans sa nouvelle, grâce à des témoignages et la caractérisation d'un nouveau personnage, membre de la population sournoise qui voue un culte aux Grands Anciens.
« Je préfère cent fois Cthulhu à des monstres comme vous. »
Lien : https://lesbouquinsdyvescalv..
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Je vais vêtir le costume de la lectrice volontairement naïve… tout simplement car je ne maîtrise pas suffisamment les écrits de Lovecraft et que d'autres ici ont fait une analyse des deux oeuvres bien plus pertinente que je ne pourrais y prétendre…
Est-il possible de lire « La Ballade de Black Tom » sans faire référence à Lovecraft ?
Victor LaValle nous y conte l'aventure de Charles Thomas Lester, Afro-Americain de New York, qui, en ces années 20, a bien du mal à survivre. Exploité, rejeté, harcelé comme tous ses frères de couleur, il virevolte grâce à des petits boulots, évidemment illégaux et accessoirement occultes.
Jusqu'à ce que le fantastique, la terre de tous les possibles s'ouvre à lui, en la personne de Robert Suydam. Cet illuminé lui fait miroiter la possibilité d'une vie meilleure, d'un retournement des oppressions s'ils parviennent à réveiller le Roi Endormi…
Ce pourrait être un conte de fée, un récit de fantasy dans lequel un peuple opprimé reprend espoir et oeuvre à l'avènement d'un sauveur. Mais la tonalité est ici tout autre : du sombre on passe à l'obscur ; du glauque au cauchemardesque ; de l'espoir à la perdition. le réveil du Roi Endormi n'apportera clairement pas un monde meilleur…
Le gentil Tommy Tester, le bon fils attentionné, perd son innocence et sa candeur pour passer de l'autre côté de la force.
Quant à Thomas F. Malone, le flic blanc et raciste, narrateur de la seconde partie de la novella, il est le témoin impassible des forces déchaînées : qui sème le vent récolte la tempête…

Alors bien sûr, il est évident que cette lecture est totalement différente sans les références à Lovecraft. le lecteur (et moi en premier lieu) passe à côté d'une certaine analyse, et possiblement d'un message. Mais faut-il nécessairement faire une analyse de texte pour apprécier une oeuvre ?
« La Ballade de Black Tom » est pour moi un constat amère : le pardon est impossible ; la vengeance est exponentielle et la gentillesse se flétrit forcément.
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La Ballade de Black Tom est une réécriture futée et intelligente de l'Horreur à Red Hook de Lovecraft. Victor LaValle reprend les grandes lignes de la nouvelle de Lovecraft (qui soit dit en passant, est loin de casser trois tentacules à un grand ancien), mais en adoptant le point de vue de Thomas Tester, musicien noir débrouillard vivant dans le quartier. Pour gagner quelques dollars, Tommy rend toutes sortes de services, comme celui de retrouver un manuscrit antique pour une vieille femme des quartiers riches... (mauvaise idée).

Au racisme décomplexé de Lovecraft, LaValle répond en décrivant le quotidien des noirs en Amérique à cette époque. Ça parle d'oppression et de vengeance, le tout bien dilué dans une histoire d'artefact maudit et d'entité indicible. LaValle n'a pas le talent de Lovecraft pour écrire l'horreur avec un grand H, mais il sait poser une ambiance soignée et décrire un quotidien inquiétant (et plus horrifique que le grand monstre, au final).

C'est malin, bien écrit, et ça mérite amplement les distinctions reçues.
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