Citations sur La ballade de Lila K (249)
On passe sa vie à construire des barrières au-delà desquelles on s'interdit d'aller : dernière il y a tous les monstres que l'on s'est créés.
On les croit invincibles mais ce n'est pas vrai. Dès qu'on trouve le courage de les affronter, ils se révèlent bien plus faibles et ils s'évaporent.
Mais non, Lila ! Ce n'est pas si étonnant qu'on te regarde. Tu es une personne remarquable. "Comment ça, remarquable ? Je l'ai vu hésiter un moment, légèrement s'empourprer. "Tu attires les regards, Lila, parce que tu es... enfin... ce qu'on appelle une beauté.
L'article racontait l'arrestation de ma mère : 16 novembre 95, 6 heures du matin. Une jeune zonarde, droguée, prostituée. La chambre dévastée. Les bouteilles d'alcool, les mégots sur le sol. Les draps souillés, mon corps martyrisé étendu sur le lit. Le placard plein d'immondices, les peluches entassées qui grouillaient de vermine. Je vous passe les détails.
Je n'ai même pas cillé, lorsque j'ai lu le titre à scandale dans la Zone : une enfant séquestrée dans un placard.
De son côté, Lucienne regardait la brochette posée dans son assiette d'un air désespéré. Trois grosses sauterelles luisantes de marinade qui semblaient la narguer, alignées sur leur pique.
- On passe sa vie à construire des barrières au-delà desquelles on s'interdit d'aller : derrière, il y a tous les monstres que l'on s'est créés. On les croit terribles, invincibles, mais ce n'est pas vrai. Dès qu'on trouve le courage de les affronter, ils se révèlent bien plus faibles qu'on ne l'imaginait. Ils perdent consistance, s'évaporent peu à peu. Au point qu'on se demande, pour finir, s'ils existaient vraiment.
- Je l'ai regardé sans répondre. Je le voyais soudain tel qu'il était : un pauvre type confit de solitude. Un type qui n'avait su garder ni sa femme, ni son enfant, ni son chat, ni rien, mais qui pouvait se targuer d'avoir ses entrées dans le cabinet du ministre. La belle réussite ! ... cela faisait longtemps que rien n'avait bougé dans sa vie; forcément, il ne supportait pas qu'il se passe quelque chose dans celle des autres.
J'essayais de répondre, tant bien que mal, mais ce n'est pas évident de raconter ses pensées, et d'exposer ses sentiments. C'est comme tout mettre à l'envers, l'intérieur vers l'extérieur, ça n'est pas naturel. En tout cas, ça ne l'était pas pour moi.
Mais surtout, je pensais que mes mots possédaient un pouvoir : celui de vous protéger. Tant que quelqu’un vous parle, quelque part, vous écrit, vous ne pouvez pas mourir. Vous êtes encore au monde ; vous lui appartenez. J’en étais persuadée, Milo, c’est pour cela que je suis allée jusqu’au bout : vous dire mon histoire, mais surtout, vous garder vivant.
J'ai soudain vu le livre s'ouvrir entre ses mains, éclater en feuilles, minces, souples et mobiles. C'était comme une fleur brutalement éclose, un oiseau qui déploie ses ailes.
Si je voulais avoir une chance de quitter le Centre un jour pour retrouver ma mère, il faudrait en passer par là : les contacts poisseux, les haleines douteuses, la tiédeur malsaine, tout ce frotti-frotta répugnant qu'implique forcément la vie en société.